Cunégonde contre la grippe A : 1

Publié le 03 août 2009 par Porky

 

Tragi-comédie en un acte

Distribution :

Mesdames :

Cunégonde : Ex présidente disparue des médias mais encore bien présente sur certains blogs dont celui-ci.

Scarlatina O'Blondi : Présidente en titre. Chante et fait de l'humanitaire. Accessoirement, apparaît dans quelques cérémonies officielles.

Rosie la Terreur : Ministre, ex exilée en Antarctique, rentrée en grâce auprès du Président, s'occupe comme elle peut avant la Grande Pandémie.

Leïla : Suivante de Cunégonde, exilée de la Cour mais revenue par la petite porte.

La Madone des Déshérités : A part s'habiller en blanc, ne sait rien faire d'autre -du moins de constructif.

La Langoureuse Arielle : Toujours là où il y a des coups fumants à faire. On ne sait toujours pas à quoi elle sert.

Messieurs :

Le Président, il préside, même s'il reste invisible à cause de sa santé fragile et des menaces de malaise qui pèsent sur lui.

Fifi : Aux dernières nouvelles, toujours Prime Minister. Il est gentil.

Lanlan : Le souffre-douleur de la Madone et de temps en temps, son bras droit.

Daktari : Super héros en cape qui change d'opinion selon la direction du vent.

La scène est dans un lieu quelconque, et même très quelconque : un couloir du Palais Présidentiel, plein de courants d'air. L'époque : celle que le lecteur voudra.

Il est évident que toute ressemblance avec des personnes existantes est carrément fortuite.

 Scène 1

Le fameux couloir du Palais Présidentiel. Courants d'air. Sièges par ci par là. Portes de ci de là. En scène, Fifi et Rosie la Terreur, cahin caha.

 FIFI

Dis-moi donc, ô Rosie, combien de temps encor

Allons-nous poireauter dans ce vieux corridor ?

ROSIE (primesautière)

Je ne sais, mon Fifi, ministre très intègre,

Gloire de la Patrie, cauchemar de la pègre.

FIFI

Cesse donc, je te prie, de te moquer de moi.

Pourquoi tant de gaieté ?

ROSIE

                                      C'est qu'enfin je revois

Après ce grand exil ce merveilleux palais.

Dans mon igloo, là-bas, nuit et jour j'en rêvais. (1)

FIFI

Ton retour coïncide avec l'épidémie.

De ces deux grands fléaux, toi ou la pandémie,

Lequel doit-on donc fuir ? Lequel est à bannir ?

 

ROSIE

Tes propos injurieux ne sauraient pas ternir

Cette indicible joie qui gonfle ma poitrine

Et ce bonheur exquis que jaloux tu piétines !

Envie-moi, je le veux, je l'espère et l'attend.

Car de te repentir, crois-moi, il est grand temps !

FIFI

Me repentir ? De quoi ? De t'avoir oubliée ?

D'avoir, dans l'euphorie de la paix retrouvée,

Suivi Scarlatina et notre Cunégonde

En te laissant là-bas ? Tu étais plus que ronde !

Tu voulais à tout prix rester sur la banquise

Et aider la Grande Ourse à punir l'insoumise ! (1)

ROSIE

Je sais ce que je dis. Je connais tes péchés.

FIFI

Je crois, ma bonne amie, que tu as trop fumé

Ou que sur ta caboche un pavé est tombé.

Tu dis n'importe quoi. C'est un fait avéré.

ROSIE

Laissons cette querelle et parlons haut et fort :

La grippe est arrivée.

FIFI

                                 Justement. Pas encor.

On nous a convoqués pour prendre des mesures.

ROSIE (Désorientée)

Mais tu disais tantôt...

FIFI

                                   Qu'elle était dans nos murs ?

Je plaisantais, ma foi. Mais le temps, il est vrai,

Nous est plus que compté.

ROSIE

                                           Ah vraiment, tu m'effraies !

Qu'attendons-nous céans ? Allons vite en courant

Porter notre secours à notre Président.

Dans son joli bureau, il doit s'impatienter

De nous voir tous ici venir s'agglutiner.       

 

FIFI

De poireauter longtemps, c'est hélas mon destin.

Car je suis arrivé ici de bon matin,

Je me suis annoncé, et l'on m'a répondu

Qu'il fallait patienter, un malaise impromptu

Surgi d'on ne sait où, avait, sanglant affront,

Fait courber cette tête et ce si noble front.

ROSIE

Ciel ! Un malaise ! Ah ! Et la température ?

A-t-on donc de la fièvre ? A-t-on des courbatures ?

L'ennemie implacable a-t-elle donc frappé ?

J'ose à peine le dire : est-on contaminé ?

FIFI

On ne sait rien encor ; et le doute est affreux.

Sera-t-il le premier à devenir glaireux ?

(Quelques accords de guitare s'élèvent de derrière une porte à droite. Puis, un long gémissement à fendre l'âme.)

Ecoute ces accents qui traversent la porte :

Ils me font frissonner.

ROSIE

                                 Que le diable l'emporte !

On avait bien besoin de ce soudain malaise !

La situation déjà était une fournaise

Et il vient ajouter à nos tourments d'élus

Une grippe stupide et vraiment malvenue !

FIFI

Modère tes propos. Même s'ils sont exacts,

Il est d'usage ici de conserver son tact.

(La porte s'ouvre. Paraît Scarlatina, sa guitare en bandoulière. Elle a l'air dubitatif.)

(A suivre)

(1) Voir Cunégonde en Antarctique