Streaming: Justin.tv & Co dans la ligne de mire de la lutte anti-piratage

Publié le 09 mars 2010 par Sportbusiness360
La flamme olympique s'est éteinte sur Vancouver. Surprise, cette année, toutes les épreuves étaient également diffusées en temps réel (« streaming ») sur Internet par de nouvelles générations de portails vidéo, et ce, sans qu'ils aient déboursé le moindre euro… Des sites qui proposent du contenu vidéo en direct et non en différé comme Dailymotion ou YouTube. Le plus populaire se nomme Justin.tv. Conçu à l'origine pour offrir aux internautes la possibilité de créer leur webtélé, il est utilisé aujourd'hui par de nombreux internautes pour diffuser les programmes des chaînes de télévision en direct plutôt que de produire les leurs. Ce sont souvent des fans de football qui piratent les matchs de leurs équipes préférées en les numérisant sur leur PC. Bilan, la plupart des rencontres de Ligue 1 sont ainsi disponibles gratuitement sur le Net et en direct. Une aubaine pour les accros au ballon rond qui ne sont plus obligés de s'abonner à des chaînes cryptées. Du côté de Canal+ ou d'Orange Sport, qui ont lourdement investi pour acquérir l'exclusivité de la diffusion auprès de la Ligue de football professionnel (LFP), difficile d'évaluer le préjudice subi. « Nous ne souhaitons pas en parler et faire la promotion du piratage. Le streaming reste un épiphénomène », martèle un responsable d'Orange. Pourtant, plus de 914.000 visiteurs uniques, selon ComScore, se sont connectés sur Justin.tv en janvier 2010. « Justin.tv est encore loin des 12 millions de visiteurs mensuels d'un Dailymotion, mais l'engouement est bel et bien là », assure Delphine Gatignol, directrice de ComScore. Du côté des chaînes de télévision ou des instances sportives, si l'on préfère garder le silence, on ne reste pas les bras croisés en menant des actions en justice. Le site Soccers.fr, qui donnait des liens pour regarder des compétitions en direct, a été ainsi condamné en juillet par le tribunal de grande instance de Paris à les retirer. « Faire la promotion du streaming est désormais répréhensible », se félicite un proche du dossier. Une jurisprudence française qui n'a à ce jour aucun effet sur les sites dont les serveurs sont basés à l'étranger comme Justin.tv, implanté aux Etats-Unis. Une impuissance qui souligne au passage l'inefficacité de la loi Hadopi, élaborée pour lutter contre les téléchargements et non contre le « streaming ». Des solutions techniques existent pourtant. « Nous avons développé en collaboration avec la Ligue de football professionnel et l'Institut national de l'audiovisuel une empreinte numérique », déclare Giuseppe De Martino, directeur juridique et réglementaire de Dailymotion. « Elle nous permet d'analyser en temps réel le flux d'images diffusées par nos internautes et de détecter si l'un d'entre eux met en ligne les buts de son équipe préférée, afin que nous puissions les retirer immédiatement. » Du côté de Justin.tv, on se défend de laisser faire. « Nous travaillons étroitement avec des centaines d'ayants droit, assure Evan Salomon, vice-président marketing du site de diffusion de vidéos. Nous avons aussi développé notre propre technologie d'empreinte numérique pour filtrer le contenu diffusé en direct sur notre site. » De plus, depuis cet été, l'accès aux vidéos est impossible si plus de 2.000 internautes français regardent simultanément la même. Pour les consulter, il faut alors débourser 9 dollars par mois. Force est de constater que les utilisateurs de Justin.tv continuent à diffuser régulièrement des épreuves sportives, quand ce ne sont pas des longs-métrages… « Pour les sites de streaming, diffuser des contenus illégaux, c'est un moyen de développer facilement une audience, analyse Delphine Gatignol. Mais elle ne favorise pas la venue d'annonceurs qui ne souhaitent pas être associés au piratage. A terme, ces sites n'auront d'autres choix que de filtrer eux-mêmes leurs contenus s'ils souhaitent être monétisables. C'est ce qu'ont été obligés de faire en leur temps Dailymotion ou Youtube… ». Quant aux portails vidéo qui n'ont pas pignon sur rue et qui sont basés dans des paradis fiscaux, la bataille se montre plus rude. « Pour y parvenir, il nous faudrait travailler étroitement avec tous les opérateurs Internet pour analyser les flux des internautes, remarque un proche de la LFP. C'est possible, la Chine le fait bien… Mais on n'a pas forcément envie que la France adopte les méthodes chinoises ! » [Via]