La production anniversaire de la 30e saison de l’Opéra de Montréal – La Tosca…de Scarpia

Publié le 06 février 2010 par Turp

6 février 2010 (No 2010-04)

Greer Grimsley (Tosca) et Nicola Beller Carbone (Tosca) Tosca- Opéra de Montréal (2010)

« TOSCA », opéra en trois actes, livret de Giuseppe Giaocosa et Luigi Illica et musique de Giacomo Puccini (1892) Production: Opéra de Montréal. Salle Wilfrid-Pelletier de la Place des Arts. Première samedi soir. Autres représentations: 3, 6, 8, 11 février à 20 h et 13 février 2010 à 14 h. Avec surtitres français et anglais. Distribution: Tosca : Nicola Beller Carbone, soprano; Cavaradossi : David Pomeroy, ténor; Scarpia : Greer Grimsley, baryton-basse; Angelotti : Stephen Hegedus, baryton-basse; Le Sacristain : Alexandre Sylvestre, baryton-basse; Spoletta : Aaron Ferguson, ténor; Sciarrone : roy Del Valle, baryton; Un geôlier : Pierre Rancourt, baryton; Un pâtre : Suzanne Rigden soprano. Mise en scène: Michel Kavanagh; Décors: Jean-Pierre Ponelle; Costumes: Opéra de Montréal-Malabar; Éclairages: Anne-Catherine Simard-Desraspe; Choeur de l’Opéra de Montréal (dir. Claude Webster) et Orchestre métropolitain de Montréal. Direction musicale: Paul Nadler.

L’Opéra de Montréal continue sur sa belle lancée en cette saison de son trentième anniversaire ! Après les succès de I Pagliacci/Gianni Schicchi et de la Flûte enchantée, sa production de Tosca, dont on présentait la première samedi le 30 janvier 2010 à la Place des Arts de Montréal, est une autre belle réussite. Accueilli avec enthousiasme par un public qui avait rempli la salle Wilfrid-Pelletier à pleine capacité et avait pu entendre les directeur général Pierre Dufour et le directeur artistique Michel Beaulac lui témoiner son appréciation, le troisième opéra au programme de la saison 2009-2010 doit son succès à une performance exceptionnelle du baryton-basse Greer Grimsley dans le rôle de Scarpia.

La Tosca de 2010 à Montréal sera celle de Scarpia. La voix et le jeu du chanteur américain dont le talent avait été révélé ici dans la production du Château de Barbe-bleue de Bela Bartok en 2004 auront été d’une rare intensité et d’un bouleversant réalisme. Greer Grimsley a pleinement habité ce personnage et a su démontrer pourquoi Scarpia est considéré comme l’une des grandes figures du théâtre lyrique. De son entrée en scène et son Te Deum au premier acte jusqu’à son assassinat par Tosca à la fin du deuxième acte, Grimsley incarne le pouvoir et la déchéance du pouvoir d’une façon que n’auraient désavoué ni Victorien Sardou et les librettistes Giacosa et Illica, ni Giacomo Puccini dont la musique a fait de Scarpia le moteur de son drame romantique. La production montréalaise de Tosca mérite d’être vue pour tous les passionnés d’art total pour la seule performance de Greer Grimsley.

David Pomeroy en Cavaradossi et Nicola Beller Carbone en Tosca participent également au succès de cette production. La voix du ténor canadien est juste et détient la puissance que requièrent les airs Recondita armonia et E leucevan stelle qu’il rend avec conviction et dont la prestation gagne en lyrisme pendant le cours de l’opéra. S’agissant de Tosca, les attentes sont toujours grandes, et l’étaient d’autant pour la soprano gemano-italienne Nicola Beller Carbone que Michel Beaulac avait décrit celle-ci à Réjean Beaucage du journal Voir en ces termes : « Ce n’est pas simplement une chanteuse d’opéra, c’est aussi une tragédienne lyrique, le jeu théâtral est primordial pour elle. Elle fait penser à Maria Callas.». Comme Callas, elle est sans conteste une tragédienne et confère à la théâtralité une valeur importante. Mais, sa gestuelle parfois excessive dérange et nuit à son jeu théâtral. En revanche, la voix est belle et son interprétation du célèbre air Vissi d’arte, vissa d’amor au deuxième acte révèle sa force dramatique.

