L’école du Klub des 7

Publié le 26 mai 2009 par Www.streetblogger.fr

Le Klub des 7, c'est une bande de copains un peu barrés : Fuzati (au rap et à la production), Detect le scratcheur, James Delleck, Cyanure, Gérard Baste (des Svinkels), Le Jouage et Fredy K, maintenant disparu il y a plus d'un an lors d'un accident de la route.  Mais même à 6, le Klub reste à 7 et les membres ont continué de se réunir secrètement pour préparer un second opus bien plus travaillé que le précédent, grâce à l'entente et la fraternité des membres qui se sont solidifiés durant les nombreuses dates à tourner ensemble. C'est fini les ratures et les brouillons, la Classe de Musique est une copie écrite au propre, un vrai travail de groupe. Mais avant de vous en faire un exposé, voici les réponses de Fuzati à mon interrogation écrite.

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OK vous lisez cet article et après vous retournez réviser le bac et vos partiels !

 
Quels souvenirs gardes-tu de l'école en général (primaire, collège, lycée...), bons comme mauvais ? Quel genre d'élève étais-tu? Plutôt maths ou littérature (ou ratures), garnement ou 'nerd' ?

J’étais dans la catégorie des élèves invisibles, ni tête de turc, ni populaire. Celui à qui on propose pas d’aller au centre commercial, celui qu’on n’invite pas à sa boum, celui qui n’a pas de vêtements de marque. Les marques c’étaient hyper important à l’époque (Creeks, Chevignon, les caleçons « coup de cœur », les chaussettes Burlington). Moi je m’habillais à la Redoute. J’en avais rien à foutre. Mais si t’avaient pas de marques tu pouvais pas traîner avec le groupe des winners, ceux qui fumaient des clopes, avaient des mobs, des petites copines…

En maths j’étais trop pourri, genre si j’avais 2 c’est qu’il y avait 2 points de prévus pour la présentation. Il y a même un prof qui m’a convoqué et qui m’a dit : « je sais que vous faîtes des efforts mais laissez tomber, concentrez vous sur les autres matières ».

En français, je me débrouillais pas trop mal. En fait je m’en foutais de l’école, ce que j’aimais c’est être enfermé dans ma chambre à écouter la radio.

T'es-tu inscris sur le site des 'copains d'avant'? À moins que tu préfères ta bande de copains de maintenant !

Au long des années j’ai toujours tout fait pour éviter mes anciens camarades quand je les croisais dans la rue. J’étais un pro du changement de trottoir, du regard vague, genre « je t’ai pas vu ». Je trouve ça hyper glauque les conversations artificielles du genre : « tiens jean-truc machin, on était pas en 4ème ensemble, alors qu’est ce que tu deviens ? ».

Donc je vais pas tout foutre en l’air maintenant en m’inscrivant sur des conneries du genre « copain d’avant ». De toute façon on n’était pas copain avant.

Dans le même style je déteste facebook aussi. Tu crois que ta vie est tellement intéressante que tu peux la mettre en vitrine ? Tu crois qu’on a tous envie de voir les photos de ton week-end à Montluçon ? Tu crois vraiment qu’on en a quelque chose à foutre de savoir qu’aujourd’hui tu n’est pas trop d’humeur à travailler…

Allez poker vos mères.

Tu es membre de deux Klub, celui des Loosers et celui des 7. Y a-t-il d'autres cercles dont tu fais partie? 

J’ai une carte de piscine, mais sinon je vois pas…

Il est survenu un événement tragique et vous avez perdu un de vos camarades il y a un peu plus d'un an. J'ai interviewé récemment Cyanure et il était très affecté par la perte de Fredy K. Vous lui avez d'ailleurs rendu hommage sur le titre « L'Appel » sans tomber dans le larmoyant. Comment toi personnellement as-vous, toi et les autres, trouvé la motivation pour poursuivre l'aventure à 6 ? J'imagine que son absence a dû se faire sentir, qu'est-ce qui a changé dans votre cohésion/organisation depuis ?

Fredy est décédé en plein enregistrement de l’album. 2 jours avant son décès on était tous ensemble dans son studio de Stalingrad à enregistrer des morceaux. Je crois d’ailleurs que le dernier couplet qu’il a posé c’était pour Le klub des 7. Fredy c’était un hyper actif, le mec il avait une boutique de sapes, un studio d’enregistrement, une carrière musicale de ouf à déjà 26 ans. Il s’arrêtait jamais de taffer…Finir l’album c’était la moindre des choses par rapport à lui. Il était important pour nous d’avoir l’accord de sa famille, mais je pense que personne dans le groupe ne s’est dit qu’on allait laissé tomber le klub des 7.

On a continué à faire l’album comme s’il était encore parmi nous, dans le même esprit. C’est pour ça que le morceau qui lui rend hommage n’est pas triste. On la posé sur l’instru qui devait servir pour son solo et qu’il kiffait grave.

Au niveau des textes il y a des vannes, vu que tous on arrêtait pas de se tailler. On a vraiment essayé de maintenir l’esprit Klub des 7, le côté joyeux, en ne laissant pas notre tristesse déborder dans l’artistique.

Même s’il n’est plus là physiquement on est toujours 7 dans ce putain de klub.

