voilà des critiques de théâtre sur Macbeth et sur Miserables

Publié le 05 février 2010 par Nathpass
2 critiques de théâtre 2 blogs qui ont le mérite d'être. Intelligence culture sensibilité sincérité sens de l'observation aigu ces hommes là auraient pu être comédiens... ils ont choisi d'être écrivains dans l'ombre pour décrire la lumière.
Joshka Schidlow : Allegro théâtre et Gilles Costaz sur Webthea
MACBETH
William Shakespeare / Declan Donnellan
« La vie n’est qu’une ombre en marche, un pauvre acteur qui s’agite pendant une heure sur la scène et alors on ne l’entend plus ; c’est un récit conté par un idiot, plein de son et de furie, ne signifiant rien. »

Spécialiste de théâtre élisabéthain et en particulier de Shakespeare, le metteur en scène anglais Declan Donnelan s'attaque aujourd'hui à sa tragédie la plus courte mais aussi la plus compacte et la plus sombre. Le décor est souvent chez cette sommité de la scène totalement inexistant. Il est ici d'une superbe austérité. Les comédiens sont tous vêtus de noir et comme il s'agit d'une machination que a pour cadre l'Ecosse le développement complexe de l'intrigue est entrelardé de chansons et de danses au rythme entraînant de cette région du Royaume pas encore Uni.
Le roi a décidé de venir passer une nuit chez les Macbeth qu'il considère comme des fidèles. Averti de cette décision le couple se transforme en association de criminels. Profitant du sommeil du souverain, ils l'égorgent donnant ainsi raison aux sorcière qui avaient prédit que Macbeth ceindrait un jour, à son tour, la couronne. Contrairement à la tradition ces prophétesses de malheurs n'ont en rien l'air de sortir des enfers. Macbeth, à présent maître du jeu, se transforme en tyran sanguinaire et se fait d'innombrables ennemis. La nuit ne tarde à entrer dans les tréfonds des deux meurtriers tandis que leurs adversaires préparent leur perte, L'esprit de Lady Macbeth flotte bientôt à la frontière de la raison. Une scène de somnambulisme au milieu des gens de la cour cour distille une angoisse à laquelle succombe les témoins de cet accès de culpabilité.
Entourés de compagnons musclés dont les mouvements font songer à une chorégraphie, Macbeth sans cesse soliloque. Et c'est tout l'horrible si bien partagé de la condition humaine qui transparaît à travers ses paroles. La majesté et la démence shakespearienne ont rarement été aussi présents sur un plateau. Declan Donnelan s'est emparé de cette pièce que beaucoup jugent maudite car les personnages principaux ne sont mus que par le mal et en a, comme des cinéastes de l'importance d'Orson Welles, Akira kurosawa et Roman Polansky, tiré un chef d'œuvre.
Jusqu'au 21 février Les Gémeaux tel 01 46 61 36 37 Du 3 au 6 mars Théâtre des Célestins (Lyon) du 19 Au 22 mai Théâtre du Nord (Lille) Publié par Joshka Schidlow
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Misérables de Victor Hugo
Concentré de génie
Paris - Lucernaire jusqu’au 30 mars 2010
C’est l’équipe gagnante du Lucernaire. Elle avait triomphé avec Délivrez Proust et Beaucoup de bruit pour rien de Shakespeare, librement malaxés par Philippe Honoré et joyeusement mis en scène par Philippe Person. Tellement gagnante que Philippe Person vient d’être nommé directeur artistique de ce théâtre très alternatif dans le concert parisien. Cette fois, le défi est aussi difficile que face à Proust : faire tenir Les Misérables dans une heure et quelques minutes de théâtre ! Honoré et Person ont choisi la solution des faisceaux. Certes, les acteurs disent et jouent des extraits du roman, mais ils en sortent parfois pour le commenter, citer tel point de vue, tourner le texte sous divers éclairages, avant de reprendre l’histoire, de rebondir de la transformation du forçat Jean Valjean en bourgeois traqué par l’inspecteur Javert, du domicile des méchants Thénardier à la rue où Gavroche chante sur sa barricade : « Je suis tombé par terre, c’est la faute à Voltaire », des débuts à la conclusion de l’idylle qui se noue entre les charmants Marius et Fantine. La scène de planches est entre le forum, le champ de foire et le cabaret. Chaque acteur peut se replier dans une espèce de chaire auréolée d’ampoules – hommage au music-hall et aux lumières des coulisses - mais, le plus souvent, situé sur le plateau au gré d’une action toujours renouvelée et de personnages différents dont il faut endosser l’habit et l’esprit sur-le champ. Anne Priol, actrice au jeu si raffiné, assure toutes les féminités du livre avec l’émotion et la drôlerie dont elle a une palette infinie. Emmanuel Barrouyer se permet plus de parodies : il sait avec précision passer du décalage comique – en subtil bouffon d’aujourd’hui - à la gravité, du numéro personnel à la fusion dans le jeu collectif. Philippe Person joue moins, assure la continuité romanesque en prenant en charge le texte dans sa structure et son avancée ; mais il sait aussi s’interrompre pour être plusieurs personnages, fugitivement. Bien sûr, il n’y a là pas tout le roman mais son goût inimitable, son style, ses parfums, ses passions, son génie. On ne peut rêver meilleure entrée en terre hugolienne.
Misérables, librement inspiré du roman de Victor Hugo par Philippe Honoré, mise en scène de Philippe Person, décor de Vincent Blot, costumes d’Emmanuel Barrouyer et Anne Priol, lumières d’Alexandre Dujardin, avec Anne Priol, Emmanuel Barrouyer et Philippe Person. Lucernaire, tél. : 01 45 44 57 34, jusqu’au 30 mars (1 h 15).

crédit photographique/ Vincent Blot
Le dimanche 31 janvier 2010