Anthologie permanente : Pierre Dhainaut

Par Florence Trocmé

De Pierre Dhainaut, les éditions Arfuyen ont récemment publié Plus loin dans l’inachevé. Ce livre a reçu le Prix de littérature Jean Arp 2010. 
NUIT DOUBLE 
 
Dormir, s’abandonner au pouvoir 
d’un seul flot, que ce soit air ou lame, 
qu’il porte vers le jour, mais trop souvent on se détourne. 
À travers la poitrine y aurait-il à surprendre 
un secret comme à travers la ville ? Ces cris, 
gémissements, ricanements, ceux des oiseaux de mer, 
surgissant par à-coups, pour quelle raison 
qui reste enfouie ? Que rien ne fasse obstacle, 
ni angoisse, ni hâte, on en serait plus que l’écho 
en leur offrant l’espace où le sens se révèle, 
se régénère, l’instant redevient augural.  
ACTES DE PASSAGE 
 
Plus que les mains, les poings 
déjà serrés, aussi rêches 
que des pierres, 
l’énergie qui s’amasse, 
incontrôlable, 
pourquoi serait-elle 
seulement la nôtre, 
pourquoi la diriger 
contre nous, harcelant 
les yeux ? que s’atténue 
la charge, nous insistons,  
la nuit dense, la nuit 
ne peut être close, 
ni ce que définit un corps, 
approfondir, 
jusqu’où le faire, jusqu’où, 
sinon cette douleur soudain ?  
OISEAUX D’ICI 
 
Rieuses, dit-on de ces mouettes 
tête noir et bec rouge, 
d’autant plus blanches 
lorsque les ailes se déploient 
sur la digue, sur le port, 
sans trêve, le vent, 
le vent est favorable 
à la véhémence 
de la trajectoire, à l’acuité 
du cri : elles gravissent l’air, 
elles s’y précipitent, là-même 
où nous ne voyons rien, 
quelle était 
leur victime ? cette clameur 
de vagues qui s’abattent 
nous rattrape, nous blesse 
jusque dans les rêves. 
Pierre Dhainaut, Plus loin dans l’inachevé, Arfuyen, 2010, pp. 17, 19, 49 
Pierre Dhainaut dans Poezibao :
biobibliographie, levées d’empreintes (parution), sur le vif prodigue (parution), extraits 1 
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