La grande théorie de la visualisation

Par Aureliepaslignac

Oui alors bon, je ne vais pas vous coller une dépression par écrans interposés mais en ce moment, y a pas grand chose qui coule comme l'eau du ruisseau paisible chez les PasLignac. Et Paulo et moi, on veut bien avoir de la patience, se dire que tout ce qu'on souhaite va finir par arriver, mais on n'est pas l'abbé Pierre ! A un moment donné, on tape du pied et on boude. Oui on boude parce que les autres à côté, on voit bien qu'ils ont un plateau rempli de leurs désirs qui leur est servi au lit tous les matins tandis que nous, on doit se lever pour moudre nos grains de café avec les pieds.

C'est là qu'intervient là sus-nommée, la grande et merveilleuse, j'ai nommé la théorie de la visualisation. Oh ce n'est pas de moi, c'est une de mes bonnes amies qui la pratique et qui m'a dit, formelle et tout et tout "ça marche, crois-moi" (sic). Alors en quoi ça consiste mesdames et messieurs suspendus à mes lèvres ou plutôt à mes index (non, je ne suis toujours pas sténo) ? La grande et merveilleuse théorie de la visualisation est très simple, peut se pratiquer n'importe où - dans un jardin public ou dans les toilettes du bureau - et ne coûte rien si ce n'est une implication et une conviction sans faille.

Prenons un exemple concret, mettons-nous en situation : vous cherchez un appartement depuis maintenant... beaucoup trop de temps et toujours rien. Vous soufflez, vous pestez, vous vous roulez par terre en hurlant de désespoir. Stop ! Pensez visualisation, le nouveau geste bonheur ! L'appartement en question, imaginez-le. Faites un plan de cette merveille architecturale parfaitement adaptée à vos attentes et besoins, découpez des magazines de déco pour mettre au point un portrait robot de ce bonheur à 4 murs et collez ça sur votre frigo. Et surtout, tous les jours, à chaque instant, pensez que d'ici peu il sera à vous.

Elle m'a assuré ma copine que, dès lors qu'on y croit très fort au fin fond de soi sans jamais douter, la théorie affiche un taux de réussite de 99%.

Alors j'ai voulu essayer, pensez donc ! J'avais la foi, je n'avais plus qu'à choisir l'objet de mon désir. Car il faut le savoir, on ne peut visualiser qu'une chose à la fois. Bah oui, sinon, c'est le foutoir dans vos cellules et le message est complètement brouillé, comment voulez-vous qu'ils y comprennent quelque chose là-haut, les gens qui vous envoient votre commande ?
Donc, j'ai hésité et puis, au risque de passer pour une personne vénale, j'ai commencé à imaginer un compte en banque avec plein de zéro derrière. Même pas honte. Pour le portrait-robot, je me suis munie d'un billet de 20 (j'avais que ça dans le portefeuille) et je suis allée le photocopier en milliers d'exemplaires (en dizaines d'exemplaires en fait, parce que j'avais pas assez de monnaie). J'ai posé des liasses un peu partout dans la maison tant et si bien que Paulo a presque cru qu'on avait enfin gratté le BlackJack de la fortune ! (encore eut-il fallu pour qu'il y croit vraiment que je n'eus pas fait ma radine et que j'eus choisi le photocopieur couleur).

Le hic avec cette théorie, c'est qu'on ne sait pas combien de temps on doit attendre. Une semaine, ça va, mais là, pfff, ça fait longuet. La foi s'étiole. Non puis c'est dangereux tout de même parce que j'ai malencontreusement failli tuer mon pauvre et docile aspirateur en passant trop près d'une des liasses. Il a longtemps suffoqué, j'ai cru l'avoir perdu... et vraiment là, c'est pas le moment qu'il me lâche (même si j'ai vu en promo vente flash l'autre jour un superbe aspi rose bonbon que j'aurais bien vu chez moi... non non ce ne serait pas raisonnable).

Du coup, au bout de 3 semaines, j'ai préféré jeter les liasses (à l'abri des regards inquisiteurs de ma concierge, histoire d'éviter qu'elle ne me dénonce pour trafic de faux billets mal faits) et j'ai visualisé quelque chose de plus simple. Et là je m'adresse aux parisiens qui seuls pourront me comprendre vu la date à laquelle je poste ce billet : j'ai visualisé le soleil. Oui l'astre du jour, la grosse boule jaune qui réchauffe les épaules et le moral et qui permet en général de voir la vie en rose (comme l'aspi de mes rêves) même sans un sou sur le compte.

Pour une visualisation des plus efficaces, j'ai été obligée d'aller le (re)voir. Qui ça me demanderez-vous ? Mais celui en qui le soleil a élu domicile, celui en qui le soleil a daigné prendre forme humaine. Lui. Et ouf ! Il était là !Italien jusqu'au bout des "rrrrr", le cheveu sombre et ondulé, le regard noir et profond, la peau mate et le torse velu... il était comme la première fois où je l'ai vu et où j'ai acheté tout son étal de mozzarella pour le voir sourire encore et me prononcer sans fin "oune boccon" la bouche en coeur.

Bref, vous comprendrez que pour visualiser l'été, je ne pouvais trouver mieux qu'Angelo (ce n'est sans doute pas son prénom mais c'est mon fantasme, je l'appelle comme je veux, non mais !) de la Coopérative Latte Cisternino, 17 Rue Geoffroy-Saint-Hilaire dans le 5ème* (une adresse dénichée par Ester ; Ester tu ne me vois pas mais je suis en train de faire une ola en ton honneur).

Et voilà comment, en voulant ramener chez moi des petites boules de soleil, j'ai aperçu en sortant de la boutique - croyez moi croyez moi pas - les rayons tant espérés poindre là-bas au loin.

Les millefeuilles de la visualisation artichaut et bufala, pour que l'été se pointe enfin**
Pour 4 personnes
4 artichauts violets
200 g de mozzarella di bufala Campana
1 citron
50 g de parmesan
huile d’olive
sel, poivre
Retirer les premières feuilles des artichauts. Couper la tige (en laisser environ 2 cm) et les feuilles aux 2/3 environ. Citronner.
Couper les artichauts ainsi parés en 2 et retirer le foin à l’aide d’une petite cuillère. Citronner à nouveau. Emincer les moitiés d’artichauts le plus finement possible, façon carpaccio. Citronner encore.
Détailler la mozzarella en fines tranches.
A l’aide d’un cercle, dresser les millefeuilles sur assiette : lamelles d’artichaut, copeaux de parmesan, mozzarella, à nouveau lamelles d’artichaut, copeaux de parmesan et mozzarella, jusqu’à épuisement des ingrédients. Saler et poivrer entre les couches. Arroser d’un bon filet d’huile d’olive et servir sans attendre.
Vous pouvez parer les artichauts à l’avance et les conserver dans un saladier d’eau citronnée. Vous n’aurez plus qu’à les émincer au moment de servir.
Vous pouvez ajouter un filet de vinaigre balsamique et quelques pignons grillés sur les millefeuilles si le cœur vous en dit.

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Le soleil est de retour, ouiiiiiiiiii ça a fonctionné ! Non, non, ne me remerciez pas amis parisiens, ça me fait plaisir (enfin bon, si vous y tenez, je veux bien que vous visualisiez ma fortune, ce serait un juste retour des choses)

* Trois autres adresses à Paris : 37 rue Godot de Mauroy dans le 9ème, 108 rue St Maur dans le 11ème, 46 rue du Faubourg Poissonnière dans le 10ème... oui mais un seul Angelo !

** Recette extraite du dossier Viva la mozzarella sur Marmiton