Dans le rôle du sacristain, Alexandre Sylvestre démontre de belles habiletés vocales et se distingue du reste de la distribution. En revanche, le personnage que le metteur en scène lui demande d’incarner est nettement trop caricatural et divertissant. Stephen Hegedus se tire bien d’affaire, tant au plan vocal que dramatique, lors du premier acte, mais on ne peut dire autant d’Aaron Ferguson et du baryton-basse Roy del Valle dont les voix et le jeu ne rendent pas justice aux personnages Spoletta et Sciarrano. Tout en ne remettant pas en cause l’idée de faire appel aux stagiaires de l’Atelier lyrique de Montréal pour ses productions, l’Opéra de Montréal devrait se montrer à cet égard prudente si elle veut atteindre les standards d’excellence que la compagnie s’est fixée.

Sous la direction du chef américain Paul Nadler, l’Orchestre métropolitain s’est bien acquitté de sa responsabilité de démontrer que Puccini avait réussi à faire de la pièce de Victorien Sardou un drame musical, si ce n’est que le prélude du troisième acte, et l’exposition de l’hymne d’amour les cors, qui n’est guère convaincant. Le metteur en scène canadien Michel Cavanagh offre de beaux moments théâtraux, et je pense en particulier aux finales des premier et deuxième actes dont les effets dramatiques sont très réussis. Conçus à l’origine pour une production de l’Opéra de San Diego, les décors du regretté Jean-Ponnelle sont beaux, mais deux réserves s’imposent : le tableau de Marie-Madeleine qui ne révèle pas l’art à son meilleur, mais attire pourtant trop l’œil du spectateur et la configuration de la plate-forme du castel Sant-Angelo qui choque l’œil quant à elle.

Après cette Tosca de Scarpia, l’Opéra de Montréal et son Atelier lyrique nous invitent à poursuivre la célébration du 30e anniversaire en présentant une nouvelle production de l’opéra Nelligan d’André Gagnon et Michel Tremblay. Les cinq représentations sont prévues pour les 6, 8, 10, 11 et 13 mars 2010 et auront lieu au Monument national.

Note : Lire aussi, en cliquant sur le nom du journal, les autres critiques de Tosca par Claude Gingras (La Presse), Christophe Huss (Le Devoir) et d’Arthur Kaptanis (The Gazette). Et dans la dernière livraison de La Scena musicale, dont vous pourrez télécharger une version électronique en cliquant ici, vous pourrez lire plusieurs articles sur la production montréalaise, et notamment la présentation de l’aria du mois Vissi d’arte, vissi d’amore, le profil du ténor David Pomeroy et une discographie commentée de Tosca par Joseph K. So (p. 18 et 19). Et vous pourrez également lire l’article d’Hélène Boucher sous le titre « De l’apéro à l’Opéra…à Tosca – Annie Sanschagrin » (p. 20).

Et le Simon Boccanegra…de Placido Domingo

Après la nouvelle production de Carmen dirigée par « notre » Yannick Nézet-Séguin que j’ai présentée et commentée dans les deux premiers numéros du présent blogue lyrique, le Metropolitan Opera de New York sera de retour sur les écrans du monde le samedi 6 février 2010 avec Simon Boccanegra de Giuseppe Verdi. Le ténor Placido Domingo, métamorphosé en baryton,  interprétera le rôle Simon Boccanegra et seront également de la distribution Adrienne Pieczonka (Amelia), Marcello Giordani (Gabriele) et James Morris (Fiesco). James Levine sera de retour au pupitre de l’Orchestre du Metropolitan Opera et la mise en scène de cette autre nouvelle production du MET a été confiée à Giancarlo del Monaco.

Pour en savoir davantage sur la production de Simon Boccanegra qui sera diffusée sur les écrans (et radiodiffusée également), du monde entier, voir l’article qui lui est consacré par le site électronique du magazine lyrique du MET Opera News on line en cliquant ici.


