Paso Doble n°139 : Libertas, libertas, que de crimes sont commis en ton nom !

Publié le 16 mai 2009 par Toreador

A las cinco de la tarde…

L’Assassin habite au 27

On nous rabâche partout que la campagne des Européenne n’a pas décollé, n’a pas d’enjeu ni d’intérêt. C’est en partie faux si l’on regarde le comportement de la Droite dite « eurosceptique » où se joue une opération de communication novatrice. Je veux parler du réseau Libertas.

Philippe de Villiers a réussi un triple meurtre en plaçant le MPF dans le réseau de Declan Ganley. Premièrement, alors qu’il était très isolé sur la scène nationale et décrédibilisé, l’opération Libertas donne le sentiment, uniquement marketing, que le MPF a des partis frères .

Première victime : l’isolement.

Deuxièmement, sur la scène politique nationale, de Villiers a capté le CPNT, généralement bon pourvoyeur des attentes du monde rural, en l’attirant, au prix de quelques remous internes, sur la liste Libertas. Moralité, cette alliance, qui aurait pu paraître improbable il y a un an, désenclave encore un peu plus le MPF et permet d’effacer le souvenir douloureux du pacs Pasqua/Villiers. Et lui rajoute un bonus de visibilité par rapport à ses concurrents, à commencer par Debout la République, pourtant plus proche idéologiquement.

Deuxième meurtre : Debout la République.

Le parti de la révolution institutionnelle ou la révolution mexicaine de de Villiers

Troisièmement, de Villiers participe à la création d’un concept jusqu’ici inconnu : le vote de protestation institutionnel.

Je m’explique : jusqu’ici, l’électeur assimilait le vote pour les partis dits protestataires à un vote défouloir. Jusqu’au 21 avril 2002, nul n’avait imaginé par exemple que le Pen puisse être au second tour, et la massivité du rejet qui avait suivi avait démontré que son parti n’était pas perçu comme suffisamment compétent pour prendre les rênes du pays. Dans le cas des élections européennes, où dominent les deux mastodontes que sont le PSE et le PPE, le vote PMF, FN ou d’extrême gauche ne pouvait être qu’une pétition de principe.

Dans le cas d’espèce, la base électorale de Libertas (12 pays) est bien trop faible pour prendre le pouvoir au Parlement. Mais si cette alliance parvient à passer le seuil fatidique des 40 ou 50 députés, elle sera le premier parti transnational eurosceptique à s’être monté dès la phase de campagne (et non comme plate-forme d’alliance post-électorale avec combinazione de partis).

Troisième victime : les partis europhiles.

LIBERTAS… REALIST ?

Ce merveilleux coup marketing ringardise, selon moi, le seul qui pouvait être un concurrent pour Villiers, son homologue néo-gaulliste Dupont-Aignant, qui a lui aussi entamé une réfection de son positionnement. Il n’y a qu’à voir son obsession de ne pas se faire appeler « souverainiste » pour qu’on ne le confonde pas avec son ancien collègue du RPF.

Il reste à Dupont-Aignant essentiellement des outils marketing  pour exister (l’identification visuelle du parti, par exemple, qui a choisi le mauve) et le terrain des idées, qui sont moins agressives que celle du Vendéen. Reste que le Vendéen, lui, s’est affranchi du problème du financement qui pourrait, en cas d’échec, durablement doucher l’enthousiasme du député de l’Essonne.

Voilà qui comptera dans 3 ans pour la présidentielle…

Reste à espérer que le parti relayé par le Puyfolais ne soit pas un Feu Follet. De la même manière que le PPE ou le PSE rassemblent des partis très hétérogènes, Libertas va d’anciens mussoliniens à des libéraux anti-bureaucratie, en passant par le vicomte. Sa cohésion est un mystère. En Irelande, le parti est qualifié de « fasciste » par ses détracteurs.

Si Libertas risque d’être un succès démocratique, il y a fort à craindre qu’il devienne donc un Titanic une fois fracassé sur l’iceberg du réalisme bruxellois. Dans ce cas, Villiers aura été le lapin de la Fable, et Dupont, la tortue, si elle n’est pas morte écrasée sur le bord de la route…