Sonnet aux Poètes (José-Maria de Heredia)

Par Arbrealettres


Il faut fuir les sentiers frayés par le Vulgaire,
Poète, il faut lever plus haut votre regard;
Sans souci des humains, votre âme solitaire,
Doit donner sa ferveur et son amour à l’art.

Que peut vous importer la faveur populaire?
La fortune est un jeu; la gloire est un hasard;
La popularité n’est qu’une ombre éphémère;
Vous aurez, ô poète, une meilleure part.

Vous aimerez d’amour la sublime science,
Votre gloire sera votre conscience,
Et vous serez heureux de votre obscurité:

Car c’est une secrète et noble volupté
De pouvoir sans témoin, enivré d’espérance,
Contempler dans son coeur l’idéale Beauté.

(José-Maria de Heredia)