marri - couche-toi là !

Publié le 15 avril 2009 par Collectifnrv

Vendredi soir. Rosa et Samuel viennent de dîner tranquillement dans un restaurant près de la gare de Lyon. Ils ont décidé de rentrer à pieds. Ils sont sur l'avenue Ledru-Rollin, quelque part entre l'avenue Daumesnil et la rue du Faubourg Saint-Antoine. Ils parlent du boulot, du repas, du quartier, du film qu'ils ont vu en début de soirée. Leur conversation est légère, mais à un moment, Rosa s'arrête net ; sans raison apparente. Elle demande :

-Tu as vu ?
- Non. Quoi ?
- Là ?
- Où ?
- A cinq mètres...
- Eh bien ? quoi ? C'est une cabine téléphonique...
- Oui. Mais, regarde bien.
- Tiens, c'est vrai !!! Non, j'avais pas vu...

le début.

Avant ça, il y a ceux qui sont couchés dans la rue ou dans le métro, mais bon, on accepte ; et avant ça, ceux qui couchent sur les bancs, mais, bon, on accepte...
Bien sûr, comme tout le monde n'est pas aveugle, la société parvient à corriger ses impairs. Alors, on crée des associations, on squatte des bureaux vides, on "alerte l'opinion". Mais, fondamentalement, on accepte l'ordre social, alors qu'il faut reprendre depuis le début. Qu'on se dise que rien que la propriété - que le "droit à la propriété" -, c'est grave : que, déjà, c'est une connerie !!! et donc, tout ce qui en découle : les loyers, les expulsions, les crédits, le patrimoine, mais aussi, et surtout, ceux qui font les textes - enfin, ces textes -, et qui font qu'ils soient appliqués ! et qui sont payés pour le faire !!!

Parce que ce qu'on voit là, c'est le résultat du "légal". C'est ce "légal", qui c'est choquant. Et, tu ne peux même pas dire que tu trouves ça "pas normal", parce qu'on te répond, "Oui, mais, qu'est-ce qui est normal ?". Et là, t'as envie de dire, que de voir et de laisser quelqu'un dans la plus totale détresse, qui en arrive là, eh bien, ça, "ce n'est pas normal !!! Le cynique te dit : "Si ! c'est normal, puisqu'il y en a de plus en plus...", "et même que personne ne fait rien...", "et puis, si ça se trouve, il dort comme ça pour se faire remarquer. C'est du snobisme !" Et bien, ce cynique-là, t'as qu'une seule envie : c'est de lui foutre sur la gueule, parce tu trouves ça normal de lui faire fermer sa gueule à débiter ce genre de conneries !!! Bref, chaque jour qui passe, on nous fait accepter l'inacceptable.

J'en ai marre parce que, la Terre, elle appartient à tout le monde ; à chacun de nous. Donc, qu'il n'y aucune raison de tout subir, à chaque fois. Que non ce n'est pas "normal" de se faire polluer, ou de se faire matraquer la gueule parce qu'on manifeste son désaccord avec la gestion économique d'un pays à fin de servir les finances du cercle des "amis" d'un trouduc ; comme non plus, de se faire prendre en otage parce qu'on a écrit un livre de contestation !!!


Dans ce Réel - et évidemment on ne nous le montre pas ! -, à chaque fois, il y en a un qui gratte l'autre, et plus il en gratte un, plus il va en gratter d'autres, et quand il n'y arrive pas seul, il trouve toujours le moyen d'en soudoyer deux ou trois pour foutre la pression, et quand il en soudoie deux ou trois, il y en a toujours quatre ou cinq autres pour se proposer à être encore plus efficaces : soit pour foutre des coups, soit pour raconter des salades. Et à chaque fois, encore un, et encore un... On n'en sort pas, et on en arrive là ! Là, le type, il se fout là parce qu'il se dit que s'il traîne seul dans un coin, il y en aura toujours un ou deux pour venir l'emmerder. Alors, il choisit un coin où il est à peu près sûr qu'il ne se fera pas trop emmerder. Et alors, il crèche dans une cabine téléphonique. Et les gens viennent vous dire : "Mais, c'est ça la démocratie ! Tout le monde est libre. Lui, vous voyez, il est libre de choisir de dormir dans une cabine téléphonique. Il a choisi entre celle-ci, et celle-là, plutôt qu'un hôtel ou un palace." Et, le plus connard rajoute : "C'est son choix ; et, il faut le respecter !"

Alors que le truc, mais le minimum, c'est qu'on devrait tous avoir sans exception un espace bien à soi, bien déterminé. Qu'on ait pas à chaque fois à montrer des papiers, des justificatifs, des titres ; qu'on n'ait pas à chaque fois, LA loi, LA police ; ou des connards sur le dos. Que justement, ce soit normal pour tous de circuler, tranquillement, de glander, sans risquer de se faire emmerder, contrôler, agresser... Bref, c'est tout le problème de l'éducation ; et comme par hasard, t'as l'autre connard - enfin, c'est pas lui, ce sont ses "amis" - qui font tout pour que ça empire, parce que dans leurs calculs, comme ils sont bien protégés, ils se disent que si ça explose, ils ne risquent rien, et que ça devrait encore leur rapporter...


par Albin Didon