Le duel Nico-Sarko

Publié le 21 mars 2010 par Jlhuss

Les Régions perdues pour la droite ? Tout l’annonce. Vérification dans quelques heures. Disons plus justement que les Régions, perdues par Chirac, n’auront pas été regagnées par Sarkozy. Comment auraient-elles pu l’être ? Mais déjà d’une élection l’autre : les Régions sont mortes, vive l’Hexagone, avec, dans la Coupe de l’Elysée-2012, le « duel Nico-Sarko ».

Les Régionales ? Dans un scrutin si fumeux, il aurait fallu, pour renverser la vapeur, que  les Conseils sortants fassent badaboum, par exemple en construisant des lycées sur des voies de TER. Les électeurs leur sont reconnaissants d’avoir « plutôt bien géré », mais sans savoir au juste ni leurs noms ni avec quels moyens ni ce qui relevait de leur compétence : pourquoi donc changer une équipe non pas à proprement parler « qui gagne », puisqu’on n’a pas capté la règle du jeu, mais une équipe qui au moins n’a pas déraillé. L’explosion de la fiscalité locale ? Ah bah ! si c’est pour «  faire des choses »…
Il aurait fallu aussi que la gauche nationale soit totalement décrédibilisée ; que madame Aubry, après avoir grignoté dans le plat royal à Reims, ait picoré la tartiflette des pauvres à Lille, sablé le champagne avec le pourfendeur des sous-hommes, organisé des noubas rue de Solférino, tout pour la Valls et rien dans le Peillon. Or elle semble un peu mieux tenir son monde…et son look. Jolie photo de famille. Les sicaires ont rangé poliment les couteaux : chaque chose en son temps.
Il aurait surtout fallu, pour reconquérir les Régions, que la réussite du gouvernement soit incontestable, et que le Président Sarkozy, « jeune, beau, traînant tous les cœurs après soi », arpente les foules en liesse en lançant les bonbons de ses succès. Hélas ! à ce point du mandat, les bonbons sont au poivre et les sales gosses vous les recrachent au nez. Trop heureux si saint Nicolas sauve l’Alsace…

Donc, les Régions perdues. Et après ? Après, la France, c’est-à-dire  l’Elysée. Qui franchira la Grille du coq dans deux ans ? Ce sera la question dès lundi, dans le maelström du quinquennat. Autre formulation : Nicolas Sarkozy -qui vraisemblablement se représentera (sauf bouleversement personnel)- saura-t-il retrouver la force d’entraînement et le pouvoir de séduction qui l’ont fait triompher en 2007 ?
A bientôt trois cinquièmes du mandat et en dépit d’un travail réformateur audacieux, la hargne redoublée de ses adversaires et le désenchantement croissant de ses partisans sèment le doute. Certains croient d’ailleurs pouvoir diagnostiquer, renforçant le trouble, comme une lutte au sommet, entendez dans la tête  même du personnage. Nicolas et ses tensions, ses pulsions ; Sarkozy et sa raison, sa force. Nico et Sarko sont dans un bateau, Nico tombe à l’eau, qu’est-ce qui reste ?

Au passif de Nico :
1. l’usage immodéré de la présence et de la parole, sur tout et sur rien, au prix d’un discours à la rhétorique usée : on ne l’entend plus ;
2. l’étouffement de bons ministres, compétents et médiatiques, qui auraient pu chacun expliquer clairement dans son domaine les objectifs et la méthode ;
3.  la chimère de l’ouverture, qui ne fait gagner aucune reconnaissance au-dehors et sème la rancœur à la maison ;
4.  des manières rugueuses qui hérissent.

A l’actif de Sarko :
1. l’énergie, l’irrépressible envie d’agir, d’empoigner le réel -et le pire pourrait être la pause prématurée, aveu du doute au milieu du gué ;
2. le courage de tenir le cap du projet malgré une crise financière et économique soudaine qui vous prend à contre-pied  -mais le pire serait de changer maintenant sur le fond ;
3. le punch et le sens de la manœuvre qui permettent la ressaisie devant l’obstacle, à bonne école d’un Mitterrand ou d’un Chirac ;
4. le sentiment, ancré malgré tout dans l’opinion, qu’il n’y a pas actuellement d’adversaire « au niveau » .

Le duel Nico-Sarko ?  Ex aequo, balle au centre. Ou plutôt centre-droit, qui reste, contre vents et marées, la sociologie prégnante du pays profond  ; mais centre aéré, dans un pays qui veut le beurre et l’argent du beurre, l’action et la récréation, l’autorité du père et la tendresse de la maman. Si Nico et Sarko se réconciliaient et jouaient en double, l’équipe adverse n’aurait qu’à bien se tenir.

Arion