Expiation

Par Liliba

Ian Mc EWAN

Briony est une petite fille anglaise de treize ans qui, en cet été torrible de 1935, a trouvé sa vocation : elle sera romancière. Pour elle, écrire est un moyen de comprendre la vie et ceux qui l'entourent et elle pense être assez mature pour transposer sur le papier sa vision du monde, qu'elle croit lucide et pertinente. Mais Briony reste une enfant malgré tout et lorsqu'elle est confrontée à la vision de sa soeur Cécilia avec Robby, le fils de la domestique, elle est terriblement choquée et va, par son attitude, provoquer une tragédie.

Le charme buccolique de la campagne anglaise est alors teinté de drame. Un viol, des accusations, un innocent comdamné, des yeux qui se ferment, une famille qui se déchire... ainsi le destin de plusieurs êtres est marqué par les affabulations et le mensonge d'une enfant.

La famille s'éparpille et chacun s'adapte comme il peut aux conditions de vie difficiles puisque la guerre sévit en Europe. Mais le destin fera se rencontrer à nouveau Briony et sa soeur, ainsi que Robby dont nous suivons le terrible itinéraire. Briony, en brisant le bonheur de sa soeur a également perdu son innocence et sa joie de vivre. Pourra-t-elle, plus tard, remonter le fil du temps et se faire pardonner ? Est-il possible de réparer les dégats causés sur les êtres par le repentir, même s'il est sincère ? Peut-on expier un mensonge fait dans l'enfance ? L'amour est-il plus fort que tout ?

J'ai dévoré ce roman d'une traite, tant le style m'a plus, de même que l'histoire de cette famille déchirée sur la foi d'un serment d'enfant. Un vrai bonheur de lecture, détendant mais qui fait réfléchir. Je n'ai pas vu le film, mais suis très tentée de le visionner prochainement.

Extrait :

« Les répétitions gênaient aussi son sens de l’ordre. Le monde contenu qu’elle avait défini avec des lignes nettes et parfaites avaient été défiguré par les gribouillis d’autres esprits, d’autres besoins ; et le temps lui-même, si facilement divisé sur papier en actes et en scènes, s’écoulait à présent de facon incontrôlable. Sans doute qu’elle n’aurait plus Jackson jusqu’après le déjeuner. Léon et ses amis devaient arriver tôt dans la soirée, peut-être même plus tôt, et la représentation devait avoir lieu à sept heures. Et il n’y avait pas encore eu de vraie répétition et les jumeaux ne savaient pas jouer, ni même énoncer, et Lola avait volé le role qui revenait de droit à Briony, et rien ne pouvait être organisé, et il faisait chaud, ridiculement chaud. Opprimée, la jeune fille s’agita et se leva. La poussière des planches avait sali ses mains et le dos de sa robe. Perdue dans ses pensées, elle s’essuya les paumes sur le devant de sa robe tout en allant vers la fenêtre. La facon la plus simple d’impressionner Léon aurait été d’écrire pour lui une nouvelle, de la lui remettre elle-même entre les mains, et de l’observer pendant qu’il la lisait. Les lettres du titre, la couvertures illustrées, les pages reliées—dans ce mot même, elle ressentit l’attrait du format net, limité, et contrôlable qu’elle avait abandonné en décidant d’écrire une pièce. Une nouvelle était directe et simple, n’autorisant rien à s’interposer entre elle-même et son lecteur—pas d’intermédiaires avec leurs ambitions personnelles et leur incompétence, pas de pression de temps, pas de limites de ressources. Dans une nouvelle, vous n’aviez qu’à souhaiter, vous n’aviez qu’à mettre sur papier, et vous pouviez posséder le monde ; dans une pièce, vous deviez vous débrouiller avec ce qui se présentait : pas de chevaux, pas de rues de village, pas de bord de mer. Pas de rideau. Cela semblait si évident à présent qu’il était trop tard : une nouvelle était une forme de télépathie. En inscrivant des symboles sur une page, elle pouvait envoyer des pensées et des sentiments depuis son propre esprit jusqu’à celui de son lecteur. C’était un procédé magique, si ordinaire que personne ne s’était penché dessus pour s’en émerveiller. Lire une phrase et la comprendre étaient une seule et même chose; comme en faisant un signe du doigt, il n’y avait rien entre eux. Il n’y avait pas d’intervalle pendant lequel les symboles étaient interprétés. Vous disiez le mot château, et le château surgissait, à une certaine distance, avec des bois de plein été étalés devant, l’air bleuâtre et doux avec de la fumée s’élevant de l’atelier du forgeron; et une route pavée se déroulant dans l’ombre verte. . . »

Keisha a beaucoup aimé, de même que Lilly qui l'a lu deux fois.