Le rapport de l’Afsset sur les baignades artificielles ouvertes au public

Par Yann L'Hostis

L’Afsset c’est l’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail.

En Juillet 2009 cette agence a publié un rapport sur les baignades artificielles ouvertes au public.

Voici la page de l’Afsset qui présente les conclusion de l’étude.

Et maintenant des notes de lectures pas forcément ordonnées.

Définitions.

  • Piscine : eau désinfectée et désinfectante.
  • Baignade en eau libre : mer, rivière, lac (?) – déjà défini d’après l’afsset mais la définition n’est pas rappelée dans le rapport.
  • Baignade artificielle : “nouveau concept” défini par l’Afsset.

Définition proposée par l’Afsset :

Une baignade artificielle est une masse d’eau captée et maintenue captive à des fins de baignade, par une artificialisation du milieu naturel et/ou par l’utilisation d’un dispositif artificiel, traitée ou non par des procédés biologiques et/ou physico-chimiques, mais de qualité non « désinfectée et désinfectante ».

Les bases nautiques aménagées dans d’anciennes balastières sont-elles des baignades artificielles ?

Dans le rapport j’ai trouvé cette définititon d’eau libre :

Eau libre : Masse d’eau de surface en renouvellement permanent (eau courante). Selon l’article L. 431-3 du code de l’environnement, entrent dans le champ des eaux libres « les cours d’eau, canaux, ruisseaux ainsi que les plans d’eaux avec lesquels ils communiquent ».

L’Afsset souligne par ailleurs que l’utilisation du terme « piscine » dans la dénomination et la promotion marketing de ces baignades à traitement par filtration biologique est inadapté et trompeur pour le baigneur, puisque l’eau n’est pas de qualité « désinfectée et désinfectante ».

Cette insistance de l’Afsset à n’utiliser le mot piscine que pour les eaux “désinfectée et désinfectantes” est peut-être une réponse à la question “les piscines naturelles sont-elles soumises à la réglementation sur la sécurité des piscines ?”

Les conclusions de l’Afsset sont assez défavorable aux baignades artificielles.

Voici quelques éléments qui m’inquiètent dans les 15 pages de l’avis :

  • Phobie des eaux stagnantes.
  • Certaines plantes épuratrices pourraient être dangereuses.
  • Il faut vidanger la baignade au moins une fois par an.

Pour répondre à ces questions je vais me plonger dans les 197 pages du rapport.
Documents sans doute intéressant utilisés par le groupe de travail :

  • « Avis sur la toxicité connue de plantes aquatiques utilisées pour épurer les eaux de baignades et/ou pour agrémenter les zones de baignade », M Jean BRUNETON, Professeur en pharmacognosie à l’université d’Angers.
  • « Recommandations de l’Office fédéral allemand pour l’environnement, exigences en matière d’hygiène concernant les Kleinbadeteiche », traduction réalisée par Me Claire NICOLAS, chargée de mission scientifique, service scientifique et technologique de l’Ambassade de France à Berlin.

Pages 73 et suivantes du rapport

Certains agents pathogènes peuvent très bien vivre très longtemps en milieu hydrique. Certaines plantes favorisent la survie de certains agent. Ces question sont assez mal documentées (même en Allemagne et en Autriche).

Page 77 sur les algues :

De fait il est généralement admis que le facteur demaîtrise de la prolifération algale en eau douce est le phosphore

Page 77 aussi partie sur les cyanobactéries.

Page 81 les experts considèrent que les algues peuvent être dangeureuses dans les baignades naturelles mais rien ne le prouve vraiment :

Le groupe de travail considère que l’occurrence d’un tel danger paraît être beaucoup plus forte en baignades artificielles en système fermé qu’en baignades en système ouvert. Mais l’absence de données relative au suivi de ces baignades ne permet pas de valider cette hypothèse en l’état actuel des connaissances.

Page 81 et 82 sur le danger des plantes. Certaines plantes peuvent être toxique (allergie en particulier) mais dans un contexte de baignade il ne s’est jamais rien passé de remarquable.

Page 93. Pour la toxicité des plantes il n’y a finalement pas trop à s’inquiéter sauf pour Cicuta virosa (la Cigue aquatique – avec u nom pareil on est pas tenté d’en installer pour décorer sa lagune…) et Solanum dulcamara qui pourrait tenter les jeunes enfants avec ses frits rouges aétissants.

Page 98 : dans les baignades artificielles il faut pomper en particulier l’eau de surface car elle concentre la plus grande partie des microorganismes et des contaminants.

Intéressant à savoir pour ceux qui envisagent d’installer des pompes dans leurs piscines naturelles : il vaut mieux pomper avec un skimmer qu’au fond de la zone de baignade.

Page 98 toujours :

La configuration de la zone de baignade ne doit pas engendrer de zone « morte » où se développement préférentiellement les biofilms, microalgues et cyanobactéries.

