Matricule

Publié le 14 novembre 2009 par Malesherbes

L’interdiction du port de la burqua pose un problème légal. Certains juristes s’interrogent en effet sur la possibilité de proscrire une tenue particulière n’offensant pas la décence. Les exigences de la sécurité publique permettraient de vaincre cet obstacle. C’est dans ce but que le décret n°2009-724 du 19 juin 2009 a ainsi modifié l’article R465-14 de notre code pénal : « Est puni de l'amende prévue pour les contraventions de la cinquième classe le fait pour une personne, au sein ou aux abords immédiats d'une manifestation sur la voie publique, de dissimuler volontairement son visage afin de ne pas être identifiée dans des circonstances faisant craindre des atteintes à l'ordre public. […] »

La sagacité de nos législateurs m’émerveillera toujours. Comment déterminera-t-on que la dissimulation est volontaire et qu’elle est faite dans le but de ne pas être identifié ? Comment prouve-t-on une intention ? Que sont des circonstances faisant craindre des atteintes à l’ordre public ? Une manifestation autorisée peut-elle engendrer de telles craintes ? L’image d’un visage permet-elle à coup sûr l’identification d’une personne ? Enfin, soit, la loi est la loi.

Ces modes d’identification sont bien imparfaits. En ce qui me concerne, comme des centaines de milliers d’habitants de l’île de France, j’utilise depuis des années pour mes déplacements en transports en commun une carte Navigo. Les autorités compétentes, et j’espère seulement celles-ci, peuvent ainsi tracer tous mes déplacements et établir si j’étais susceptible de me trouver tel jour à tel endroit. Ce bel outil comporte cependant un point faible. S’il localise la présence à un instant donné d’un porteur de ma carte, il ne peut inférer que j’étais ce porteur.

Pour éviter toute fraude, il importe donc au plus vite de mettre au point une puce d’identification que l’on insérerait sous la peau de chaque individu, afin de pouvoir le reconnaître avec certitude. On accomplirait ainsi un grand pas, non dans la prévention des crimes et délits, mais plutôt dans leur sanction.

Nous pouvons nous réclamer dans cette voie de devanciers qui, avec des moyens rudimentaires, avaient su progresser dans cette direction. Les nazis avaient eu l’idée de tatouer l’avant-bras des déportés d’un numéro matricule. Ils disposaient ainsi d’un moyen infalsifiable de les identifier et, dans le même temps, ils consacraient leur volonté de les ravaler au rang d’objets. Eh bien, plus de soixante ans après, ces tatouages ont traversé le temps. Fantastique, n’est-ce pas ?