The Besnard Lakes – Are the Roaring Night [2010]

Publié le 14 mars 2010 par Feuavolonte @Feuavolonte

The Besnard Lakes
Are the Roaring Night

Jagjagwar
Canada – Québec
Note : 8.5/10

Considérant que le deuxième album d’un groupe est, bien souvent, celui qui confirme ou infirme leur talent musical, on peut affirmer que The Besnard Lakes avait, avec Are the Dark Horse, livré la marchandise au-delà des attentes. Et pour leur troisième opus, le désormais quatuor a décidé d’emprunter la voie de la continuité. Et si les guitares lourdes, les cordes aériennes, les voix atmosphériques et les ambiances psychédéliques sont choses communes, Are the Roaring Night s’impose parmi la masse grâce à sa finesse de composition implacable.

L’album débute par un crescendo tourbillonnant et assourdissant, qui se termine sur Like the Ocean, Like the Innocent Pt 2: The Innocent et une voix hautement perchée. Une batterie lente s’ensuit et installe une ambiance brumeuse découlant de la pièce d’introduction. Ce train avance jusqu’au refrain, où embarque une guitare opaque digne des meilleurs moments de Ride. S’entremêlent les voix d’Olga Goreas et Jace Lasek, le tout dans une éruption psychédélique spontanée.

Le principal trait qui sépare Are the Roaring Night de son excellent prédécesseur consiste en l’influence du shoegaze sur les compositions et les arrangements. Lorsque le disque ultérieur s’envolait vers des nuages de fumée noire éclatée ou des contrées émotives oppressantes, celui-ci demeure beaucoup plus carré et structuré que le précédent. On sent cette nuance sur Albatross, où les guitares, la batterie et la basse ne s’échappent pas du tempo ni de la convention mélodique signée dès le début de la chanson. Ce qui ne l’empêche en rien de constituer une vraie perle grâce à des nuances sonores entre l’influence de Swervedriver et de The Flaming Lips.

La fixation shoegaze du quatuor se ressent aussi sur Glass Printer, avec des sonorités de guitares bourrées de distorsion et d’effets de modulation. L’instrument à 6 cordes le plus populaire du monde est donc mis de l’avant sur la majorité des chansons, ce qui n’empêche pas la batterie de jouer son rôle de chien de garde rythmique nuancé. Les percussions demeurent infiniment mesurées et jamais les tambours ne résonnent sans raison.

L’objectif des Montréalais s’affiche clairement avec Are the Roaring Night : toucher le coeur du public en le transportant dans un voyage au fond d’un monde troublé et difficile à percer. Land of Living Skies Pt.2: The Living Skies ressuscite les envolées philosophiques des années 70, alors que And This is What we Call Progress déboule sur ses percussions incessantes, comme une armée en marche, sur lesquels se greffent des interventions de guitares à trémolo et distorsion. Pas vraiment de refrain, pas de structure pop préétablie, simplement une intervention musicale issue d’un processus créatif rempli de surprises et d’originalité.

Le contenu musical de Are the Roaring Night est à l’image de la pochette du disque : éthéré, opaque, brûlant et, encore une fois, racontant une histoire d’espionnage troublante. Une réussite complète pour ces puissants musiciens de la métropole québécoise, et possiblement l’album québécois qui passera dans l’ombre cette année.