Auto-entrepreneurs : Un succès ... pas vraiment impressionnant !

Publié le 11 septembre 2009 par Slovar
C'est le journal les Echos qui donne l'information : "Mis en place au début de l'année, le régime de l'auto-entrepreneur séduit les Français. Mais les premières déclarations de chiffre d'affaires font état d'une faible proportion d'auto-entrepreneurs ayant déclaré une activité réelle pour le deuxième trimestre "
Alors fin d'un mythe ou révélation d'un bluff ?
Souvenez-vous, c'était en en juillet 2009, c'est à dire hier. Christine Lagarde et Hervé Novelli étaient tout sourire :
" Selon les statistiques publiées par l'Insee, le nombre mensuel de créations d'entreprise a atteint en juin un record historique pour franchir le seuil symbolique des 50.000 et s'établir à 51.247. Pour Christine Lagarde, ministre de l'Économie, et Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du Commerce et des PME, ce succès reflète la vigueur du dispositif de l'auto-entrepreneur mis en place en janvier.
Ils font en effet remarquer dans un communiqué que "271.896 entreprises ont déjà été créées sur les six premiers mois de l'année 2009, soit 60 % de plus que sur la même période en 2008 et malgré un contexte économique beaucoup plus dégradé". Au 15 juillet, le nombre d'auto-entrepreneurs s'établissait à 182.000, dont 165.000 nouveaux créateurs d'entreprise et 17.000 micro-entrepreneurs qui ont opté pour l'auto-entreprise ... /... "
Au gouvernement, on exultait et on parlait d'un "succès impressionnant"
"Le dispositif de l'auto-entrepreneur est un succès impressionnant, bien au-delà de ce que nous avions escompté", se réjouissait Hervé Novelli.
" ... / ... Les secteurs comptant le plus grand nombre d'inscrits sont la construction (12%), les activités commerciales de détail (19%) et les "autres activités commerciales et de service" (21%) ; mais il faut aussi noter la présence des secteurs de l'enseignement (5%), des activités informatiques (6%), du secteur "design, photographie, traduction..." (6%), des arts et spectacles (5%) ... / ... " - Source La Tribune
Du côté de l'opposition et des organisations patronales de l'artisanat, on agitait la concurrence déloyale entre les artisans et ces nouveaux entrepreneurs
" ... / ... « Les auto-entrepreneurs étant par ailleurs salariés ou retraités, ils ne prendront qu’un faible risque et l’on verra ainsi apparaître des marchés sans référence de prix. » ... / ... « Comment un client pourra-t-il vérifier que celui à qui il va confier une prestation sera capable de la mener à terme ? Sans registre, comment pourra-t-il vérifier sa qualification ? » Des questions qui restent pour le moment sans réponse" - Source Création d'entreprise
Au point qu'Hervé Novelli a du faire marche arrière lors de la Journée des présidents des Unions professionnelles artisanales (UPA) à fin juin :
" .../ ... Tout d'abord, la qualification professionnelle va évoluer, car source d'«incohérence». «Il n'est à aucun moment demandé au créateur d'entreprise d'attester qu'il possède (les) qualifications professionnelles (exigibles) avant de démarrer», a expliqué Hervé Novelli. Ainsi, il souhaite désormais «qu'avant toute création d'entreprise dans le domaine artisanal soumise à qualification professionnelle, le créateur atteste de sa qualification», comme l'obtention d'un diplôme, trois ans d'expérience professionnelle ou encore une validation des acquis d'expérience. Cette mesure s'appliquera selon le secrétaire d'Etat «à tous, auto-entrepreneurs comme artisans de droit commun "
De plus, Hervé Novelli souhaite que «les auto-entrepreneurs qui ont une activité artisanale à titre principal soient désormais tenus de s'inscrire au répertoire des métiers». Cette immatriculation sera «gratuite et sans taxe pendant les trois premières années à compter de leur création d'activité», a-t-il ajouté ... / ... " - Source Le Figaro
Ce qui a réduit l'impact de la mesure qui était basée sur l'entière liberté d'entreprendre. Car, ne l'oublions pas, permettre à n'importe qui de cumuler un emploi avec une activité parallèle officielle est une simple extension du "travailler plus" et un moyen détourné pour expliquer au gens qu'on ne peut rien faire en termes d'augmentation de salaires et de pouvoir d'achat.
