"On ne se met pas en grève alors qu'aucune doléance n'a été formulée." Félix Eboué

Publié le 29 janvier 2009 par Garoffat

En ce 29 janvier 2009, jour de grande mobilisation sociale et nationale soutenue par 69% des Français, j'ai décidé de rendre hommage à un homme qui dira un jour, en d'autres circonstances : "On ne se met pas en grève alors qu'aucune doléance n'a été formulée."
Qu'aurait-il dit aujourd'hui ?


Le clan au pouvoir crie à la prise d'otages et ne trouve aucune justification au mouvement... Pourtant, les revendications paraissent assez nettes. Le peuple gronde contre la méthode Sarkozy qui doit nous sortir de la crise. Il manifeste contre les mesures en faveur des banques et des entreprises. Il attend qu'on relance la consommation, qu'on défende l'emploi, les services publics, les salaires et le pouvoir d'achat. Qui a raison ? On en reparlera.


Je souhaite plutôt braquer mon faible projecteur sur un homme qui participa à la défense de notre liberté. Ce qui fait qu'aujourd'hui, on peut encore pour quelques temps faire grève ou non...

" Félix éboué, grand Français africain, est mort à force de servir. Mais voici qu'il est entré dans le génie même de la France ", proclama le général de Gaulle à la mort du " Premier résistant de la France d'outre-mer. "


Né en Guyane, Adolphe Sylvestre Félix Eboué (26/12/1884-17/05/1944) fut l'un de ces français de couleur qui intégra la coloniale. Membre de la SFIO et administrateur colonial, il aura porté la double casquette de fidèle serviteur de la colonisation et d'humaniste. Administrateur pendant des années en Afrique, Secrétaire général en Martinique, Gouverneur de la Guadeloupe sous l'autorité du gouvernement de Léon Blum en 1936, c'était un homme de terrain qui ne restait pas sous sa véranda, dans un palais ou dans une tour d'ivoire pour administrer.

Son approche de la colonisation en Afrique basée sur l'épanouissement des valeurs humaines et sociales dans un cadre de concertation et de respect des traditions africaines en faisait un original au sein de l'administration coloniale.


Félix Eboué déclara un jour dans un discours prononcé à Pointe-à-Pitre en 1937 :
" Jouer le jeu, c'est être désintéressé.
Jouer le jeu, c'est piétiner les préjugés, tous les préjugés et apprendre à baser l'échelle des valeurs sur les critères de l'esprit.
Jouer le jeu, c'est mépriser les intrigues et les cabales, ne jamais abdiquer, malgré les clameurs ou menaces, c'est poursuivre la route droite qu'on s'est tracée.
Jouer le jeu, c'est savoir tirer son chapeau devant les authentiques valeurs qui s'imposent et faire un pied de nez aux pédants et aux attardés.
Jouer le jeu, c'est aimer les hommes, tous les hommes et se dire qu'ils sont tous bâtis sur une commune mesure humaine qui est faite de qualités et de défauts.
Jouer le jeu, c'est mériter notre libération et signifier la sainteté, la pureté de notre esprit... "


Plus tard, Félix Eboué, gouverneur du Tchad, répondit présent à l'appel du 18  juin et sera parmi les cinq premières personnes à recevoir du général de Gaulle la croix de l'Ordre de la Libération. Ce compagnon transforma l'Afrique équatoriale française en une véritable tête de pont géostratégique des forces armées de la France libre durant la seconde guerre mondiale. Promoteur d'une Nouvelle Politique indigène pour l'Afrique équatoriale française, il succomba à un malaise au lycée français du Caire en 1944.


Félix Eboué repose depuis 1949 au Panthéon à côté de l'abolitionniste Victor Schoelcher. Gaston Monnerville, premier président de couleur du Conseil de la République dira à leur entrée : " Deux Français, très grands et très louables, deux hommes, dignes du beau nom d'homme, deux symboles de la fidélité à la dignité humaine. "


Un homme dans toute sa complexité...

Félix Eboué, Le gouverneur nègre de la République (1936-1944)

Félix Eboué (1884-1944) Premier gouverneur «100% noir», des colonies

Félix Éboué