Histoire d’une pub à 3000 milliards de dollars

Publié le 29 juillet 2009 par Dangelsteph

Comment raconter son histoire, sans pour autant tomber dans le ton plaintif, lorsqu’on est une entreprise qui a été poussée à l’exil par le gouvernement de son pays d’origine ?

Un quotidien zimbabwéen (The Zimbabwean) qui s’est réfugié en Afrique du Sud du fait de son opposition au régime du président Mugabe a trouvé une solution.

Il s’est servi de l’inflation incroyable qui sévit au Zimbabwe, à tel point que la monnaie locale n’a même plus cours dans le pays (pour donner une idée, au tout début de l’année, des billets de 100 milliards avaient été mis en circulation –l’équivalent de 11 euros).

L’agence de publicité du journal a choisi de mettre en scène de vrais billets zimbabwéens alignés les uns à côté des autres, pour réaliser notamment des affiches, avec un message des plus clairs : « grâce à Mugabe, cette monnaie est du papier peint ».


Ce sont au total plus de 3000 milliards de vrais dollars zimbabwéens qui ont été utilisés pour cette campagne de pub hors norme. Et le résultat a été au rendez-vous : le message de The Zimbabwean est passé via une centaine d’articles obtenus dans des publications du monde entier, et des milliers d’articles sur Internet (un de plus avec le mien –allez, que je valorise à 10 000 dollars zimbabwéens, pour être modeste).


Un enseignement de storytelling :

Ce n’est pas toujours forcément en racontant sa propre histoire personnelle, que l’on arrive à faire passer ses messages. Raconter une autre histoire est parfois bien plus efficace. Comment choisir cette histoire ? Il aurait pu s’agir d’une métaphore, mais dans le contexte présent, l’environnement proche fourmillait d’histoires très expressives prêtes à l’emploi. L’histoire choisie n’était pas de nature à faire pleurer dans les chaumières, une émotion qui n’aurait pas forcément eu de résonance, alors que les misères du Zimbabwe ont déjà été décrites un peu partout, mais à faire « sentir » et ressentir ce qu’est le Zimbabwe aujourd’hui. Une surprise indignée est peut-être l’émotion la plus prégnante et aussi la plus efficace. L’enjeu : que la situation du Zimbabwe, dont les médias ne parlent plus guerre, ne soit pas oubliée.