Paracétamol

Publié le 28 décembre 2009 par Jlhuss

Les deux réveillons de cette semaine de fêtes n’ont rien en commun, si ce n’est les agapes et encore !  Certes les vacances à la neige ou au soleil des îles lointaines, tendent à faire disparaître le côté famille “élargie” de ces moments. Mais la nuit de Noël conserve parfois encore ce caractère, avec le mélange des générations et la joie de la pyramide des âges autour de l’enfant émerveillé pouvant encore se rencontrer.

Rien de tel pour le réveillon de l’an neuf. La ségrégation des tranches d’âge reprend son rang pour une fête plus bacchique. Les enfants y perdent le premier rôle et les grands parents leurs places à «l’orchestre».

Le centre des appels d’urgences mesure très bien ces différences. Les journées qui suivent Noël et précèdent le 31 décembre peuvent parfois prendre l’aspect d’une vaste organisation de « soirée tranquille » pour tout le monde … en toute sécurité : les bancales à l’hosto, les plus jeunes au dodo, les actifs au goulot !

Ainsi une gentille dame, la quarantaine, nous appelle pour sa «maman qui ne va vraiment pas bien» !

Que se passe-t-il, Madame ?

« Elle n’est pas bien depuis hier soir. Elle a un peu frissonné ; elle avait de la fièvre. Ce matin son docteur est passé ; il pense à “une grippe”, lui a donné quelques médicaments que je vais aller chercher … mais je ne la trouve pas bien du tout » ! « Je voudrais qu’elle soit vue aux urgences. »

Madame, elle a été “vue” par un médecin, commencez le traitement prescrit avant toute autre chose, et si ça ne va pas mieux d’ici quelques heures rappelez-nous. Une visite supplémentaire aux urgences ne changerait rien. Pas convaincue la dame … mais bon …

Il suffisait d’attendre un peu. En milieu d’après-midi re-téléphone de la madame « quarantaine ». « C’est pour Maman … vous savez ce matin … ça va pas mieux, je dirais même moins bien. Je trouve qu’elle éprouve des difficultés à respirer. »

-Elle a commencé le traitement prescrit par le médecin ?

Oui … Oui mais je ne là trouve pas bien du tout …je veux qu’elle soit vue aux urgences.

Ainsi fut fait, le mot clé ayant été employé : “difficultés respiratoires” … Certes la patiente n’était pas au meilleur de sa forme, mais son état apparaissait sans gravité particulière. Il réclamait en fait des antipyrétiques déjà prescrits par le généraliste, une bonne bouillotte et un lit (son lit !). L’urgentiste confirme le syndrome grippal simple, diagnostiqué par le confrère, ainsi que l’ordonnance prescrite et renvoie chez elles Mère et fille « accompagnante »

Essayant une dernière fois de forcer les portes de l’hôpital la fille, tout à coup moins “sympa”, vocifère : « Mais enfin … ma mère a de la fièvre … vous ne pouvez pas là renvoyer dans cet état » !

-Votre mère n’a pas de fièvre, madame, elle a 37°2 …Les examens pratiqués sont normaux, sa radio pulmonaire ne montre rien de particulier …

Alors, enregistrant l’échec de ses efforts vains et dans un grand élan de spontanéité, elle se tourne vers sa mère qui ne demande rien,  plutôt ennuyée :

«Tu vois je t’avais bien dit qu’il ne fallait pas prendre cet efferalgan»!

Authentique et d’ailleurs impossible à inventer … Une nuit de nouvel an tranquille, nécessite parfois des stratagèmes insoupçonnés.

[1ère publication le 31 décembre 2007]