D'ailleurs Hervé Novelli ne s'en cachait pas en Novembre 2008 dans le Figaro : "... / ... Fondamentalement, cela consiste à offrir à chacun la possibilité de bénéficier d'un gain de revenus supplémentaires, ce qui, en cette période de ralentissement économique, répond à un vrai besoin. Cela devient même une arme anticrise ... / .. "
A tel point que la restriction qui concernait les fonctionnaires a évolué, bien que le gouvernement se fasse discret sur le sujet. En effet, même si : "Eric Woerth, ministre du Budget et de la Fonction publique, et Matignon ont eu le souci de ne pas dégrader l'image des fonctionnaires dans l'opinion publique, avec des agents qui délaisseraient trop leur mission pour leur activité privée "
On peut lire sur La Gazette des Communes
" Les fonctionnaires qui souhaitent ouvrir une chambre d'hôtes ou faire du dépannage informatique devraient pouvoir en avoir bientôt le droit, selon un projet de décret en préparation, a-t-on indiqué de source gouvernementale, confirmant une information parue dans les Echos du 10 septembre.
"Il y a bien un projet de décret pour la fonction publique dans les tuyaux, pour tenir compte du nouveau statut d'auto-entrepreneur, mais tant qu'il n'est pas signé par le premier ministre, il ne s'agit que d'un projet" a-t-on indiqué dans l'entourage du ministre du Budget et de la Fonction publique Eric Woerth. Le projet envoyé au Conseil d'Etat va élargir les possibilités d'activités accessoires, dont "la mise en valeur d'un patrimoine personnel y compris la restauration et l'hébergement", a précisé la même source. Jusqu'à présent, il était impossible à un fonctionnaire d'ouvrir des chambres d'hôtes .../ ....
Le texte ajoute également à la liste des activités possibles la "vente de biens fabriqués personnellement par l'agent" (peinture, bijoux, poteries). "Il s'agit de changements plutôt à la marge" par rapport au décret du 2 mai 2007 (2007-158) relatif au cumul d'activité des fonctionnaires des agents non titulaires de droit public, et des ouvriers des établissements industriels de l'Etat", a précisé l'entourage d’Eric Woerth. Selon la même source, ce cumul est soumis à autorisation du chef de service, et "cela restera le cas". Néanmoins, : "Le statut général de la fonction publique pose le principe qu'un agent public doit consacrer l'intégralité de son activité professionnelle aux tâches qui lui sont confiées, mais "depuis toujours" ceux qui le souhaitent peuvent exercer, en sus de leur activité principale, des activités accessoires, grâce à des dérogations, avait alors expliqué le ministère." -
Voir aussi l'article publié sur le site auto-entrepreneur.com
Preuve s'il en est qu'il s'agit bien dans l'esprit des pouvoirs publics de privilégier une forme de paix sociale en passant des dérogations au cumul légal.
Oui, mais pour ceux qui ne sont ni retraité, ni titulaire d'un emploi dans le public ou le privé, le choix du statut d'auto entrepreneur est-il toujours volontaire ?
Tubbydev sur son blog nous donne quelques exemples "pervers" que le système pouvait générer et qui, nous en sommes témoins sont appliqués à ce jour dans l'informatique et les métiers du Web.
" .../ ... Il est en effet très facile et extrêmement tentant pour un patron de changer ses salariés en auto-entrepreneurs. Cela lui permet de passer ses charges fixes en charges variables et surtout de ne plus avoir à gérer l’incroyable paperasse que nécessite la gestion de salariés.
... / ... Le transfert des salariés en “entrepreneurs forcés” existe depuis longtemps; de grosses entreprises y ont souvent eu recours notamment dans le domaine informatique.
Le calcul est simple. Plutôt que d’avoir des salariés, vous pouvez passer par une SSII qui vous propose des gens en régie ... / ... mais c’est cher. C’est notamment très cher par rapport à ce que touche la personne qui travaille chez vous et qui s’en contente.
... / ... Par exemple, un développeur payé 300 euros ht la journée dans une SSII, vous coûte 6000 euros par mois en moyenne et en touche lui au maximum 3000.
Vous le payez 4000 euros par mois après qu’il ait monté sa société ou soit devenu auto-entrepreneur et vous économisez 2000 euros par mois avec en bonus la possibilité de rompre le contrat beaucoup plus facilement qu’un contrat de SSII.
par ailleurs, l’inspection du travail aura plus de difficultés à montrer que le contrat avec la SSII est une sorte d’embauche déguisée puisque les gens que vous louent ... / ... travaillent chez vous depuis 2 ans, tout le temps.
