L'art d'être un homme au musée Dapper

Publié le 20 octobre 2009 par Detoursdesmondes

La posture de la statuette Pere ci-dessus pourrait tout à fait traduire ma perplexité face à cette très belle exposition dotée de pièces exceptionnelles.
En effet, c'est un petit goût de gratuité dans le choix des oeuvres qui me reste au fond de la gorge après avoir parcouru l'exposition... Ne boudant pas le plaisir des yeux, je m'interroge cependant de savoir si j'ai bien compris le propos que le titre annonce.
Certes, celui-ci peut laisser place à maintes interprétations.
« Être un homme », c'était, néanmoins à mon sens et pour une large partie, avant tout, l'art de le devenir.
Par le biais des initiations notamment. Mais aucun masque intervenant lors des rites d'initiation africains n'est présent. Quelques pièces, prisées des collectionneurs, appartenant aux maisons des hommes en Papouasie - Nouvelle-Guinée (Bouchons et masques de flûtes, pupitre d'orateur Iatmul (voir détail, photo ci-dessous)...) sont exposées, mais ne révèlent rien de l'identité masculine.


On nous montre ce que les femmes ne peuvent pas voir ; est-ce là une composante fondamentale du masculin ?

Mais exhiber son appartenance à une fonction, un rang, c'est plutôt cet aspect qui est privilégié dans l'exposition.
En fait, il s'agit plus du goût des hommes pour la parure.
D'où un discours discontinu sur les parures de prestige et les figures du pouvoir qu'elles soient celles du chasseur, du chef, du devin.

La statuaire occupe une belle place, montrant les scarifications, les coiffures.
Mais pourquoi ces belles et redoutables statues Songye, lesquelles, toujours spectaculaires, n'apportent rien au propos ?

La déclinaison des matériaux précieux dans les parures océaniennes (coquillages, ivoires, plumes) relèvent du pouvoir.
Telle cette parure de tête marquisienne, composée de plaquettes de coquillages et d'écailles de tortue. Ces dernières sont ornées de figures de tiki. (photo ci-dessous)
Pourquoi diable exposer l'une des rares capes en plumes d'Hawaï près d'un masque des sociétés de grades des îles Banks si ce n'est pour nous éblouir par la rareté de ces pièces et non pas servir le propos !

Il est vrai que le visiteur est heureux de ce foisonnement et de la qualité de ces oeuvres ainsi données à contempler.
Mais il est bien agréable d'avoir un petit fil rouge nous permettant de saisir les composantes de l'identité masculine notamment en Océanie lorsqu'on sait que la question du genre est si compliquée et que le concept de personne n'a pas le sens que nous lui donnons en Occident.


Photo 1 : Musée royal de l'Afrique centrale, © Hugues Dubois.
Photo 2 : Rietberg Museum, Zürich.
Photo 3 : Musée royal de l'Afrique centrale in Neyt, F., 2004, Songye, 5 Continents Ed., Anvers. (corne portée au pied gauche et non pas au pied droit comme dans l'exposition ?)
Photo 4 : Collection particulière, © Studio R. Asselberghs - Frédéric Dehaen.