La lotte cochonne, le piment ibérique, les chanterelles et tout le tralala

Par Estebe

Bien le bonjour, cuistots branchés

Il fut un temps où marier charcutaille et poiscaille relevait d’une audace culinaire inouïe. Voire inuit. Seuls quelques aventuriers intrépides et musculeux se risquaient alors à coiffer leurs encornets de miettes de jambon rôti (autopromo). A accoupler sans vergogne crevettes et merguez (re-autopromo). Ou à jucher leurs noix de St Jacques sur un pouf de lard grillé (re-re-autopromo).
Or, les choses ont bien changé. Oui, Madame. Désormais, le tandem terre-mer est devenu une évidence. Pour ne pas dire une giga banalité de la mort.
Tenez, notre pavé de lotte farci au korizo grillé, par exemple. Ben l’autre jour, suintant de fierté, on décrit la recette en détail à la copine Cricri. Elle écoute, poliment. Puis balance: «Poisson-cochon., c’est vraiment le truc à la mode. En vacances, j’ai vu ça sur toutes les cartes de resto
Et paf dans l’ego. Quand t’imagines avoir écrit un chapitre décisif de la gastronomie contemporaine, c’est toujours douloureux d’apprendre que t’as simplement jeté une crotte de nez dans la marre saumâtre de la branchitude.
Bref, voilà quand même le machin, très modestement intitulé châteaubriant de baudroie à la cochonne et son cortège estival autant que tricolore.
Dedans votre cabas tigré, il vous faut: des petites chanterelles (ou girolles en VF) - viiiite, la saison s’achève -, des fèves dans leur gousse – viiiiite, la saison s’achève –, des tomates cerise, un chouette morceau de lotte taillé en tronçons épais, du piment fumé autant qu’ibérique en poudre, quelques tranches de chorizo et L’Arrière-train sifflera trois fois en DVD (facultatif).


Vous remarquerez qu’on a sciemment omis, comme d’ordinaire, d’indiquer les proportions, celles-ci variant considérablement selon le nombre des convives. Sachez, par exemple, que si vous êtes quatre à table, il s’agit de prévoir des quantités deux fois plus importantes que pour un tête à tête. L’inverse se vérifie également.

Pour la baudroie cochonne.
Poêlez les tranches de chorizo sans matière grasse. Quand elles croustillent, essorez sur du papier ménage.
Avec un couteau atchement pointu et affûté, incisez chaque pavé de lotte. Puis glissez le chorizo dans la scarification. Pas facile. Notez que votre couteau peut ici aimablement servir de cheval de Troie.
Salez le poisson, poivrez aussi et pimentez avec le divin pimentòn de la Vega, douce et odoriférante poudre castillane. A défaut, paprikez pépère.
Juste avant le miam, poêlez presto les pavés dans un peu d’huile d’olive. Genre deux minutes de chaque côté. Mais tout dépend de l’épaisseur de l’animal, of course. Coiffez enfin de chorizo taillé en bâtonnets et de quelques brins de thym.

Pour la garniture tricolore
. Ecossez les fèves. Pochez deux minutes dans une eau salée fémissante. Refroidissez illico. Puis dérobez. Réservez.
Nettoyez les champignons, à la brosse à dent si possible, sous l’eau claire autrement.
Taillez les tomates en deux.
Emincez une échalote.
Juste avant le miam. Faites fondre l’échalote dans une bonne noisette de beurre. Ajoutez tomates et girolles. Sel, poivre, une pincée de gingembre en poudre. Faites cuire cinq minutes à feu mezzo. Intégrez enfin les fèves, touillez 27 secondes. Puis dressez artistiquement les assiettes.
Avant de servir en tortillant du joufflu.

Ouvrons une page santé pour finir. Tous les diététiciens et les diététiciennes vous le diront, il faut absolument boire du vin à table; c’est bon pour le tissu conjonctif, l’articulation rachidienne et le transit artériel. Ici, une grenache gouailleuse, naturelle et parfumée devrait faire l’affaire. Farfouillez donc dans le chai du Domaine de l’Anglore, Tavel, Vallée du Rhône du Sud, France d’en bas à droite sur la carte. Il est possible que vous y trouviez le jus de la situation.

Veuillez agréer... blabla