La traversée des sentiments - Michel Tremblay

Par Venise19 @VeniseLandry
On dirait que je trouve, et même cours, après tous les prétextes du monde pour ne pas vous parler de La traversée des sentiments. Pourquoi ? Parce que ... parce que ... pas facile à dire, mais je suis déçue pour des raisons autres que purement littéraires. Mais je vais commencer par le littéraire.
Ce troisième tome est un prolongement qui suit de très près le deuxième La Traversée de la ville par Rhéauna, enfant de 11 ans. Lorsque l’on s’est ancré à des personnages, la hâte de renouer avec eux nous rend souvent exigeant, est-ce parce que mes attentes étaient élevées mais j’ai trouvé cette fin d’histoire bien tranquille, elle aurait pu tout aussi bien se nommer la Traversée de la tranquillité.
J’aborde plus ce troisième tome comme un prolongement qu’une suite ; deux ans plus tard, on retrouve les mêmes personnages, ils n’ont pas évolués. La mère veut partir une semaine en vacances avec ses deux sœurs, sans ses enfants : Rhéauna (Nana) et Théo. N’oublions pas que Rhéauna, 13 ans, prend soin de Théo à l'année, je dirais plus maternellement que sa propre mère. Par une entourloupette du destin, la mère partira obligatoirement avec ses enfants. Les trois sœurs en vacances, Maria (la mère), Teena, Tititte seront hébergées dans les Laurentides, dans un village éloigné, dans la maison dite suspendue d’une cousine, Rose, mariée à un amérindien, virilement beau et porté sur la bouteille. Rose est cette femme sensée à qui Teena a confié son fils de 7 ans pour qu’elle en prenne soin dans cette maison qu’elle a elle-même achetée.
Juste pour vous donner une idée de la lenteur de l’action, la moitié du roman se déroule avant le départ, relatant principalement la question d'amener ou pas les enfants, les inquiétudes, les préparatifs. Ça m’a fait penser au peintre qui devant son tableau déjà complété rajoute de petites touches, de ces détails qui peaufinent l’oeuvre. Ce roman nous offre une fin d’histoire approfondie et bien fignolée, mais en même temps la trame se trouve comme figée dans le temps, on s’enfonce dans les détails. Cette escapade dans le bois, Rhéauna, celle qui a décidé qu'un jour elle deviendrait écrivaine y tenait mordicus, malgré le prix à payer de prendre complètement en charge son frère. Elle a dû promettre à sa mère qu’elle n’entendrait pas son frérot de deux ans de toutes les vacances. Vous imaginez, quasiment un cas de DPJ maintenant ! À ce compte-là, l’insouciance de sa mère peut bien taper sur les nerfs de Rhéauna, même si elle l'adore.
Vers la fin de cette fin de roman, l’auteur se permet la fantaisie d’introduire généreusement son prochain roman « Les contes de Josaphat-le-violon ».
Ma déception ne vient pas à proprement parler de l’histoire elle-même. Quand je suis attachée aux personnages, j'apprécie la lenteur d’action et le fait d’entrer dans le pointu des détails des caractères, d'autant plus que Tremblay fait montre d'une habileté incontestable pour le faire. C’est plutôt un certain abus qui m'a fait réfléchir. Je ne rechigne habituellement pas à la dépense pour m’offrir des romans, vous vous en doutez bien, mais cette fois, j'ai pensé au lecteur qui débourse 25.95 $ (+ taxe) pour son exemplaire qui aurait pu tout au bien se retrouver en DEUXIÈME PARTIE de la Traversée de la ville. Ça ferait peut-être moins concept, c’est vrai, et un peu moins lucratif pour l’auteur, mais d’un autre côté, j’ai eu conscience d’avoir sorti 75 $ de ma poche pour acquérir ces trois romans qui auraient pu facilement en être deux.
Monsieur Michel Tremblay continuera sûrement à faire comme il l’entend, il dispose de cette latitude, mais personnellement, à l’avenir, j’emprunterai ses trilogies ou quadrilogies à la Bibliothèque, préférant réserver ce montant pour de jeunes auteurs non établis.