Apres coup

Publié le 10 octobre 2009 par Karedig @Karedig_GA
 

 
La semaine fut une longue journée. Je veux dire que les nuits n'apportèrent aucunement cette rupture qui différencie la veille du lendemain. Je suis arrivé au week-end comme un coureur de fond dont la pensée se réduit à un point d'horizon lointain.

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Alors que je me glissais doucement dans une torpeur languissante de fin de saison, je fus éveillé par une méchante querelle. Le prince Eulenburg peut-il rester au service de l'Empereur Guillaume II ? Malheureusement je fus pris d'une drôle de maladie, une glossolalie : tout ce que je pouvais dire semblait incompréhensible. Puisque je m'épuisais à parler dans le vide, je me résignais donc au silence.

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Le hasard a voulu que l'on m'ait donné à voir cette semaine une vieille séquence d'archives. Un journal télévisé régional de 1981. J'écoute un jeune homme de 23 ans dire son homosexualité et ses espérances politiques (les articles discriminatoires du Code pénal seront abrogés l'année suivante). Il y a quelque chose de joyeux et de bravache dans ce garçon qui parle à l'écran sous son véritable nom, du défi aussi dans ses réponses plus assurées que les
questions d'un intervieweur hors champ. Les voitures en arrière-plan semblent tirées d'un vieux film en noir-et-blanc, elles rappellent que ces images viennent d'une autre époque. Si loin, si proche.
L'homme de 51 ans qui se regarde à distance, s'écoute silencieusement. Il mesure son trajet, non sans plaisir. Pour un peu il répéterait à voix haute les mêmes paroles que son jeune lui-même. Même seul contre tous.

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(Da capo)
La semaine fut une longue journée. Je veux dire que les nuits n'apportèrent aucunement cette rupture qui différencie la veille du lendemain.
Je suis arrivé au week-end comme un coureur de fond dont la pensée se réduit à un point d'horizon lointain.