Monuments d’Ashgabat

Publié le 28 août 2009 par Julieng

La ville d’Ashgabat – la capitale du Turkménistan – est pleine de monuments dus à la mégalomanie d’un seul homme : l’ex-président à vie Saparmurat Niyazov. Prenez par exemple l’Arche de Neutralité et ses 75 mètres de hauteur, subtilement surmontée d’une statue plaquée or de 12 m à son effigie. Une statue normale n’était pas suffisante pour ce personnage, alors il l’a conçue rotative pour qu’elle soit toujours orientée face au soleil1.

Cette Arche signale que cette ex-république soviétique s’est déclarée perpétuellement neutre après la chute de l’URSS. Même si cette initiative de communication extérieure était positive, dans le même temps le pays souffrait d’une grande pauvreté et d’abus des droits de l’homme pendant que son dictateur dépensait l’argent national en monuments à sa gloire.

Au sud de l’Arche de Neutralité se trouve le Palais Présidentiel, un autre palais pour sa famille et le Parc des Dix Ans de l’Indépendance, l’une des dépenses vertes dans une cité plutôt aride2. Le parc comporte une grande fontaine où figurent 10 chevaux et une autre statue en or de Niyazov.

L’une des plus incroyables “œuvres” de Niyazov est son livre Ruhnama, ou Livre de l’Âme, célébré dans le sud de la ville par un monument et quelques fontaines. La grande réplique du livre s’ouvre et se ferme lors des grandes occasions (quand le moteur n’est pas hors service) pour révéler des écrans vidéos diffusant des scènes de sa vie. Le monument est le petit cercle à gauche de la grande zone blanche.

Parmi d’autres bienfaits, Niyazov prétendait que le Ruhnama pouvait garantir l’accès au paradis à tous ceux qui le liraient 3 fois, et guérir les malades (après qu’il ait fermé les hôpitaux en dehors de la capitale). Il fallait bien le connaitre pour obtenir un poste de fonctionnaire, et même pour passer le permis de conduire. Le texte est disponible en ligne en 22 langues si vous souhaitez atteindre l’illumination ou améliorer votre conduite.

Dans le même parc que le Monument du Ruhnama, on trouve le Monument de l’Indépendance, un Musée des Valeurs Turkmènes, un bon nombre d’étangs et de fontaines, des hommages aux héros turkmènes et même un centre commercial (qui ne semble pas vraiment à sa place) dans un monument à 5 pieds garnis de cascades et d’aigles à 5 têtes.

Au sud-ouest de la ville, on tombe sur le modestement-nommé Grand Parc Éternel de Turkmenbashi3, point de départ du circuit de santé de Niyazov – un trek de 8 km que les ministres étaient contraints de parcourir régulièrement, tandis que le Président lui-même le faisait en hélicoptère – arrivant à temps pour accueillir les premiers et se moquer des moins rapides.

Le monument à sa base est entièrement constitué de marbre blanc4 et produit un reflet qui a bien gêné la prise de vue satellite. Près de la fin du parcours, on peut voir de grandes inscriptions sur le flanc de la colline, certainement pour encourager les participants à arriver au sommet. Il y a aussi un chemin plus long pour les volontaires.

Pour finir, à l’ouest de la ville, Niyazov a fait construire la plus grande mosquée d’Asie Centrale, en partie en mémoire du village où sa mère périt dans le tremblement de terre de 1948 qui dévasta la région. Le bâtiment spectaculaire comporte des citations du Coran et du Ruhnama.

Niyazov est mort brusquement en 2006. Depuis, les habitants du Turkménistan apprécient une plus grande liberté, mais les résidents d’Ashgabat passent certainement leurs jours à se demander quelle folie leur a valu ces ornements.

Merci à Birdseed, Catherine et Hamish.


  1. Un reportage de la BBC de l’année dernière signale que la statue devait être déplacée, mais nous n’avons pas pu déterminer si ce déménagement a eu lieu, ni vers quel endroit. ↩

  2. Jetez un œil à cet îlot de trafic près de l’aéroport! ↩

  3. Turkmenbashi était le surnom de Niyazov, signifiant “Le leader des Turkmènes”. ↩

  4. Il comporte aussi une statue de Niyazov en marbre blanc. Il devait être à court d’or? ↩