Dominique Maraval s'en est allé

Publié le 03 janvier 2010 par Marc Villemain

 

J'ai peu connu Dominique Maraval. Mais je me souviens de deux soirées passées dans son atelier, en compagnie de Charles et Michelle, lui-même entouré de bien d'autres amis. J'ai souvenir d'un grand gaillard extraordinairement vivant, viscéral, farceur et généreux. Mais de son regard toujours pétillant, il ne cherchait jamais à dissimuler la part de gravité. C'était, pour cela aussi, une personnalité très attachante.
Maraval m'impressionnait beaucoup. Le bonhomme avait beau être plein de verve et de gentillesse, émanaient de lui une telle vitalité, une telle puissance, son rire était tellement franc que, sans le savoir ni le vouloir, lui qui semblait si doux, il dominait son monde et son espace. Je me souviens qu'il s'était assis en face de moi, avait rempli mon verre, et que nous avions parlé de politique, de la gauche bien sûr, et de littérature un peu. La spontanéité de ses colères désarçonnait, mais il mettait beaucoup d'application à raisonner, à s'appuyer sur ses expériences, sur l'histoire, à convaincre. Il fonctionnait par sourires et clins d'œil, curieux de l'autre, soucieux de le mettre à l'aise, finissant toujours par chercher à recouvrer quelque chose du fil de l'amitié.
L'artiste m'impressionnait davantage encore. Ce qui me frappa, lorsque pour la première fois je vis ses peintures, ces immenses panneaux dont son atelier se bariolait, c'était le décalage apparent entre l'œuvre et le peintre. Dans ses peintures on ne distingue plus rien du farceur mais seulement l'homme intérieur, celui qu'habite le désordre contemporain. J'ai immédiatement admiré ces immenses fresques dont on aurait dit qu'elles étaient comme le champ de bataille du monde. Très lyriques, dotées d'un sens très singulier de l'équilibre et de la géométrie, elles inspirent immédiatement quelque chose d'à la fois très charnel et très historial. Dans ses toiles, on retrouve toujours quelque chose de la matière du monde.

  

Pour retrouver le farceur, il fallait se tourner vers ses sculptures, dont je n'ai pas trouvé ailleurs d'équivalent. Il y avait du jeu, beaucoup de jeu, dans cette manière qu'il avait de mettre en scène tous ces personnages. Je pense que, lorsqu'il sculptait, Maraval devait rire de ses bons tours. Et, en même temps, si la facétie attire tout de suite l'œil, demeurait toujours quelque chose d'attendrissant, et d'allégorique, dans ses petites sculptures étonnamment modernes et atemporelles.

Je répète que je l'ai peu connu. Que tout ce que je dis là se fonde sur quelque chose de très impressionniste, qui paraîtra peut-être saugrenu à ses proches. Je l'ignore. Mais je tenais à saluer la mémoire de ce très grand artiste, et à évoquer ces maigres et modestes souvenirs personnels, maintenant qu'il est parti, une heure seulement après que l'année 2010 aura sonné. Et a transmettre à sa famille, à ses proches, à ses amis, nombreux, mes pensées les plus vives.

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