Placido Domingo
Simon Boccanegra- Metropolitan Opera (2010)

Les 30 ans de l’Opéra de Montréal et le baryton Florian Boesch à la Société musicale André-Turp

La Société musicale André-Turp se prépare pour une semaine bien remplie. Elle célébrera à sa façon les 30 ans de l’Opéra de Montréal en associant des artisans de l’Opéra de Montréal à son brunch de la phonotèque qui aura lieu au Café d’art vocal (1223, rue Amherst) le dimanche 7 février 2010 à 11 h 30. Elle a préparé pour l’occasion un programme musical d’extraits inédits. La Société présentera pa ailleurs pour la première fois au Québec et au Canada le baryton autrichien, Florian Boesch, une figure émergente des scènes européennes. Depuis ses débuts en 2003 à l’Opernhaus de Zürich dans le rôle de Papageno, Florian Boesch s’est imposé comme l’un des barytons les plus polyvalents de sa génération et est particulièrement admiré dans l’opéra baroque. Pour ses débuts ici, Florian Boesch interprétera des lieder de Franz Schubert et de Robert Schumann. Il sera accompagné au piano par Roger Vignoles qui est reconnu comme un des plus brillants pianistes de sa génération. Le récital aura lieu à la salle Redpath le mercredi 10 février 2010 à 19 h 30. Le public est également invité à une classe de maître que M. Vignoles offrira à la Maison des Jeunesses musicales du Canada le jeudi 11 février à 13 h. Cette classe est produite en collaboration avec l’Atelier lyrique de l’Opéra de Montréal. Pour l’ensemble des activités- aussi nombreuses qu’intéressantes- de la saison d’hiver 2010 au Café d’art vocal, cliquez ici.


Florian Boesch

L’opéra harpe et voix avec Sara Beaudet et Les Muses

Les Muses : Sara Beaudet (soprano) et Véronique Couturier (harpe)
(Photo: Maya-Alarie Photo)

De l’opéra, il y en aura aussi à Laval où Les Muses, dont la formation en duo est composée de la soprano Sara Beaudet et de la harpiste Véronique Couturier, présenteront un concert le 12 février prochain. La chanteuse lavalloise, qui a complété sa maîtrise en chant classique à l’Université de Montréal, interprétera de airs de Giacomo Puccini, Richard Strauss, Pietro Mascagni et Jacques Offenbach. Ce concert aura lieu le vendredi 12 février à 20 h en l’Église Sainte-Rose de Lima (219, boulevard Ste-Rose), dans le cadre de Sainte-Rose en blanc. Pour lire un article consacré à ce concert dans Le Courrier de Laval, cliquez ici.

De l’Opéra sur ARTV

ARTV offre à ses auditeurs un cycle opéra depuis lundi le 1er février 2010 dans le cadre de son émission Les Grands spectacles qui est diffusée le lundi soir à 20 h 35. Le cycle a commencé lundi dernier, mais sur la recommandation du critique Christophe Huss qui,  dans une chronique aussi vitriolique qu’amusante publiée de l’Agenda du journal Le Devoir du 30 janvier dernier,  présentait le film comme étant « La Flûte désanchantée ? », je me suis abstenu d’écouter le premier film-opéra du cycle. La diffusion, le lundi 8 février à compter de 20 h 35, de La Bohème de Giacomo Puccini, dans une réalisation de Robert Dornheim mettant en scène Anna Netrebko dans le rôle de Mimi et Rolando Villazon dans celui de Rodolfo, devrait susciter l’intérêt des lyricomanes. Si votre agenda ne vous permet pas de voir le film le lundi 8 février, il sera rediffusé le  mardi 9 février à 14 h et , pour les oiseaux et oiselles de nuit, le lundi 15 février à 1 h 30. Il peut même être visionné sur le site youtube en plusieurs parties, la première partie étant accessible en cliquant ici. Et il y a toujours la bande sonore du film paru chez Deutsche Gramophon qui, selon la maison de disques, montre que « les étincelles volent dans La Bohème ». Vous pouvez écouter des extraits de cet enregistrement en cliquant ici.

Et s’agissant de la suite du cycle, la diffusion le lundi 15 février suivant de la production du Roméo et Juliette de Charles Gounod du Festival de Salzbourg dirigée par Yannick Nézet-Séguin pourrait vous intéresser.

Je vous souhaite une agréable semaine lyrique…et vous reviens la semaine prochaine avec un entretien avec l’autre Tosca de la production du 30e anniversaire de l’Opéra de Montréal et lauréate d’Apéro à l’Opéra :  Annie Sanschagrin !

PS Et pour celles et ceux qui aiment la soprano française Natalie Dessay, l’animateur d’Espace musique, Mario Paquet, m’a signalé la parution dans le journal français Le Figaro, de propos recueillis par Nicolas d’Estienne d’Orves sous le titre « Natalie Dessay, somnambule mais lucide ».