Lecture in progress : Bellefleur (II). Le Manoir. Comme...

Publié le 18 février 2010 par Mmepastel






Lecture in progress : Bellefleur (II).

Le Manoir.

Comme tout bon roman gothique qui se respecte, le manoir des Bellefleur, construit en début de la deuxième moitié du XIXe siècle sur le sommet le plus élevé des monts Chautauquas, est un des personnages principaux de l’histoire.

C’est tout bonnement une folie de démesure qui fait jaser toute la région : “La splendeur du manoir, ses tours et ses murs crénelés en faisait un château gothique anglais dans son architecture globale, avec une certaine influence mauresque (…), d’une beauté sauvage, tentaculaire, jamais vue dans cette partie du monde. (…) Autour des immenses arcades et des fenêtres en encorbellement on se servit d’une pierre calcaire d’une teinte claire, formant un agréable motif en spirale. Le toit était recouvert de lourdes ardoises importées, mais par endroits des fragments de cuivre renvoyaient les rayons du soleil, donnaient l’impression qu’il brûlait sans se consumer. De l’autre côté du Lac Noir, à des kilomètres, le manoir prenait à certains moments de la journée des couleurs étonnantes, d’une beauté étrange -gorge-de pigeon, gris-rose, mauve, un vert pâle et lumineux. L’aspect pesant et funèbre des murs, des colonnes, des créneaux et des toits pentus se dissipait avec la distance : le manoir des Bellefleur devenait aérien, immatériel comme un arc-en-ciel aux couleurs palpitantes.”

L’intérieur est évidemment tout à l’avenant même s’il laisse le propriétaire insatisfait : “…quand le dernier manteau de cheminée en marbre blanc importé d’Italie fut en place, quand le dernier lustre d’or et de cristal, et les gravures, les mosaïques, les sculptures, les tentures et les boiseries que Raphaël avait désirés furent en sa possession… il regarda autour de lui, remontant son pince-nez d’un mouvement sec, et soupira avec résignation. Il l’avait construit : et maintenant il devait y vivre.”

Évidemment, avec le temps et le manque d’argent, le manoir se dégrada… Son petit fils “était très contrarié par l’aspect du cimetière, où les belles stèles anciennes en marbre, en albâtre et en granit, et surtout le mausolée de Raphaël, avec ses admirables colonnes corinthiennes, se trouvaient dans un état déplorable. Mourir et être enterré là !… Et les morts négligés de la sorte risquaient de se venger !…”

Photos de Simon Marsden.