Autre idée : vous licenciez les gens qui travaillent chez vous en les changeant ensuite en auto-entrepreneurs. le statut est compatible avec le chômage; résultat: l’ex employé touche le chômage + un petit qqch en continuant à travailler chez vous.
Dans quelques mois, y aura-t-il des statistiques sur les “nouveaux chômeurs” qui ont des contrats avec leur ancienne société en tant qu’auto-entrepreneurs ?... / ... " Intégralité de l'article sur le site de Tubbydev
Nota : Le rédacteur de cet article et plusieurs de ses amis se sont vus proposer les montages expliqué par Tubbydev. Sans oublier le faux stage qui remplace la période d'essai (payée par pôle emploi) pendant lequel le "stagiaire" effectue des prestations normales sans l'ombre d'une formation quelconque.
Au delà du traditionnel cirque médiatique auquel se sont livrés Hervé Novelli et Christine Lagarde, nous n'avons pas trouvé de "statistiques sur les nouveaux chômeurs qui ont des contrats avec leur ancienne société en tant qu’auto-entrepreneurs " mais, on en sait plus depuis ce matin sur le "succès impressionnant".
C'est le site du journal La Tribune qui donne les premiers éléments
" Mis en place au début de l'année, le régime de l'auto-entrepreneur séduit les Français. Mais les premières déclarations de chiffre d'affaires font état d'une faible proportion d'auto-entrepreneurs ayant déclaré une activité réelle pour le deuxième trimestre (seulement 4.400 recensés par l'Urssaf de Paris, qui recouvre un tiers des cotisations nationales).
La moyenne de chiffre d'affaires est de 4.700 euros par trimestre. Le secrétaire d'État au Commerce et aux PME, Hervé Novelli, à l'origine de ce statut, attend des statistiques complètes, que devrait lui fournir, prochainement l'Acoss, qui fédère les Urssaf "
Au fait, l'Acoss profitera t-elle de cette occasion puis lui transmettre ses derniers chiffres sur les pertes nettes d'emploi ?
" ... / ... l'Acoss (banque de la Sécu), qui fédère les Urssaf chargées de collecter les cotisations sociales des entreprises, a enregistré 207.000 pertes nettes d'emplois (- 1,2 %) au deuxième trimestre, autant qu'au premier trimestre, et 563.000 sur un an (- 3,1 %)" - Source Le Point
De même, notre ministre pourrait-il prendre connaissance des derniers chiffres des défaillances d'entreprises :
" ... / ... Le premier semestre 2009 a été marqué par une hausse de 17% des défaillances d'entreprises en France (33 200 jugements prononcés) et atteint le niveau semestriel le plus élevé depuis 1990, selon l'étude semestrielle d'Euler Hermes SFAC " - Source Les Echos
De quoi se réjouir ... modérément !
Décidément, Hervé Novelli continue sa "success story" commencée par le franc succès de la baisse de l'ensemble des prix de la restauration ....
Il ne faut toutefois pas désespérer de l'homme puisqu'il a été capable de stopper un plan social :
" Après avoir enregistré de nouvelles commandes providentielles, l'entreprise va remettre à plat son plan social qui prévoyait 163 suppressions de postes. Mardi, les salariés de Plastivaloire ont ainsi été reçus par le directeur de cabinet du ministre de l'Industrie, Christian Estrosi, lors de son déplacement à Châtellerault (Vienne). Tout porte à croire que le secrétaire d'État aux PME (et ancien député du Chinonais) Hervé Novelli s'est aussi fortement impliqué dans le dossier. L'intéressé a d'ailleurs annoncé qu'il devrait se rendre aujourd'hui à Langeais (siège du groupe) pour rencontrer le PDG de Plastivaloire, Patrick Findeling, en présence des responsables de la chambre de commerce et d'industrie. Il tiendra ensuite une réunion avec les représentants des salariés de l'entreprise. Hervé Novelli ne souhaitait pas en dire plus hier soir, se contentant d'indiquer que les informations qu'il apportera au personnel seront « positives ».
Il est vrai qu'Hervé Novelli connait un peu l'Indre et Loire puisqu'il a été : "Député d’Indre-et-Loire, de 1993 à 1997, de 2002 à 2007" et qu'il n'a jamais cessé de parcourir, depuis, son ancienne circonscription et surtout qu'il a été investit officiellement par l'UMP pour les régionales de 2010 dans la région centre.
C'est vraiment dommage pour les plans sociaux qui touchent les salariés des autres régions de France ...
Crédit et copyright photo
Salon des micro entreprises