Le Petit Prince du XXIe siècle ?

Par Thibault Malfoy

Ce n'est pourtant pas un conte, juste le premier roman de Richard Andrieux, José (aux éditions Héloïse d'Ormesson). En très peu de mots, sur une courte distance, Richard Andrieux a su restituer avec une sincérité frappante le monde imaginaire d'un garçon de neuf ans, qui reconstruit la réalité avec ses propres mots et réinvente ceux du dictionnaire. Ainsi, son lit s'appelle « Voyage », le bougeoir « Colonel », le plafond « Nuage ». Ce virtuose du détournement sémantique n'a pas d'amis, ne parle presque plus à sa mère (il n'a jamais connu son père) : il vit dans son monde et voyage dans sa tête. Et il est heureux comme ça.

Ce sont ses proches qui souffrent de cette situation, et la tristesse qu'exsude ce roman est d'autant plus poignante qu'on la vit indirectement à travers l'indifférence de José pour le monde extérieur. Sa solitude condamne ainsi sa mère à tromper la sienne dans l'alcool. Une écriture neutre, qui a aucun moment ne se permet de juger l'attitude proche de l'autisme de José, confronte le lecteur, par une comparaison implicite, à ses propres souvenirs d'enfance.

Et c'est dans ce face-à-face intime que le livre communique sa fragilité et émeut et marque.