Courrier international manifeste à sa solidarité à la presse haïtienne endolorie

Publié le 07 février 2010 par 509
Courrier International a consacré un numéro spécial à Haïti où sont réunis les deux quotidiens haïtiens, "Le Nouvelliste" et "Le Matin", qui ne peuvent plus paraitre à Port-au-Prince après le séisme du 12 janvier et un hebdomadaire haïtien "Haïti-Liberté", publié à New-York. 

"Ouvrir nos colonnes à des journaux empêchés de paraître, Courrier international l’a déjà fait à plusieurs reprises, notamment avec la presse russe lors du putsch raté de 1991 ou, plus récemment, avec les presses algérienne ou irakienne", indique Philippe Thureau-Dangin, président et directeur de la publication du journal.
Mais, avec Haïti, poursuit-il, il s’agit d’autre chose. Plus question de censure ou d’exil politique : les deux quotidiens haïtiens, Le Matin et Le Nouvelliste, sont dans le plus cruel dénuement.
Ce numéro spécial rassemble des textes des deux quotidiens port-au-princiens empêchés de paraitre depuis le séisme du 12 janvier quoique leurs deux locaux aient tenu le coup.
Les rédacteurs de deux journaux haïtiens, sont, dans des conditions plus que difficiles, parvenus à tracer un portrait d’Haïti, a souligné le Courrier International.
Un texte de Daly Valet, directeur de Le Matin, introduit le dossier consacré à Haïti à l’intérieur du Courrier. L’on retrouve aussi sous la plume de Franz Duval, directeur du bihebdomadaire Ticket, publié par Le Nouvelliste, un reportage émouvant (Pour que le meilleur triomphe du pire) sur un mariage post-séisme d’un jeune collaborateur du Nouvelliste. Fauché, sans-abri et orphelin de père, le dessinateur Teddy Kesner Mombrun (qui a d’ailleurs signé une caricature dans le Courrier) a quand même convolé en justes noces avec sa fiancé Jokebed.
D’autres articles de Samuel Baucicaut (Le Nouvelliste) décrivent des situations comme les départs en masse des compatriotes ou des conversions au protestantisme tout aussi massives. Du côté du Matin, l’on relève les contributions de Jean Samuel Vincent et de Patrick Réma.
Des textes décrivent aussi le calvaire des médias haïtiens après le séisme du 12 janvier. L’une des radios les plus touchées est la station Magik9, qui a perdus plusieurs de ses collaborateurs, indique son directeur Frantz Duval.
Il faut aussi retenir les cas de Radio Ibo, radio Radio télé Guinen, radio Tropic FM et Maximum FM dont les locaux se sont totalement effondrés alors que ceux des autres stations comme radio Caraïbes sont fissurés.
Un article de Christine Lévêque du Courrier International (Journalistes aux pieds nus) attire l’attention sur les conditions difficiles dans lesquelles les rédacteurs et du Nouvelliste du Matin ont collaboré au numéro spécial.
“Les journalistes ( …)ont réussi à se retrouver, au réveil de nuits inconfortables, passées pour certains dans des camps de fortune, pour improviser des conférences de rédaction à l’air libre. “Ces articles ont été écrits dans un garage ouvert aux quatre vents, sur nos ordinateurs portables, à partir d’une petite génératrice qui fait un boucan infernal”, raconte Frantz Duval du Nouvelliste.
De son côté, Daly Valet a relu et corrigé lui-même les papiers de ses collaborateurs sur son ordinateur personnel, grâce au groupe électrogène qui fonctionne à son domicile.
En attendant, les deux quotidiens ne paraissent plus à la capitale haïtienne. Parmi les raisons évoquées,des difficultés techniques et financières et le manque de perspectives qui vont obliger les deux journaux à réduire leur rédaction et leur administration en attendant des jours meilleurs.
Pour ce qui est du Nouvelliste, les employés refusent de mettre les pieds dans le building fissuré du journal, rapporte M. Duval qui ajoute qu’il va désormais falloir guérir les Haïtiens de la peur du béton.
Entre-temps, la presse écrite en Haïti se résume aux médias électroniques.
Jonel Juste
jgli02@yahoo.fr