Everybody’s looking for his Kat

Publié le 21 mars 2009 par Boustoune


Adapté d’un roman de Rachel Cohn (1), Une nuit à New York suit les tribulations de plusieurs adolescents du New-Jersey venus passer une soirée dans les quartiers branchés de la « Big apple ». Leur groupe de rock favori, « Where is Fluffy ? » a pour habitude de donner des concerts-événements dans des lieux tenus secrets jusqu’au dernier moment, obligeant les fans à déambuler dans les rues de la ville à la recherche d’indices sur le lieu du show.
L’histoire est surtout centrée sur la belle rencontre de deux personnages, Nick et Norah.
Nick est un doux rêveur, toujours sous l’emprise de son ex-copine, Tris. Il tente en vain de la reconquérir en lui réalisant des compilations de chansons, mais celle-ci ne fait que s’amuser avec lui, l’aguichant puis repoussant ses avances.
Norah est une camarade de classe de Tris. Elle aussi est assez mal dans sa peau, pleine de doutes quant à son avenir et embarquée dans une relation compliquée avec un type, musicien ringard qui lorgne surtout sur l’influence de son père, propriétaire d’une maison de disques.
La rencontre se passe dans un petit bar, où se produit le groupe de Nick, « Les branleurs ». Norah et sa copine Caroline sont venues y boire un verre avant le grand concert de « Where is Fluffy ? ». Tris est également là, flanquée de son nouveau jules et prend de haut les deux filles, désespérément seules. Norah, vaguement attirée par Nick, décide de le faire passer pour son copain, ignorant qu’il n’est autre que l’ex de Tris…
A partir de là, le film va se transformer en une sorte de jeu de piste où chacun cherche son chat. Tout le monde veut trouver Fluffy, bien sûr, mais pas seulement. Tris, jalouse, veut récupérer « son » Nick. Le jeune homme, de son côté, est partagé entre l’amour qu’il éprouve pour son ex et l’affection grandissante qu’il porte à Norah. Le sentiment est partagé, mais n’a pas vraiment le temps de se développer. La jeune femme doit retrouver son amie Caroline, qui s’est évanouie dans la nature, ou plutôt dans la jungle urbaine de New York, complètement ivre et paumée. Elle est aidée dans sa tâche par Nick et ses trois compères, des homos fantasques qui cherchent, eux, un nouveau nom pour leur groupe…
  
Des jeunes amoureux lunaires, des compagnons hauts en couleurs, une fille à papa paumée, un macho égocentrique et une garce manipulatrice. Tous les ingrédients sont réunis pour livrer un de ces « teen-movies » débiles que Hollywood produit à la pelle…
Sauf que le film est plutôt estampillé « courant indépendant New Yorkais » et qu’il est signé Peter Solett. Les grosses blagues potaches et l’humour en-dessous de la ceinture, ce n’est pas franchement le style du jeune cinéaste, qui a su au contraire démontrer une réelle sensibilité avec son court-métrage Five feet high and rising, puis avec Long way home, son premier long-métrage, qui en était le prolongement.
Solett sait comment plonger le spectateur dans une ambiance confortable, en s’attachant à des personnages vaguement familiers, et en montrant les choses sans artifices de mise en scène. Sa façon de filmer New York en est un bon exemple. Ici, pas de vues aériennes clinquantes prises d’un hélicoptère. Tout est filmé à hauteur d’homme, dans des lieux qui ne sont pas mis en avant dans les guides touristiques, mais tout aussi représentatifs de la ville : bars où s’exprime la jeune scène locale, cabaret gay, hall de gare, station de métro, petite épicerie, studio de musique… On n’y trouvera pas non plus de belles voitures de sport. Les héros roulent dans un vieux van et une Yugo délabrée ayant la couleur d’un taxi…

  
La même simplicité prévaut pour la description des personnages et des sentiments qui les habitent. Peter Solett s’attache à des petits riens, des regards, des gestes, qui suffisent pour faire passer l’émotion.
Il faut dire qu’il a su, comme pour ses premiers films, s’appuyer sur de jeunes comédiens épatants. C’est le cas notamment de son duo d’acteurs principaux. Michael Cera, le grand dadais de Juno, est parfait dans le registre du charme discret et de la fragilité émotionnelle. Kat Dennings, la révélation du film, fait preuve d’un bel abattage et de beaucoup de sincérité dans le jeu, à la fois drôle, touchante, forte et fragile.
A leurs côtés, on retrouve Alexis Dziena, aperçue dans Broken Flowers, en garce sexy, Ari Graynor, très drôle en blonde écervelée et alcoolisée ou le toujours fantasque Aaron Yoo. Plus quelques caméos de Devendra Banhart, Kevin Corrigan ou Eddie Kaye Thomas.
Il y a aussi la musique, actrice à part entière du film. Une nuit à New York est en effet saturé de chansons de la nouvelle vague de rock indie, de « Vampire Week-end » à « The dead 60s », qui s’enchaînent avec beaucoup de fluidité, accompagnant subtilement les virages du scénario.
Il souffle sur ce film un vent de liberté et de sincérité qui parvient à transcender une histoire qui, il faut bien l’avouer, n’a rien de novateur. Malgré les situations convenues, malgré le happy-end prévisible, malgré le côté caricatural de certains personnages, malgré des situations comiques insuffisamment exploitées, l’alchimie fonctionne parfaitement. On est comme en apesanteur dans un univers à la fois étranger et familier Dès les premières images, on est porté par le flot musical, on s’attache rapidement aux personnages, on s’identifie à eux, se remémorant au passage des virées entre amis..
Le film réveille aussi des souvenirs de cinéphile : les déambulations nocturnes de Griffin Dunne dans After hours, celles des quatre potes de Hangin’ with the homeboys, la virée déjantée, diurne celle-là, de Ferris Bueller, ...

On aimerait que ce flot de belles images et de bon son dure encore des heures, comme promis par le titre original de l’œuvre Nick & Norah’s infinite playlist. Un titre d’ailleurs beaucoup plus poétique que le titre français, ça devient une triste habitude… Cependant, pour une fois, ce dernier n’est pas complètement à côté de la plaque. Il rappelle Un jour à New York, et évoque les magiques comédies musicales d’antan, celles ou Gene Kelly et ses compères dansaient et chantaient dans les rues de la ville avec une énergie et une bonne humeur communicatives (2).
C’est d’ailleurs la principale qualité de l’oeuvre de Peter Solett. Une nuit à New York est un de ces petits films qui font du bien au moral et dont on sort le cœur léger et le sourire aux lèvres. Dans le contexte actuel, c’est toujours bon à prendre…
Note :
(1) « Une nuit à New York » Rachel Cohn – Coll. « Black Moon » - Ed. Hachette jeunesse
(2) L’une des héroïnes des romans de Rachel Cohn s’appelle d’ailleurs Cyd Charisse, en hommage à cette immense actrice de comédies musicales, qui a souvent partagé la vedette avec Fred Astaire ou Gene Kelly…



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