Actualité du poète

Par Chroniqueur
Vendredi matin Jacques Chessex était à la table d'une émission radiophonique, "Le Grand 8", dans laquelle des invités commentent l'actualité.
Sa présence a instantanément donné du champ en profondeur à la discussion, de la hauteur, une perspective. Et quelle maîtrise de la langue! Un écrivain - véritable - modifie immédiatement la qualité des échanges, les affine, les sublime. On ne bavarde plus. On pense, on sent:  on re-vit.
Le principe de l'émission aurait peut-être voulu qu'il soit plus question du succès marketing de son dernier livre. Mais Monsieur Chessex a aussitôt désamorcé ce point en indiquant qu'il n'était pas très au fait des chiffres et que ce qui comptait pour lui, ce sont ses lecteurs. Ce n'était pas une coquetterie d'écrivain, non, pas chez un homme qui a su assumer pleinement sa solitude tout en restant si fécond durant plusieurs décennies. C'est par son inactualité que le poète touche à nos préoccupations les plus immédiates. 
Même si je trouve par moment qu'il parle de lui comme s'il lisait une critique littéraire de son oeuvre, l'intervention de Monsieur Chessex  était bénéfique, enrichissante. Sa parole nous rappelait à l'intime, au coeur de l'être, ouvrait une perspective humaine dans la crise des compteurs. Nous n'étions plus des rats coincés dans l'angle de la seule économie!
Je remercie Monsieur Derder de l'avoir invité. Durant une demi-heure nous n'étions plus seulement informés, mais nourris. 
Et je me suis demandé par quelle chimie mystérieuse la parole de certains rayonne au milieu des ratiocinations de tant d'autres.