Le rapport de Brodeck de Philippe Claudel

Par Ogresse
Le rapport de Brodeck n’est pas un livre à lire n’importe comment. J’ai fait l’erreur de le lire par petites bouchées alors que j’aurais du le dévorer. En conséquence, il m’a fallu du temps pour m’imprégner de son atmosphère lourde, du style imagé de son narrateur et de sa terrible histoire.
En parallèle avec son rapport sur le meurtre par des villageois d’un étranger farfelu et sans nom, Brodeck rédige son histoire et y raconte sa vérité, le mal qui rode et la culpabilité des hommes, de tous les hommes.

Le style est décousu, on passe d’un fait, d’un personnage à un autre. Brodeck s’en excuse, il est tendu, aux aguets, son texte reflète ces sentiments. J’ai eu un peu de mal à me faire à cette narration à la verticale où les événements ne sont pas dispensés en ordre chronologique mais plutôt à doses homéopathiques.
Le plus gênant pour moi a été d’accepter que les lieux n’aient pas de nom et que l’époque ne soit pas définie (est-ce l’Allemagne, l’Autriche, l’Alsace-Lorraine d’après-guerre ?). En cela, il m’a fait penser au ‘Ruban blanc‘, le film de Michael Haneke, ainsi que pour son côté sobre, efficace et menaçant.

Philippe Claudel nous parle de langue millénaire, de purification, d’étrangers sans utiliser la terminologie habituelle, ce que j’ai au début trouvé frustrant et déstabilisant pour comprendre enfin, à mi chemin, que ce livre était une parabole et non un récit historique. On devine pourtant, malgré le caractère impérissable de cette fable très travaillée, qu’elle se situe probablement dans les années 40, dans un village montagneux et germanophone qui peine à se relever d’une période difficile de son histoire.
Le rapport de Brodeck est un roman qui se mérite et qui, d’ici peu, foi d’Ogresse, fera figure de classique dans la littérature française.

La note de L’Ogresse:


Une lecture commune avec Solenn.