Le modèle d’Akamatsu.

Par Bricabraque

L'économiste japonais Kaname Akamatsu définit la stratégie des avantages comparatifs en “vols d'oies sauvages” dès 1935. Cette stratégie consiste à produire dans le but d'exporter. L'industrialisation est donc extravertie et repose sur la conquête de marchés extérieurs.Ce processus se déroule par étapes. Le processus global consiste à produire, pour les exporter, des produits dont la valeur ajoutée est croissante (voir ci-dessous).

Cette remontée de filières se déroule par étapes de développement. Au lendemain de la guerre, le Japon doit se reconstruire et ne peut le faire qu'avec l'aide économique américaine. Le pays n'exporte guère que des matières premières et doit importer les produits manufacturés dont la population a besoin. Il se tourne vers les pays développés (Europe, Etats-Unis, seuls capables de les lui fournir).

Dans une deuxième phase (1950's-1960's), le Japon opte pour une production se substituant aux importations. L'accent est d'abord mis sur l'industrie lourde (aciérie, pétrochimie) et les biens manufacturés à faible valeur ajoutée comme le textile. La croissance de la demande intérieure assure la rentabilité du système. Le pays adopte aussi des mesures protectionnistes qui tendent à décourager les importations.

Dans une troisième phase (1970's), la balance commerciale du pays devient donc très excédentaire, ce qui permet de réinvestir une partie des bénéfices vers des productions à plus forte valeur ajoutée (productions de biens d'équipements: automobiles, machines-outils, appareils électriques), destinées bien sûr dans un quatrième temps à l'exportation. Dans le même temps, les salaires augmentent. Très vite, le Japon transfère les industries de main d’œuvre àde productions à faible valeur ajoutée et certaines industries de maintenance vers les pays voisins, où les salaires restent bas (Corée du Sud, Taïwan, Hong-Kong, Singapour: les dragons). Dans le même temps, les entreprises nippones partent à la conquête des dragons, tout en s'y fournissant en matières premières. Par conséquent, les échanges intrarégionaux augmentent très fortement.

Dans une ultime phase (à partir des années 1980), le pays se spécialise dans les activités de nouvelles technologies et industries de pointe (informatique, robotique, télécommunication, biotechnologies). En parallèle, il développe également le tertiaire supérieur (services financiers, assurance, logistique).

Sur son site, Yves Guiet propose un schéma très clair permettant de bien comprendre le phénomène.


La diffusion du modèle japonais joue un rôle essentiel dans le développement de l'Asie orientale. Ce modèle s'est diffusé et a contribuer à former l'aire asiatique en cercles concentriques autour du Japon (voir ci-dessous):

- Après 1945, le Japon aidé par les Etats-Unis, profite de la guerre froide pour développer son industrie et pour protéger son marché intérieur. Jusqu'aux années 1980, le commerce est dominé et organisé par le Japon qui dégage un excédent commercial en exportant des biens à forte valeur ajoutée et en important des produits issus d'activités d'assemblage.

- Les délocalisations des produits japonais à plus faible valeur ajoutée se sont réalisées à proximité du Japon vers des pays où le coût de la main d'œuvre était alors bas (Corée du Sud, Taiwan, Hong Kong, Singapour années 1960-1970). Les dragons ont tablé sur les capitaux étrangers et les zones franches d'exportation pour assurer leur décollage économique, ce qui explique en partie leur fragilité lors de la crise asiatique.

- A leur tour, bénéficiant des investissements japonais, ils sont entrés dans un développement économique extraverti avec remontée de filières (années 1980). A partir des années1990, le développement des NPIA est marqué par la montée en puissance de leurs propres firmes et la hausse des coûts de production interne. Actuellement, la production de produits à faible valeur ajoutée ou le montage des produits sont renvoyés dans un second cercle de pays-atelier comprenant la Malaisie, la Thaïlande, l'Indonésie ou les Philippines. C’est pourquoi se créent des réseaux de sous-traitants et usines d’assemblages dans de nouveaux pays d’Asie du sud-est comme la Malaisie, la Thaïlande, l’Indonésie, les Philippines et surtout la Chine.

- Enfin, la Chine littorale s'est intégrée tardivement (avec l'ouverture progressive du pays à partir de 1979) au système en offrant une main d'œuvre abondante, à bas coût et soumise.L'ouverture aux investissements étrangers et au marché mondial en Chine étape se caractérise par la privatisation des entreprises, une déréglementation de l’économie. Cette ouverture obéit à un processus très progressif : zonage progressif des villes portuaires et des espaces ouverts à l’économie capitaliste. On parle d’ « économie socialiste de marché » (sic).

Liens:

- Schéma du modèle de développement des pays asiatiques: “l'envol des oies sauvages en Asie orientale”, sur le site d'Yves Guiet.

- Pour les anglophones, une définition de “l'envol des oies sauvages“.