19 mars : 3 millions contre Sarkozy ou contre la crise ?

Publié le 20 mars 2009 par Juan
Les deux mon capitaine !
Jeudi 19 mars, les grèves furent peut-être moins suivies mais la mobilisation dans les rues fut supérieure (1,2 millions selon la police, 3 millions selon les organisateurs), avec 213 cortèges partout en France. Ce furent les manifestations les plus massives depuis l'élection présidentielle de mai 2007.
Tous ensemble
Le secteur privé était dûment représenté jeudi 19 mars : Renault, PSA, Continental, Total, Saint-Gobain, Auchan, Carrefour, LCL, les Caisses d'Epargne, groupe EADS (24% de grévistes, selon la direction), Saint-Gobain (près de 20%, selon la direction), Auchan, Rhodia, Alcatel-Lucent ou Sanofi-Aventis. Les salariés du secteur public également (EDF, La Poste, France Telecom), l'Education Nationale, les transports publics, les aéroports ou l'audiovisuel public et le pôle emploi. Comme le 29 janvier dernier, les estimations du nombre de participants varient largement entre la "police" et les syndicats. Le plus risible des écarts concerne Marseille: 30 000 manifestants selon la police, 320 000 selon les organisateurs... Quoiqu'il en soit, les conclusions concordent : la mobilisation a été plus forte cette fois-ci que le 29 janvier dans les rues de France.
Aux inquiétudes exprimées le 29 janvier dernier se sont ajoutées des revendications pour une meilleure redistribution des efforts et des profits. A Paris, l'injustice demeurait le slogan principal. La critique de la politique du gouvernement se loge dans les témoignages recueillis sur place. Lisez donc celui de François, 51 ans, salarié de PSA à Aulnay-sous-Bois. Il travaille trop. « Il y a trop de boulot. La direction de PSA a pris la décision de faire chômer les 4/5e des sites du groupe. Du coup, à Aulnay, au mois d’avril et de mai, on va bosser deux samedi de plus par mois. Il nous font même bosser le samedi de l’Ascension. » Chômage partiel + heures sup = exploitation.
Mardi encore, le président opposait une fin de non-recevoir à ceux, y compris dans son camp, qui lui demandaient de suspendre le bouclier fiscal.
Président autiste ?

Le gouvernement communique
Nicolas Sarkozy avait promis d'aider la presse en achetant des pages de pub dans leurs colonnes. Ce fut chose faite cette semaine. Le jour de la grève, 11 titres de la presse quotidienne nationale (dont Libération, Le Figaro, Le Parisien et Les Echos ), 61 titres de la presse quotidienne régionale et les 4 titres de la presse quotidienne gratuite accueillaient un bel exemple de propagande gouvernementale: "Des mesures exceptionnelles viennent d'être décidées pour les Français les plus touchés par la crise". Lesquelles ? Celles que l'on connaît depuis plusieurs mois: RSA en juillet, suppression des premières d'impôts sur le revenu, bons d'achat de 200 euros d'emplois service pour certains foyers, etc. le gouvernement a dépensé 1,9 millions d'euros pour cette campagne.
Fillon au charbon
Jeudi soir, Sarkozy, parti à Bruxelles, avait envoyé Fillon au charbon du JT de TF1. «Monsieur le Premier Ministre, allez-vous annoncer un nouveau plan de relance?» lui demanda Laurence Ferrari. «Certainement pas» répondit le premier des zombies. Et effectivement, François Fillon n'annonça... rien. "J'écoute les Français tous les jours, ceux qui ont manifesté aujourd'hui et qui étaient nombreux, qui expriment une inquiétude qui est très légitime face à une crise mondiale d'une très grande gravité". Certains commentateurs espéraient a minima que Fillon annonce une accélération de la mise en oeuvre des mesures sociales décidées le 18 février dernier. Même pas. 
Le lisse Raymond Soubie, conseiller social de Nicolas Sarkozy, s'est permis de compléter quelque peu les propos du premier des ministres, sur RTL jeudi en fin de journée :
"l'on n'avait pas franchi d'étape dans la protestation par rapport au 29 janvier" (...) "Ce qui est incontesté, y compris par les syndicats", dit-il, c'est que "les taux de grévistes sont en diminution de 4 à 5 points dans le secteur public par rapport au 29 janvier. Donc, il y a un léger retrait".
"S'agissant des manifestations, le ministère de l'Intérieur a donné le chiffre de 1.200.000 manifestants, un chiffre assez semblable à celui du 29 janvier", ajoute M. Soubie.
"Ce n'est ni un échec, ni un demi-échec, c'est une mobilisation très significative de salariés inquiets"
En imaginant qu'il traduit plus précisemment la pensée présidentielle, on retient donc que Nicolas Sarkozy (1) pense que les syndicats ont un train de retard, (2) veut minorer l'importance du mouvement et (3) met les manifestations et grèves sur le dos des "inquiétudes", pas de la contestation de sa propre politique.
Président autiste ? Ou "méprisant, incompétent, obstiné" ?
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