Application d'un arrêté d'un péril au voisin de l'immeuble qui menace ruine

Publié le 24 mars 2010 par Christophe Buffet

Voici un tel cas particulier :
"Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 7 juillet et 6 octobre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNE DE CLERMONT-FERRAND, représentée par son maire ; la COMMUNE DE CLERMONT-FERRAND demande au Conseil d'Etat :


1°) d'annuler le jugement du 30 avril 2008 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a, sur la demande de Mme Colette A, annulé l'arrêté du 24 juillet 2007 par lequel son maire a mis en demeure M. et Mme A d'effectuer des travaux de confortation du mur séparant les caves des immeubles sis 24 et 24 bis rue des Gras ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la demande présentée par Mme A devant le tribunal administratif de Clermont-Ferrand ;

3°) de mettre à la charge de Mme A la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la construction et de l'habitation ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Emmanuel Vernier, chargé des fonctions de Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Monod, Colin, avocat de la COMMUNE DE CLERMONT-FERRAND et de Me Odent, avocat de Mme A,

- les conclusions de M. Jean-Philippe Thiellay, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Monod, Colin, avocat de la COMMUNE DE CLERMONT-FERRAND et à Me Odent, avocat de Mme A ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de la construction et de l'habitation : Le maire peut prescrire la réparation ou la démolition des murs, bâtiments ou édifices quelconques lorsqu'ils menacent ruine et qu'ils pourraient, par leur effondrement, compromettre la sécurité ou lorsque, d'une façon générale, ils n'offrent pas les garanties de solidité nécessaires au maintien de la sécurité publique, dans les conditions prévues à l'article L. 511-2.... ; qu'aux termes de l'article L. 511-2, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 15 décembre 2005 relative à la lutte contre l'habitat insalubre et dangereux : I. - Le maire, à l'issue d'une procédure contradictoire dont les modalités sont définies par décret en Conseil d'Etat, met le propriétaire de l'immeuble menaçant ruine (...) en demeure de faire dans un délai déterminé, selon le cas, les réparations nécessaires pour mettre fin durablement au péril ou les travaux de démolition, ainsi que, s'il y a lieu, de prendre les mesures indispensables pour préserver les bâtiments mitoyens (...) ; que, lorsqu'un immeuble ou une partie d'immeuble présente un état de dégradation entrant dans le champ d'application des dispositions de l'article L. 511-1, le maire peut prendre à l'encontre du propriétaire de cet immeuble ou partie d'immeuble l'arrêté de péril prévu par le I de l'article L. 511-2 alors même que l'immeuble ou partie d'immeuble serait le soutien d'un immeuble appartenant à un autre propriétaire et que le risque pour la sécurité résulterait de l'effondrement de ce dernier immeuble ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. et Mme A d'une part, et la COMMUNE DE CLERMONT-FERRAND d'autre part, sont respectivement propriétaires de deux immeubles sis 24 et 24 bis rue des Gras ; que, par un arrêté du 24 juillet 2007 pris sur le fondement du I de l'article L. 511-2, le maire de Clermont-Ferrand a mis en demeure M. et Mme A de faire des travaux de réparation du mur mitoyen porteur situé dans la cave des 24 et 24 bis rue des Gras ; que, par un jugement du 30 avril 2008, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé cet arrêté au motif que l'arrêté ne pouvait être légalement pris à l'encontre de M. et Mme A dès lors que les travaux de réparation du mur qu'il prescrivait étaient uniquement destinés à rétablir la solidité du 24 bis appartenant à la commune
; qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que le tribunal administratif, auquel il appartenait de rechercher, au besoin par une question préjudicielle, si M. et Mme A étaient, à la date de son jugement, copropriétaires de la partie d'immeuble sur laquelle portaient les travaux prescrits par l'arrêté de péril afin de déterminer si le maire pouvait légalement mettre ainsi à leur charge la partie des travaux correspondant à leur part de copropriété, s'est fondé sur un motif erroné en droit ; que dès lors, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, la COMMUNE DE CLERMONT-FERRAND est fondée à demander l'annulation du jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 30 avril 2008 ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la COMMUNE DE CLERMONT-FERRAND la somme que demande Mme A ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A la somme que demande la commune de Clermont-Ferrand au titre des mêmes dispositions ;

D E C I D E :


Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 30 avril 2008 est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Clermont-Ferrand.

Article 3 : Le surplus des conclusions du pourvoi de la COMMUNE DE CLERMONT-FERRAND est rejeté.

Article 4 : Les conclusions de Mme A tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à Mme Colette A et à la COMMUNE DE CLERMONT-FERRAND."