Vos propositions contre les violences scolaires

Publié le 08 juin 2009 par Soseducation

Dans la discussion qui a suivi notre appel à Xavier Darcos, trois lecteurs ont donné leurs propositions pour lutter contre les violences scolaires.

Lefèvre, vendredi 5 juin à 22h03 :

1. Pour créer de vrais cours de morale et de civisme, il suffit, à l’école publique, de restaurer l’éducation civique (ce n’est pas la même chose que l’instruction, dans l’éducation, l’élève agit). Par ailleurs, la morale est une notion religieuse, et n’a pas sa place à l’école publique. Il faut aussi redéfinir les temps d’enseignement de cette discipline, à une heure hebdomadaire. (et non une demi-heure comme actuellement depuis les programmes de la rentrée 2008).

2. Le premier moyen de restaurer le prestige et l’autorité des professeurs est d’abord que le ministre arrête de les mépriser. Eux, ils savent de quoi ils parlent, ils maitrisent la règle de trois et la conjugaison. Il faut reconnaître leur travail, et l’importance de leur mission pour l’intérêt général. Les enseignants ne sont pas tous des fainéants, d’ailleurs, l’OCDE, qui n’est pas un dangereux syndicat gauchiste, évalue leur temps de travail à 40 heures par semaine.

3. Pour rétablir des cours dans la formation des enseignants, il faut maintenir leur formation professionnelle.

4. Sans restaurer la fonction de surveillant général dans les écoles, on pourrait, si on considère que les élèves ont besoin d’un accompagnement, arrêter de supprimer des postes.

5. La mission de l’école n’est pas d’exclure, il est préférable d’éduquer.

6. L’enseignement de l’éducation civique apprend aux élèves le sens des responsabilités, et le devoir de réparation des dommages occasionnés.

7. [...] Il existe des internats éducatifs, auxquels il convient de donner les moyens.

8. Certains parents ont besoin d’aide.

Gérard Tavin, samedi 6 juin à 9h54 :

1. Supprimer le statut de fonctionnaire pour les enseignants : rien ne le justifie, au contraire, le maintien dans le système des gens qui ne sont pas faits pour. Nouveau statut : profession libérale ouverte à tous sur CV.

2. 900 000 enseignants pour 12 000 000 d’élèves, cela fait une moyenne de 14 élèves par enseignant : conserver ce nombre d’élèves par enseignant pour ne pas augmenter le travail de ces derniers, mais augmenter le temps de présence pour faire un vrai travail d’éducation dans une classe à faible effectif plus facile à gérer (tendre vers les 14) et être plus proche des élèves en difficulté.

3. Donner aux directeurs d’établissement scolaire un vrai pouvoir de choisir ses enseignants d’après leurs compétences et leur charisme.

4. L’intitulé «Education nationale» est une appellation mensongère: dans les fait les «enseignants» enseignent mais rien ne les oblige de s’impliquer dans la fonction d’éduquer. Il faut donc remplacer le titre d’enseignant par celui d’éducateur-enseignant, de la maternelle au collège. Le recrutement serait fait d’après les aptitudes du postulant.

5. Cesser de clamer que l’enfant est au centre du système (alors qu’il est évident que c’est l’enseignant qui y est) et appliquer tout ce que l’on sait au sujet des rythmes scolaires depuis des décennies.

6. Personne ne conteste l’importance des expériences vécues au cours des premières années d’enfance : remplacer les «maternelles garderies» de plus de trente enfants par des classes de 15 enfants maximum recevant une véritable éducation à la vie sociale qui les attend, en particulier apprendre le respect de l’autre. Il va sans dire que les éducateurs recrutés pour ce poste devraient faire partie des meilleurs.

David Barbaud, samedi 6 juin à 11h03 :

1. La responsabilité première est familiale. Société consumériste, jouissance immédiate, crise des valeurs, doltoïsation de la société (la malheureuse [Françoise Dolto] fut souvent mal comprise), sacralisation de l’enfant qui est devenu le centre de la cellule familiale (et du système scolaire), médias glorifiant l’ado consommateur, le «jeune» (autre volapuk du langage socialisant) – il suffit de voir l’ahurissant documentaire de Canal + sur les adolescents ce début de semaine – et enfin mépris souvent constaté à l’égard d’un corps enseignant qui, hélas, n’est pas toujours exempt de reproche. Bien entendu, il ne s’agit pas de nier une paupérisation sociale de plus en plus visible dans les cités et en milieu rural (où j’enseigne).

2. La crise du primaire : je ne reviendrai pas sur les ravages de la méthode globale (toujours appliquée dans la majorité des écoles malgré les dénégations des «spécialistes»), mais je voudrais rappeler que le redoublement en primaire est quasi inexistant et que les élèves ont officiellement jusqu’à la fin du cycle élémentaire pour savoir lire et écrire (CE2), ce qui est totalement suicidaire. Si on ajoute à cela que l’école primaire est devenue une école de l’«éveil» et non de l’acquisition des fondamentaux (les exercices à la maison ont été très longtemps interdits) et que fort peu de «professeurs des écoles» (vocable pompeux consacrant ceux des instituteurs ayant fait allégeance à saint Meirieu) ne montre de goût ni d’intérêt ou simplement même de compétence pour l’histoire, la géographie, les mathématiques, les dictées (orthographe, sciences des ânes disent nos chers pédagogistes) et préfèrent les ateliers-cuisine, ou mener des débats stériles (peut on débattre quand on pas encore acquis les clés du vocabulaire ?). On comprend dès lors pourquoi nous récupérons en sixième des élèves qui ne savent absolument rien.

3. En effet, depuis 10 ans que je suis dans le même collège, j’ai régulièrement demandé des sixièmes tous les deux ans. Il y a encore dix ans, nous pouvions encore parler de la règle des trois tiers : un tiers d’excellents élèves parfaitement préparés, un tiers d’élèves moyens pouvant glisser selon la gestion de la classe dans le premier tiers ou le dernier tiers qui regroupaient les élèves «radiateurs» c’est à dire ceux qui décrochaient très vite, faute d’acquis nécessaires. Aujourd’hui, cette règle n’est plus. Elle est remplacée par celle des 10% : c’est le pourcentage d’élèves en capacité de suivre le programme proposé en collège. La moitié d’une classe est dès la sixième pratiquement perdue pour le lycée (déjà) et décroche progressivement. On comprend dès lors pourquoi on veut transformer le collège en abaissant considérablement les exigences (nous avons déjà de grandes pressions de notre hiérarchie pour «adapter» nos cours et notre notation au «nouveau public»). Le lycée est le continuateur naturel de ce gâchis immense ; le nouveau programme des mathématiques en seconde supprime géométrie, algèbre, déduction pour se consacrer à l’outil informatique uniquement.

4. Enfin, pour terminer, tout cadre structurant a disparu de notre univers. Le surveillant général est devenu conseiller d’éducation (un conseiller conseille «ce n’est pas mon rôle de punir», me disait un des CPE de mon collège devenu depuis principal de collège), les couloirs et la cour de récréation sont devenus des lieux de violence ordinaire (en nette hausse depuis trois ans) jamais sanctionnés, les parents et mêmes les élèves deviennent procéduriers (judiciarisation de la société oblige). Pas de structuration externe, et aucune interne non plus : les élèves qui vivent dans un présent éternel, cocon douillet d’où personne ne songe à les en sortir n’ont aucune notion de chronologie, de rigueur, et ont une paresse intellectuelle de plus en plus inquiétante (même chez les «bons» élèves).