Une joie pure de la peinture

Publié le 22 mars 2009 par Fuligineuse

Une pure merveille que cette exposition des « Primitifs italiens » au musée Jacquemart-André. Bien sûr, ce ne sont pas des têtes d’affiche, il n’y a (sauf erreur de ma part) parmi les œuvres exposées qu’un seul Fra Angelico et un seul Filippo Lippi, mais les autres, moins connus, n’en sont pas moins remarquables. Et l’on est frappé par l’habileté et le savoir-faire de ces artistes appartenant aux écoles de Sienne et de Florence du 13e au 15e siècles.

On sait que le terme de « primitifs italiens » désigne les peintres qui amorcent le changement du traitement de la peinture, en Italie dans la période du Trecento, en introduisant trois principes nouveaux : l'humanisation des personnages représentés, l'apparition des paysages et des architectures complexes. 

La collection exposée – comprenant une cinquantaine d’œuvres – a été constituée au début du 19e siècle par le baron allemand Bernhard von Lindenau (1779-1854). Cet homme politique, astronome, amateur d’art et philanthrope ouvrit en 1848 dans sa ville natale d’Altenbourg, au sud de Dresde, une vaste demeure de style classique afin d’y exposer ses collections d’œuvres d’art et de favoriser l’accès du plus grand nombre à la culture « pour l’éducation de la jeunesse et le plaisir des anciens » (le brave homme !). C’est aujourd'hui un musée.
Le parcours proposé retient comme fil directeur la simple chronologie depuis les années 1280 jusqu’au début du 15e siècle, mettant ainsi en lumière la succession des grands courants esthétiques qui transforment en profondeur l’art italien à cette époque.


« Un florilège saisissant d’artistes prestigieux, de Guido da Siena à Liberale di Verona permet la confrontation de deux écoles majeures : celle de Sienne qui compte dans ses rangs Lippo Memmi, Pietro Lorenzetti ou Sano di Pietro et celle de Florence représentée, entre autres, par Fra Angelico, Lorenzo Monaco, Masaccio ou Filippo Lippi. » (Extrait du site de l’expo)

Je ne suis pas experte ni critique d’art, simplement quelqu'un qui aime la peinture, et celle-là donne beaucoup de joie à voir avec la richesse de ses couleurs et l’harmonie de ses compositions. Peinture très élaborée, codifiée, chargée de symboles et de significations dont, à part les spécialistes, nous n’avons souvent pas les clefs, mais cela n’empêche pas de percevoir sa beauté.

Je m’attarderai juste sur trois tableaux qui m’ont enchantée :

  • L’Adoration des Mages (1404) de Taddeo di Bartolo (un fragment de retable si je ne me trompe), tout en finesse, avec des rouges profonds et lumineux, un cheval blanc et un lévrier. Je n’ai pas trouvé d’image de cette œuvre mais la Crucifixion du même Taddeo di Bartolo (ci-dessous) donne une idée de son style.
  • Le Départ de saint Augustin pour Rome (vers 1435), de Pietro di Giovanni d’Ambrogio, m’a coupé bras et jambes. Petit panneau où on voit le saint debout à l’avant d’une barque, sur une mer d’un vert pâle incroyable (le catalogue de l’expo, très beau par ailleurs, ne le reproduit pas bien). Il n’y a pas de ligne d’horizon. Forme et couleur m’ont fait penser au Pauvre pêcheur de Puvis de Chavannes. Ça n’a sans doute rien à voir. Là non plus, pas trouvé d’image. Je vous offre en compensation la Naissance de saint Nicolas dont j’aime les arcades.

  • Enfin la Preuve par le feu de saint François devant le sultan (1429), de Fra Angelico, scène de la vie de François d’Assise qui a également été peinte par Giotto et d’autres. (Sur ce thème, voir la note de l’excellent blogueur Wodka « Le saint chez le sultan » à propos du livre du médiéviste John Tolan). Au centre le feu bien rouge parmi l’herbe bien verte…

Alors bien sûr, on peut aussi râler un peu, dire que l’espace est exigu et l’éclairage parcimonieux. C’est vrai mais la joie demeure. Et c’est là jusqu’au 21 juin 2009.

Fuligineuse

Source images :

Taddeo di Bartolo au Louvre

Pietro di Giovanni d’Ambrogio  à la Fotogallery

Fra Angelico chez Wodka