Sarkozy donne-t-il du crédit à la parole politique ?

Publié le 05 mai 2009 par Juan
Nicolas Sarkozy est en déplacement à Nîmes mardi 5 mai, pour une "réunion républicaine sur le thème de la France et l’Europe". Un déplacement très politique qui devait être intégralement décompté du temps de parole de l'UMP puisqu'il n'est ni plus ni moins qu'un simple meeting électoral.
Président d'un clan ?
A peine élu, Nicolas Sarkozy avait tenu des propos rassembleurs. Rappelez vous son discours du 6 mai 2007, il y a 2 ans jour pour jour, à 24 heures près : "Ma pensée va à tous les Français qui n’ont pas voté pour moi. Je veux leur dire que par-delà le combat politique, par-delà les divergences d’opinions, il n’y a pour moi qu’une seule France. Je veux leur dire que je serai le Président de tous les Français, que je parlerai pour chacun d’entre eux. Je veux leur dire que ce soir, ce n’est pas la victoire d’une France contre une autre. Il n’y a pour moi ce soir qu’une seule victoire, celle de la démocratie, celle des valeurs qui nous unissent, celle de l’idéal qui nous rassemble. Ma priorité sera de tout mettre en œuvre pour que les Français aient toujours envie de se parler, de se comprendre, de travailler ensemble."
C'était il y a une éternité. Depuis, le président ne cache plus ce qu'il est resté : le président de l'UMP. depuis des mois déjà, il profite de chaque déplacement officiel en France pour tenir une rencontre avec les militants UMP du coin, à l'abri des caméras. Parfois, une video amateur nous révèle ce qu'il dit à huit-clos. Cette fois-ci, l'UMP, et son président en tête, a ressorti ses thèmes de campagne, l'immigration, l'insécurité et le désordre. Le Figaro cite un conseiller élyséen qui confirme cette stratégie de mobilisation de son électorat: «Sans doute la grève des enseignants-chercheurs aide-t-elle à remobiliser son électorat contre la chienlit».
Ce mardi, Nicolas Sarkozy parlera donc à ses militants. Michel Barnier s'en défend: "Nicolas Sarkozy ne va pas faire un discours à l'UMP, il va s'adresser aux Français et peut-être aussi aux autres Européens".
Dernier détail, l'UMP n'a pas réussi à finaliser ses listes électorales, ... à 4 semaines et 3 jours du scrutin. Les sondages créditent l'UMP d'une première place, entre 25 et 27% des votes selon les instituts. Autrement dit, environ 73 à 75% des intentions de vote se portent sur des listes opposées à celles du chef de l'Etat (puisque l'UMP "rassemble" ses supplétifs du Nouveau Centre et de la "Gauche Moderne"). Un tel score après un aussi "bon" bilan de la présidence de l'Union Européenne, ça signifie quoi ?
L'échec européen de Sarkozy
Nicolas Sarkozy et ses proches ont jugé que le bilan de la présidence française de l'Union Européenne l'an passé était positif. Ils veulent le mettre en avant dans cette campagne européenne. On reconnaîtra au président français une énergie communicative, mais un désir mitigé d'Europe. Sa réaction face à la crise mondiale est un formidable exemple.
Nicolas Sarkozy s'est montré très suiviste. Du 15 au 26 septembre, il s'est permis d'attendre une dizaine de jours avant de trouver une parade communicative ('il faut moraliser le capitalisme'), et promettre seul et sans concertation une garantie publique des dépôts des épargnants français. Ensuite, c'est Gordon Brown, et non Nicolas Sarkozy, qui a fourni l'idée maîtresse de compréhension de la crise: l'économie s'asphixie faute de crédits interbancaires. Les banques ne se prêtaient plus entre elles, trop inquiètes des risques sous-évalués et autres faux bilans. Sarkozy seul n'avait rien pigé. Puis, Sarkozy se targua d'avoir obtenu la tenue d'un G20 à New York, à l'issue duquel un second G20 fut décidé pour avril, à Londres. Résultat ? On ne sait pas vraiment. Nicolas Sarkozy est resté fidèle à son antienne ("c'est la faute à ceux qui ont dévoyé l'éthique du capitalisme"). Et la liste des "méchants" paradis fiscaux qu'on attendait fournie se vida si rapidement qu'on se demanda à quoi sert encore le bouclier fiscal français. Coté relance, l'Europe a été incapable de coordonner ses actions. Au mieux, Nicolas Sarkozy s'est fait taper sur les doigts quand il fit semblant de conditionner les aides françaises au secteur automobile français à un maintien de l'emploi en France. Chacun a joué sa partie. Et la France plus tardivement que les autres (les plans espagnol, anglais et allemand ont été déclenchés avant le nôtre).
L'environnement, le bel oublié
Que reste-t-il donc du bilan français à la tête de l'Union ? Un plan Climat ? La belle affaire. A peine voté, sitôt oublié.  Le 13 décembre dernier, les chefs d'Etat européens signaient un accord sur le Plan Climat Energie qui fixait de nobles objectifs :20% d'émissions de gaz à effet de serre en moins par rapport à leurs niveaux de 1990, 20% d'énergie renouvelable dans la consommation, et 20% d'économies d'énergie. On regrettait déjà l'absence de mesures coercitives pour les récalcitrants.
Mais quelques mois plus tard, Sarkozy s'est bien gardé de rappeler que l'Union Européenne n'avait finalement pas voté, en mars dernier, les moyens nécessaires, financiers ou coercitifs, pour atteindre ses objectifs de réduction de 20% de ses émissions de gaz carbonique, d'augmentation à 20% d'énergies renouvelables, et de 20% d'efficacité énergétiques de plus qu'en 1990. Greenpeace s'est indigné : « Les ministres européens des Finances consacrent des milliards d'euros d'argent public pour le sauvetage des banques et de leurs dirigeants mais sont incapables d'allouer un centime d'euros lorsqu'il s'agit de répondre à la crise climatique ».
Plus récemment, le gouvernement français a demandé aux députés européens français de voter contre le principe d'une traçabilité des produits bois, des forêts de productions aux consommateurs finaux, dans le cadre d'unj projet de loi étudiée au Parlement européen sur la filière bois. L'Europe importe beaucoup de bois, et les filières clandestines sont importantes. Mais le gouvernement Sarkozy critique ce « dispositif trop lourd », et « totalement prohibitif ». 


L'ennemi est dans le détail.


Sarkozy : "Dire ce que l'on pense et faire ce que l'on dit"
par politistution