L'Amant - Marguerite Duras

Par Karineetseslivres


L'Amant - Marguerite Duras
Les éditions de minuit - 144 pages.
Dans L'Amant, Marguerite Duras reprend sur le ton de la confidence les images et les thèmes qui hantent toute son oeuvre. Ses lecteurs vont pouvoir ensuite descendre ce grand fleuve aux lenteurs asiatiques et suivre la romancière dans tous les méandres du delta, dans la moiteur des rizières, dans les secrets ombreux où elle a développé l'incantation répétitive et obsédante de ses livres, de ses films, de son théâtre. Au sens propre, Duras est ici remontée à ses sources, à sa "scène fondamentale" : ce moment où, vers 1930, sur un bac traversant un bras du Mékong, un Chinois richissime s'approche d'une petite Blanche de quinze ans qu'il va aimer.
Il faut lire les plus beaux morceaux de L'Amant à haute voix. On percevra mieux ainsi le rythme, la scansion, la respiration intime de la prose, qui sont les subtils secrets de l'écrivain. Dès les premières lignes du récit éclatent l'art et le savoir-faire de Duras, ses libertés, ses défis, les conquêtes de trente années pour parvenir à écrire cette langue allégée, neutre, rapide et lancinante à la fois, capable de saisir toutes les nuances, d'aller à la vitesse exacte de la pensée et des images. un extrême réalisme (on voit le fleuve ; on entend les cris de Cholon derrière les persiennes dans la garçonnière du Chinois), et en même temps une sorte de rêve éveillé, de vie rêver, un cauchemar de vie : cette prose à nulle autre pareille est d'une formidable efficacité. A la fois la modernité, la vraie, et des singularités qui sont hors du temps, des styles, de la mode.
François Nourissier.
Dans L'Amant, Marguerite Duras évoque son enfance auprès d'une mère habitée de folie, d'un frère ainé tyranique, de son riche amant chinois, la mort de son petit frère...
Ce roman peut surprendre par son style très particulier, dépouillé et à la trame décousue. Marguerite Duras a une manière originale de conter, de confier, avec émotion, poésie et sensualité.
Elle se livre sans pudeur, sans concession. 
"Je l'aimais, semblait-il, pour toujours et rien de nouveau ne pouvait arriver à cet amour. J'avais oublié la mort." (page 130).
"Et la jeune fille s'était dressée comme pour aller à son tour se tuer, se jeter à son tour dans la mer et après elle avait pleuré parce qu'elle avait pensé à cet homme de Cholen et elle n'avait pas été sûre tout à coup de ne pas l'avoir aimé d'un amour qu'elle n'avait pas vu parce qu'il s'était perdu dans l'histoire comme l'eau dans le sable et qu'elle le retrouvait seulement maintenant à cet instant de la musique jetée à travers la mer." (page 138).
Un récit fort, émouvant, dérangeant, dans lequel la douleur est palpable et la vie parfois cruelle.
Les avis de Lune de Pluie, Laurence, Ys, Virginie, Yohan, Emmyne, Argantel, Blue Grey (qui l'a proposé dans le cadre de la Chaîne des Livres).