Cet album provoque surtout une émotion très vive, avec un sujet qui nous touche, nous a touché, et de toute façon nous touchera tous ! Au delà de la maladie d'Ernest, l'auteur illustre parfaitement ce besoin d'attachement auquel nul n'échappe. Même ce drôle de petit homme, le nouvel ami d'Ernest, qui est "fier de ne pas avoir de famille", car il prétend ainsi échapper à l'affection, ou plutôt à ses conséquences facheuses qui consistent à souffrir de l'absence ou de l'éloignement des êtres chers : une idée saugrenue démentie au fil des pages... puisque le petit arnaqueur des plus "barrés" est rattrapé par ce drôle de sentiment qu'on appelle amitié sans doute. Oui, au fur et à mesure qu'Ernest montre des signes de faiblesse, et une plus grande faculté d'égarement, son ami le suit, s'y attache, le protège, et tente de lui épargner le "second étage", le véritable mouroir.
Paco Roca traduit merveilleusement bien l'égarement, la fuite inconsciente de l'esprit qui s'évade sans crier gare. Il donne à voir également ce à quoi nous devons tous nous attendre, à savoir la perte des autres. C'est une bande dessinée sensible, drôle par moment, jamais pathétique. C'est un vrai régal qu'on ne peut s'empêcher de dévorer en moins d'une heure, un peu de temps pour oublier le reste, mais pas ses personnages.