Page 102 sur le traitement avec des UV il y a une série de problèmes que peuvent poser les UV. En particulier la libération des toxines des cyanobactéries. Les UV ne sont pas recommandées pour traiter les baignades artificielles.

Page 102 sur les algicides :

L’ajout d’algicides à une baignade concernée par un fort développement algal est fortement déconseillé par le groupe de travail. En effet en présence de microalgues et de cyanobactéries potentiellement toxiques, la lyse cellulaire s’accompagne d’un relargage massif de toxines dans la masse d’eau, susceptible d’exposer le baigneur à un risque sanitaire élevé, et d’une libération rapide de matière organique et d’éléments nutritifs.

Page 106 sur le dimensionement de la zone de filtration :

La superficie de la zone d’épuration est fonction de nombreux paramètres : intensité d’utilisation,type de construction, composition du filtre, circulation de l’eau (hydraulique), durée de séjour, taille et structure des installations de filtration, etc.

Puis sur les calculs

Or la surface de la zone de traitement est calculée par les concepteurs proportionnellement à celle de la surface de la zone de baignade selon un ratio subjectif qui ne repose pas sur une justification scientifique. Aucune information n’a été apportée sur la profondeur du filtre, toute aussi importante que la superficie, ni sur le temps de passage de l’eau nécessaire à une élimination suffisante des nutriments, MES et germes

Et en conclusion :

Dans ces conditions, le groupe de travail souligne que le dimensionnement ne s’appuie pas sur un raisonnement logique et qu’il paraît donc aléatoire.

Je suis assez d’accord avec ces conclusions mais peut-être quand même que l’on pourrait étudier empiriquement les installation réalisées et repérer les problèmes qui seraient survenus dans des installation réelles.

Page 107 sur le fonctionnement des filtres

Certains végétaux comme les phragmites exsudent également des composés antibiotiques (ex. Schoenoplectus) qui favorisent l’élimination des microorganismes et limitent le développement des cyanobactéries (Nakai et al. 1996 et 2000). L’exportation du phosphore et dans une moindre mesure de l’azote dans les parties aériennes fauchées des végétaux pourrait être suffisante au regard des intrants apportés par chaque baigneur sous réserve d’un entretien (enlèvement régulier des débris et végétaux morts et fauchage annuel) et d’un dimensionnement suffisant de la zone de traitement.

Les conclusions sur le traitement des eaux de baignades sont très dures avec les professionnels. Elles méritent d’être rapportées inextenso :

Il ne semble pas exister de la part des concepteurs d’approche rationnelle et intégrée de la conception de ces baignades. On note particulièrement :

  • une méconnaissance du fonctionnement intrinsèque du système de traitement, de sesperformances et de ses effets en termes d’impact sanitaire et d’épuration des eaux,
  • une faible prise en compte de l’hydraulique des bassins en cohérence avec le système de traitement et avec la gestion de la contamination interbaigneurs,
  • une minimisation de l’importance capitale de limiter au maximum les intrants et en particulier lephosphore,
  • une méconnaissance de la dynamique de réponse de l’écosystème au cours des années de fonctionnement notamment vis-à-vis de l’accumulation de matières nutritives,
  • l’inexistence ou l’insuffisance de cahiers des charges, dont certaines données restent rudimentaires pour l’appui à la réalisation de ces installations sur le terrain,
  • un excès de confiance quant à la capacité de la filière de traitement à maîtriser les risques sanitaires.

Cela dit je ne suis pas du tout d’accord avec la philosophie de ce groupe de travail : il n’y a jamais eu de problème de signalé mais on ne sais jamais :

L’absence de problème sanitaire majeur constaté pour ces types de baignade en fonctionnement en France et à l’étranger (Allemagne, Autriche, etc.) ne permet pas pour autant de conclure à une absence de risque sanitaire compte tenu du manque de suivi épidémiologique des populations de baigneurs concernés.

Avec ce genre de pensée les saccageurs de la planète (en l’occurrence ceux qui balancent du chlore et autre pour stériliser et rendre stérilisant l’eau dans les piscines ordinaires) ont un grand avenir devant eux. Pour les piscines “ordinaires” on sait que les maitres nageurs ont une espérance de vie amputée considérablement par l’inhalation de vapeur de chlore mais on continue quand même. Pensez aussi à l’amiante. On va nous faire peur avec des risques imaginaires quand on a mis 50 ou 100 ans à faire quelque chose pour des risques certains…

Page 195 une information intéressante :

Certaines espèces végétales relargent également des composés antibiotiques (ex. – Schoenoplectus) favorisant l’élimination des microorganismes pathogènes et limitant le développement des cyanobactéries (Nakai et al., 1996 et 2000).

Note pour moi même : piste à creuser…