Le Luxembourg (André Dumas)

Par Arbrealettres


… Et c’est l’heure où, quittant leurs retraites, les Muses
Qu’effarouchent le jour, et la foule, et le bruit,
Profitent du silence amical de la nuit
Pour s’en venir rôder sous les branches confuses.

Elles vont, viennent, jouent, traversent un sentier,
S’arrêtent sous les yeux indulgents de Banville,
Vont distraire un moment de son rêve tranquille
Le bon Watteau perdu dans le jardin fruitier.

Ou, pieds nus, le corps ceint d’écharpes agrafées,
Elles glissent autour des parterres fleuris.
Mais Banville et Watteau ne sont pas trop surpris
Ayant toujours vécu dans le pays des fées.

Verlaine songe à des paysages choisis.
La Velléda sourit à la nuit enchantée.
Et, quittant leur fontaine, Acis et Galatée
Echappent au Titan qui fronce les sourcils.

… Et j’attends, et j’écoute, et j’épie, enivré
Par les tièdes senteurs qui montent des charmilles.
Tout rêve, et le fait seul d’en avoir clos les grilles
Du parc inaccessible a fait un bois sacré.

(André Dumas)