L’ère de glace

Publié le 23 septembre 2009 par Politicoblogue

Nicolas Marceau a célébré sa victoire avec la chef du Parti québécois, Pauline Marois, hier soir, dans une salle privée du village de Saint-Esprit. Ce professeur d'économie à l'UQAM a été élu dans Rousseau avec 57?% des voix. | Photo: André Pichette, La Presse

J’ai écris ce petit billet quelques heures avant la solide (mais prévisible) victoire du PQ dans Rousseau. Je ne crois pas que cette dernière doive modifier mon analyse. Bien au contraire. Vous jugerez.

Je n’oublierai jamais la leçon. Après la dégelée subie par l’ADQ en 2003, j’avais stupidement écris que ce parti n’irait jamais nulle part.

On connait la suite. Arriva la crise des accommodements raisonnables. Le PQ jugea qu’il n’y avait rien là. L’ADQ flaira le vent et, comme on dit en anglais, «the rest is History» : l’ADQ se retrouva à un cheveu du pouvoir, et le PQ bon troisième.

Les adéquistes chutèrent ensuite aussi vite qu’ils étaient montés. Mais j’en retins qu’il valait mieux laisser aux autres le métier de prophète. À voir cependant la tournure pathétique que prend la course à la direction de l’ADQ (de même que son score franchement minable dans Rousseau ), je suis tenté de conclure que j’avais jadis eu raison trop tôt. Mais bon, je me retiens.

Il reste que si l’ADQ meurt ou ne subsiste qu’en vivotant, ce serait une vraie perte pour le débat démocratique.  Pour deux raisons.

D’abord, parce que l’ADQ a eu le mérite de soulever des enjeux de société réels et cruciaux, comme la démographie ou la dette. La finalité de la vie politique est cependant de trouver de bonnes réponses plutôt que de poser de bonnes questions.

Ensuite, parce que la concurrence n’a pas que des vertus en économie. En politique aussi, elle vous force à vous ajuster. Talonnés par un parti qui les menaçait réellement, libéraux et péquistes étaient obligés de s’interroger sur les causes de cette hémorragie de leurs électorats  respectifs au profit du petit nouveau. Il n’y a maintenant plus d’aiguillon.

D’autres raisons renforcent l’immobilisme de la politique québécoise.

Les problèmes du Québec nécessiteraient des gestes qui, forcément, mécontenteraient beaucoup de monde. Si le gouvernement Charest les posait, il donnerait de l’oxygène à une opposition péquiste incapable d’en trouver par ses propres moyens.

Pourquoi les libéraux, dont toute l’histoire depuis un siècle prouve que c’est le pouvoir avant tout qui est leur raison d’être, feraient-ils ce cadeau au PQ ? Jean Charest a pourtant entre les  mains tous les atouts pour s’offrir, s’il le souhaite, un vrai rendez-vous avec la grandeur.

Les problèmes du PQ sont beaucoup plus compliqués.

Le tassement de son vote devrait logiquement l’inciter à ouvrir son jeu. Mais ce parti est une auberge espagnole. S’il bouge vers la gauche, le PLQ se fera un plaisir d’occuper tout seul le centre de la glace. Du suicide, mais il y en a qui proposent cela sans rire. L’idéologie avant les résultats.

S’il bouge vers la droite, il fâchera ses «amis» du milieu syndical et certains militants qui ont le don de vous rendre la vie impossible, même s’ils sont moins nombreux que leur présence médiatique donne à penser. Opportunistes, les libéraux diraient alors que le PQ veut faire mal aux Québécois. La mer deviendrait très agitée pour la direction du PQ.  Le prix à payer pour maintenir une relative unité est donc de ne jamais trop se compromettre.

Le Québec a besoin d’un sérieux coup de barre. Mais le PLQ ne veut pas le donner, et le PQ le peut difficilement sans connaître des turbulences considérables. Tout se conjugue pour que rien ne se passe. Appelons ça l’ère de glace.

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