Discrimination des conducteurs handicapés?

Par Handiady
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Publié le 25/04/2009 04:43 | Michel Amigues

L'accessibilité, sur une voie de garage

Le patron de Ionio dénonce l'absence de réglementation pour la conduite en fauteuil roulant.


Luigi La Scalea, qui a permis à près de 240 personnes en France de retrouver une autonomie dans leurs déplacements, pourrait cesser son activité en juillet «si rien ne bouge»…

Les personnes handicapées en fauteuil roulant ne sauraient être des conducteurs (trices) comme les autres, ce sont tout au plus des «paquets» qu'on transporte: présentée ainsi, l'affaire peut sembler quelque peu abrupte, mais c'est un résumé assez fidèle de «l'esprit des lois» qui régit - ou plutôt qui ne régit pas, et c'est tout le problème- la conduite des personnes à mobilité réduite. Une aberration dont Luigi La Scalea, le patron de la société agenaise Ionio Innovation, a fait son cheval de bataille depuis une quinzaine d'années.

«si ça ne change pas, en juillet j'arrête tout»

Car s'il s'en était tenu scrupuleusement à la législation en vigueur, aucune des 238 personnes handicapées, paraplégiques ou tétraplégiques pour la plupart, qui se déplacent aujourd'hui à leur guise aux quatre coins du pays dans une de ces voitures qu'il aménage sur mesure en fonction de leur degré de handicap et de leur type de fauteuil, n'aurait pu «retrouver ses jambes», comme le lui a dit un jour un client. Les voitures que Luigi transforme sont toutes équipées d'une plateforme télécommandée, côté conducteur, qui permet à ses clients de s'installer dans l'habitacle avec leur fauteuil sans aucune aide extérieure. Ce petit miracle porte un nom: l'autonomie. à tel point que certains clients en sont «à leur 6e ou 7e renouvellement de véhicule, notamment ceux qui ont des maladies évolutives comme la sclérose en plaques. Car il faut chaque fois réadapter tout le véhicule en fonction des spécificités de leur handicap». Mais voilà, le petit miracle pourrait bien prendre fin au mois de juillet. à cause de cette épée de Damoclès que constitue le vide juridique dans lequel il évolue. D'un côté en effet, les ingénieurs de Renault ou de Citroën l'ont très officiellement autorisé à opérer des transformations sur leurs véhicules. Des professionnels qui sont pourtant d'une prudence de Sioux, a priori peu suspects de légèreté en matière de sécurité. De l'autre, les directions régionales de l'industrie, de la recherche et de l'environnement (DRIRE), qui doivent donner leur visa à tout véhicule ayant subi des transformations: elles délivrent des autorisations pour le transport de personnes à mobilité réduite (TPMR), mais pas pour la conduite… puisque ce cas de figure n'est pas prévu par la loi. «Si bien que dans le cas d'un accident, si les assurances se défaussent, c'est moi, l'équipementier, qui peux être tenu responsable».

hypocrisie

Il suffirait d'une fois pour que l'affaire fasse jurisprudence… et puisse s'appliquer en chaîne à tous les véhicules estampillés Ionio. Même si à ce jour, ce sont environ «5 millions de kilomètres» qui ont été parcourus sur les routes de France par ces véhicules, sans pépin à déplorer.Une énorme hypocrisie que Luigi La Scalea refuse de continuer à cautionner plus longtemps, à ses risques et périls financiers, lui qui a été le premier en France à permettre à des personnes handicapées de conduire avec leur fauteuil. «J'ai prévenu tous mes clients que je risquais de tout arrêter en juillet, alors ils m'amènent leurs véhicules pour des révisions en profondeur, mon garage est plein, parce qu'ils savent qu'en cas de panne, personne d'autre n'effectuera les réparations sur leur véhicule, et ils se retrouveront…» sans jambes.