Européennes, bis

Publié le 08 juin 2009 par Jfa

La nuit portant conseil, je reviens plus calmement sur ce résultat des Européennes dimanche.

Je pense qu’il provient d’une double dynamique: d’une part celle de la construction européenne et son appréciation populaire, de l’autre un défouloir face à la crise et à son affligeant Spectacle politique.

Revenons aux Européennes proprement dites.

L’Ump a récolté le résultat d’une bonne politique de communication destinée à faire croire que notre Président a boosté l’Europe, permettant que la partie traditionnellement anti-européenne de l’Ump qui lui avait fait défaut en 2004 se rassemble, en un vote sarkozyste plutôt qu’européen, vote lui permettant d’atteindre péniblement 10% du corps électoral. Loin d’une victoire, ce résultat est un cinglant échec.

Le PS paye le prix de ses ambiguïtés (le mot est faible), un coup pour une “Europe sociale” trop souvent verbale, l’autre avalisant les textes les plus libéraux présentés par la Commission, sans parler de sa position et de celle d’une bonne part de ses élus sur le traité constitutionnel en 2005, puis sur le Traité de Lisbonne.

Les Verts, qui finalement, dans un mouchoir, à 0,2 points du PS, bénéficient du “parler simple” de D. Cohn-Bendit et de cette idée qui s’enracine tous les jours davantage que la sortie de crise ne pourra s’effectuer que par une économie verte et durable. Ils récupèrent semble-t-il nombre de ségolénistes et de déçus du PS.

F. Bayrou aura montré avant tout que seul compte son appétit présidentiel et, cette fois, cela n’a pas fonctionné.

Ceci dit, la principale leçon est le fossé qui s’élargit encore entre les peuples et une construction européenne libérale sacrifiant des pans entiers de ses populations au bénéfice des financiers ainsi que le refus du cinéma de ce vote pour une assemblée sans grands pouvoirs réels. La somme des abstentions et des votes blancs ou nuls dépasse sensiblement les 60% ce qui relativise fortement ces résultats lorsqu’ils sont “bons”, les aggrave lorsqu’ils sont mauvais.

Concernant les socio-démocrates européens, hormis trois ou quatre exceptions (sur 27 pays), les alliances et coalitions droite-gauche, la politique de droite menée depuis longtemps par les travaillistes anglais, …, ont porté leurs fruits et mènent au déclin. La grande déclaration des 27 du PSE, dont chacun sait qu’elle n’est qu’affichage tant certains socio-démocrates européens sont allés loin dans les compromissions avec le libéralisme, y compris en appelant à la reconduction de  M. Barroso, n’a vraisemblablement pas contribué, à crédibiliser les positions du PS français, pas davantage que le Spectacle figé du meeting de Rézé.

Pour le reste, les 28% de voix Ump, majoritairement des plus de 65 ans, montrent que la base électorale de N. Sarkozy a fondu, que les droites sont minoritaires et que la somme des gauches est nettement majoritaire. La disparition de l’hégémonie du PS à gauche me semble personnellement une bonne nouvelle, ouvrant la voie à une renaissance qui sera néanmoins dure et difficile à organiser tant le poids des appareils est important.

Je ne suis pas optimiste concernant le PS, je vois déjà sur certains blogs les clivages de Reims réapparaître dans les explications de cette défaite, et il est à peu près certain que dans l’ombre les couteaux s’aiguisent entre les deux clans du Congrès de Reims (cf NouvelObs ) même si, provisoirement, les partisans de l’alliance avec le Modem se font discrets. J’avais déjà perçu le vide idéologique de ce parti qui a permis à N. Sarkozy de récupérer très facilement ceux qui avaient faim. Je crains l’autisme d’un appareil et les comportements de chefaillons des baronnets, qui ne considèrent plus ce parti que comme une machine pour leurs investitures.

En attendant, chez nous, l’objectif du PS est atteint: V. Peillon, le Fatal Picard, qui a fini à Nice 3ème derrière les Verts avec 12,66% des voix, et 4ème dans le département, derrière Verts et FN avec 10,73%,  qui connaît aussi bien la région PACA que je suis familier des Iles Aléoutiennes, est élu européen.

- Européennes sur les blogs liés: “Un scrutin et deux enterrements”, ARVH. “Une addition salée”, chez Xavier . “Mes premières impressions”, Fleur de blog. “Destruction massive”, chez Stéphane. “Europe, vous avez dit…” Ecritures du monde . “L’abstention a gagné..”, Fraise des bois. En Belgique…, Je suis belge mais … “impressions rapides”, La lettre volée. “Et on dira…”, Canard du coin. “Démocratie enfumée”, Le chasse-clou. “De ce scrutin las”, Seb Musset. “Etoiles vertes…”, chez Olivier.

- Suède. Le parti “Pirate” (contre les restrictions de l’usage d’Internet) devient la 3ème force électorale du pays et obtient un siège au Parlement Européen. AgoraVox.

- “Comment en serait-il autrement après le camouflet que l’on a infligé aux 55% d’électeurs qui ont voté non au référendum de 2005, résultat que toutes les forces politiques ou presque, ont tenté de faire oublier durant cette campagne ? Comment croire à un printemps européen malgré les imprécations quotidiennes d’un Bernard Guetta sur France Inter lorsque l’Europe vient de démontrer son incapacité à agir de façon réellement concertée contre la crise ? Comment pourrait-il en être autrement lorsque les dirigeants de l’Union font tout pour éviter la préférence communautaire et, plus globalement la protection des salariés au moment où le besoin s’en fait plus ressentir que jamais ?”. Marianne.

- Outre le taux d’abstention, ce scrutin aura comptabilisé 741 480 votes blancs ou nuls (4,34% des votants) ce qui nous mène à 63% d’abstentions, blancs et nuls…

- “Si Royal avait été à la tête du PS, je n’aurai pas voté Cohn-Bendit”. Le Post. “…comme beaucoup de socialistes de la mouvance royaliste, j’ai eu envie de sanctionner ce parti qui ne me ressemble plus. Si Ségolène Royal avait été première secrétaire du parti, je suis presque navrée de l’admettre, les choses auraient été différentes pour moi et je n’aurais pas hésité une seconde à soutenir les socialistes”.  Voir aussi là . Le problème est que si Mme Royal avait été à la tête du PS, les autres auraient voté Mélanchon… Est-il possible d’en sortir ?

- “Le déclin de la social-démocratie”. Slate. “Triste soirée pour la social-démocratie européenne”. Le Monde.

- “Ne disposant pas d’une majorité absolue malgré leur victoire électorale, les conservateurs du Parti populaire européen proposent une grande alliance aux libéraux et aux socialistes”. NouvelObs. Et ils sont capables d’accepter, au moins pour une partie d’entre eux… C’est dire comme leurs positions sont éloignées… Qui parlait d’enfumage ?