BD : Je mourrai pas gibier d’Alfred

Par Manuel Picaud

Coup de sang

« Mortagne, c’est mille deux cent dix-neuf habitants. Du bois et de la vigne. » Et pour les exploiter, une scierie et un château vinicole qui font vivre le bourg et génèrent deux clans, rivaux depuis toujours. Travailler pour l’un, c’est haïr l’autre. Le narrateur est né côté scierie. Son père en est, son grand frère aussi. Lui a réussi à fuir et suit un CAP de mécanique à soixante kilomètre de là. Il apparaît comme le seul rescapé de la misère morale de ce bourg enclavé.
L’histoire, tirée d’un court roman noir de Guillaume Guéraud, tient du coup au foie et Alfred n’a en rien voulu adoucir le propos. Le dessin au stylo-bille est âpre et les textes secs. Dans certaines scènes, le décalage entre image et récit accentue le malaise.
Tandis qu’on lit une description macabre, l’oeil se ballade en forêt à la rencontre des animaux nocturnes. Et le jour revient comme après un mauvais rêve. À mesure, on sent la colère du jeune homme sourdre jusqu’à l’explosion finale. On respire un peu et on reprend l’album au début pour le lire une deuxième fois. Là. Tout de suite.
© Antoine Hudin
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Je mourrai pas gibier d’Alfred, d’après Guillaume Guéraud - Delcourt, collection Mirages – janvier 2009 – 14,95 €
sélection du festival international de bande dessinée à Angoulême 2010

Article initialement paru, sous une forme différente, dans Arts et Métiers Magazine