Votre 'Classe de Musique' est beaucoup mieux travaillé que votre premier album éponyme. Vous n'étiez pas satisfait des notes de votre premier essai ? Comment avez-vous corrigé vos erreurs, avez-vous ensemble revus votre méthode de travail ? 

Pour le premier album, j’avais réuni des rappeurs dont j’appréciais le travail pour poser sur mes prods. C’était donc plus un album de producteur en fait. Mon erreur a peut être été de le présenter comme le travail d’un collectif.

Suite à ce premier album (qui a été fait en 3 mois), on est parti en tournée et c’est là que le groupe est vraiment né. Certains ne se connaissaient pas du tout au moment de l’enregistrement du premier album. Cette tournée a été assez dingue, on a bien foutu le bordel partout où on est passé.

Après la tournée, on a donc eu envie de repartir sur un nouvel album qui serait véritablement un album de groupe.

Sur « la classe de musique » j’assure toujours toutes les prods, mais pratiquement tous les morceaux sont collectifs au niveau du rap. L’album a vraiment été pensé comme un album concept, certains morceaux se répondent, il y a pleins de petites histoires.

Le délire musical est hyper 60’s. En plus l’album a été pensé pour la scène, donc la plupart des morceaux sont bien dynamique.

C’est un peu un challenge pour moi. Ça me sort complètement de l’univers du klub des loosers. Et c’est pareil pour chacun des MC du klub des 7. Chaque mec peut se permettre des trucs qu’il ne ferait pas forcément dans son groupe. C’était assez casse gueule en fait de réunir des mecs avec des univers musicaux aussi différents et de leur demander de s’adapter à mes sons. Ça n’a pas été toujours facile à gérer mais au final je trouve que « la classe de musique » est hyper cohérent musicalement. J’espère que les gens le ressentiront.

C'est clair qu'on rentre complètement dans votre délire au point de retomber en enfance. Qu'est-ce que ça t'a fait d'avoir rajeunit de 15-20 ans ?

Le Fuzati que j’incarne dans le Klub des 7 n’est pas le Fuzati du Klub des Loosers en version enfant. Là il est au sein d’une bande de potes, à faire des conneries. Il y a donc un travail d’écriture différent. Je ne vais donc pas forcément puiser à 100% dans mes souvenirs. J’incarne un sale garnement que je n’étais pas forcément.

Après, sur cet album, l’enfance est un prétexte pour aborder pleins de sujets un peu graves. Prends le morceau où je rappe avec Gérard Baste : « quand je serai grand », ou même « la Boule de Crystal ». On parle de l’avenir, des vies d’adultes pourries qu’on va avoir. C’est un album faussement joyeux en fait.

Toujours pas prêt à faire tomber le masque comme MF Doom? 

Quel masque? Tu m’as déjà entendu parler de masque ? Fuzati est un homme banal, sans visage en particulier. C’est monsieur tout le monde qui n’aime personne.

Quand à MF doom je suis super content d’avoir fait ce morceau avec lui. C’était juste avant madvilain, il était encore pas très connu par rapport à maintenant. Là j’imagine même pas le prix qu’il doit demander pour un couplet.

Va-t-on voir un jour une suite à Vive La Vie ?

En février 2010 les journalistes vont pouvoir me dire « tiens un rappeur looser, vous n’auriez pas tout copié sur Orelsan ?».

Et pour finir, quel message souhaiterai-tu transmettre aux lycéens et étudiants, à la jeunesse en général ?


La bonne nouvelle c’est que l’acné finit par partir. La mauvaise c’est que pour le reste il va falloir faire avec.

Après avoir écouté l'album, j'ai aussitôt envoyé un mail à Cyanure pour transmettre les félicitations du jury. Ces grands gamins ont réussi à me rendre nostalgique et me faire retomber en enfance : ambiance récré, commerce de billes, les gonzesses c'est des pisseuses, la serrure des toilettes des filles, le cliché de la prof à lunettes dominatrice, la découverte du kiki et les nénés qui poussent, les contrefaçons de signature des parents, le rap qui passe à la radio... Je divague mais le délire du Klub nous évoque notre jeunesse, c'est notre génération. Le taf de Fuzati à la prod est remarquable, servant des instrus à base de samples kitsch, sixties pour reprendre ses termes, et musiques de films. Que du bonheur. On profite des couplets posthumes de Fredy K, des lapsus involontairement vulgaires de Cyanure au "Conseil de Discipline", de l'humour décalé de Gerard Baste, du flow nonchalant du Jouage, les poésies salaces de James Delleck et les scratches de Detect qui nous fait une super démo sur "On aura tout vu"... personne ne manque à "L'Appel" car comme le dit Fuzati, c'est comme si Fredy était toujours parmi eux. Le Klub des 7 est plus uni que jamais, même que maintenant on sait comment il se sont rassemblés, il suffit d'écouter le "Chiffre Impair". On a droit également au jeu des "7 Différences" et celui qui va faire mal à la sortie de l'école, le "Pouilleux massacreur"! Pas de quoi se faire tirer les oreilles par les profs pour toutes ces fourberies, propos insolents et attitudes polissonnes, la Classe de Musique s'en tire avec une note de 17/20.

Un bon point pour ceux qui ont lu jusqu'au bout :