De l’intérêt de la France à défendre ses acquis en Afrique Francophone : Une rupture sans coupure

Publié le 10 février 2010 par Infoguerre

Conférence sur la France-Afrique à l’école Militaire par Monsieur André JANIER Ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire auprès de la République de Côte d’Ivoire jusqu’à l’été 2009.Module Grille de lecture géopolitique de l’Ecole de Guerre Economique. L’objet de cette conférence est de donner un éclairage sur la capacité de la France à défendre ses intérêts en Afrique francophone.

En écoutant le parcours professionnel de notre orateur, qui d’autre que lui aurait la légitimité à redonner espoir à nos entrepreneurs, attirés qu’ils seraient vers de nouveaux territoires… de compétition. L’ambassadeur en s’adressant à son auditoire, principalement représenté par les étudiants du 3° cycle spécialisé en Intelligence Economique et Stratégie de l’EGE, mais aussi d’auditeurs de l’IHEDN et d’industriels insista sur le rôle des ambassadeurs dans un contexte de guerre économique. En géopolitique et en géostratégie l’ambassadeur est avant tout une arme pacifique de négociation pour les politiques dans les conflits d’intérêts, par opposition à l’emploi de la force. Les diplomates se consacrent à contourner les confrontations directes. La guerre économique est pour lui différente du combat qui vise à éliminer les adversaires. Elle devrait avoir pour objet de contourner la confrontation et d’amener les parties en présence à se placer sur des terrains de compromis ou de cheminement possibles. En Afrique ces « nouveaux » territoires s’organisent aussi selon des règles et des normes internationales, souvent aidés en cela par la Communauté Européenne. Leur rôle est aussi de sensibiliser nos entreprises à la prise en compte essentielle de cette nouvelle donne où les rapports de force ne sont plus régis par l’antériorité d’occupation, mais par la meilleure offre du moment. Pour lui il leur faut apprendre à être patient, opiniâtre et à reconstruire leur notoriété sur des bases de qualité et de développement durable. Quelques batailles perdues n’en font pas la guerre nous encourage-il!

Monsieur l’Ambassadeur nous reprécise que la vision pour laquelle l’Afrique constituait un pré carré réservé à la France, prête à rentrer en guerre pour maintenir sa situation sur ce continent est dépassée, radicalement anachronique, voire complètement fausse. Pour poursuivre sur ce registre la France-Afrique est pour lui un mythe sachant que l'Afrique évolue tout comme la France et ce qui était valable il y a 50 ans ne l'est plus aujourd'hui. Dire encore que l’état de dictature au Tchad appartient à la France Afrique est bon pour un cinéaste qui en alimenterait son fond de commerce.

Cette conférence a permis de situer le présent par rapport à l’avenir en trois temps: L’histoire, un état des lieux sommaire, des stratégies pour l’avenir. Ainsi, reprenant un discours entendu comme quoi l'Afrique est oubliée parmi les puissances en devenir et que sa situation est considérée comme désespérée,il démontre que ce constat n'est pas exact, les Africains sont eux aussi très dynamiques. La France qui côtoie les Africains depuis longtemps est bien placée pour le savoir. Elle a intérêt à préserver cette place privilégiée, voir exploiter intelligemment ces liens.

La présence et l’action de la France en Afrique francophone a considérablement évolué à travers les années. Dès le 19°siècle les premiers colons ont d'abord cherché à exploiter les richesses naturelles le long des côtes et des rivières, tel le coton, la canne à sucre, lebois et l’huile de palme, le café et le cacao ainsi que le caoutchouc, en y appliquant leurs propres méthodes de culture et de production. Pour mémoire la gomme Arabique a toujours été exploitée au Tchad par les nomades, nous rappela t-il. Cette exploitation s'accompagnait de travail forcé pour les indigènes. Le régime colonial a évolué vers une plus grande collaboration au fur et à mesure que des élites étaient formées sur place. Les africains sont malins et inventifs. La métropole administrait les filières et engrangeait les profits en associant progressivement les locaux. Puis l’Indépendance survit des 1960. Considérée comme un levier de l’économie par les futurs chefs d’Etats ils l’ont abordée avec leur propre conviction politique, tel Houphouët-Boigny en Côte d’ivoire à travers le courant France Afrique ou Sékou Touré en Guinée, comme pour d’autres au Benin et au Cameroun tentés par des voies marxistes aidés en cela de l’URSS ou de la Chine.

Qu’en est-il aujourd’hui de ces politiques opposées?

La Côte d'ivoire est relativement prospère alors que la Guinée n'est jamais sortie de son marasme. Il y a des pays comme le Bénin où les intérêts français ont été conservés après l'indépendance. A la différence des pays anglophones, la majorité des pays Africains francophones a donc choisi de préserver certains liens avec l'ancienne métropole car ils étaient convaincus que cette relation servirait leurs intérêts politiques. Des affrontements sont apparus sur des marchés captifs nouvellement ouvert à la concurrence. Les entreprises Françaises ont du s'adapter alors que les Africains faisaient monter les enchères. Elles ont maintenus leurs positions malgré la venue de nouveaux acteurs tels les Américains, lesRusses et Chinois, les Arabes et Africains du sud. Les entreprises françaises ont certes du céder du terrain mais elles perdurent tant bien que mal sur le territoire.

Il y a encore plus de 500 entreprises françaises opérant sur ce continent, comme Bouygues Bolloré, Michelin, toutes nos grandes banques et assurances, les compagnies fruitières et plusieurs centaines de PME. En novembre 2004 un quart d’entres elles sont parties de la Côte d’ivoire et les autres continuent de travailler là bas. Ces entreprises constituent la trame de notre coopération nouvelle car la Côte d’ivoire reste le premier partenaire de la France pour ses exportations et importations en particulier pour le café le cacao et le pétrole. Les autorités d'Abidjan n'ont pas exclu d'indemniser ces sociétés Françaises du préjudice subit depuis sachant qu'elles contribuent au tiers du PIB, participent à la moitié de l'impôt et emploient plusieurs milliers de personnes. Ces chiffres confirment que les intérêts économiques Français restent très important sur le contient, même si les monopoles ont disparus.

Comment faire fructifier cet héritage ?

Les jeunes africains ont définitivement coupé le cordon ombilical et les jeunes entrepreneurs nous considèrent comme des partenaires comme les autres. L'Afrique pense qu’elle doit traiter d'égale à égale avec les anciens colonisateurs. Tous ces jeunes ne sont plus attirés par ce que nous représentions. Ils sont moins partenaires, plus observateurs, ils jugent sur pièce. Néanmoins il reste des traces de proximités culturelles, un inconscient collectif. Le passé historique, la proximité linguistique ou géographique continuent de peser dans le maintien de liens entre les deux parties même non avoués. L’Ambiance familière des formations dispensées sur place dans notre système scolaire, puis les stages en France en reprenant l’exemple du sport avec Monsieur Basile Boli et d'autres célébrités qui ont bénéficié du ce modèle grâce aux bourses en France et de la délivrance de visa sont des réussites qui marquent encore les esprits aujourd’hui. Il est dommage de ne pas renforcer ce dispositif de promotion sociale et de lien culturel. Certaines restrictions nous desservent. Nous avons tendance, nous disait-il, à considérer les Africains comme des clandestins et fermer la porte à des amis sincères de la France. Les dirigeants d'Afrique francophone ont d'abord été formés sur place avant de terminer leur formation en France. Ils parlent le français parfois mieux que nous et continuent de se retrouver en beaucoup de chose avec nous autrement qu'avec les chinois ou les indiens.

Des hommes et des pays :

Félix Houphouët-Boigny surnommé « le sage », est le « père » de l’indépendance de la Côte d’Ivoire. Ila été successivement chef traditionnel, médecin, planteur, leader syndical, député ivoirien en France, ministre de gouvernements français, président de l'Assemblée nationale ivoirienne, maire d'Abidjan, premier ministre ivoirien et premier président de la Côte d'Ivoire de 1960 à 1993. Il teint un rôle de premier ordre dans le processus de décolonisation de l'Afrique.

Ahmed Sékou Touré est le premier présidentde la République de Guinée. Il le restera, de 1958 à 1984. Avant l'indépendance Sékou Touré est bloqué dans son ascension sociale et ne peut accéder aux postes de responsabilité auxquels il aspire et s'investit alors dans le syndicalisme. Il est élu à la mairie de Conakry en 1956 et reçoit le Prix Lénine pour la paix en 1961. Le Président mis en cause dans la mort d'Amílcar Cabral en 1973, subit destentatives de renversement. Craignant une intervention militaire de la France il se range dans le camp socialiste oscillant entre maoïsme et orthodoxie communiste.

Le Bénin a accédé à l'indépendance le 1er août 1960 en tant que République du Dahomey et pris son nomen 1975. Les pouvoirs furent transmis au président Hubert Maga par le ministre d'État français Louis Jacquinot. La capitale officielle est Porto-Novo, Cotonou étant la capitale économique. Ce pays est surnommé le Quartier latin de l'Afrique. Depuis la fin du régime marxiste-léniniste en 1989, le Bénin possède une image de pays démocratique dans toute l'Afrique subsaharienne.

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