copeaux

Publié le 01 mai 2010 par Hoplite

« De nos jours, la France devrait être prête pour un nouvel Edit de Nantes, cette fois avec les musulmans de France. Car le pays a prouvé dans son histoire que s'il était laïque, il n'avait rien non plus contre l'Etre suprême. Par ailleurs, la réalisation d'un islam modérant sa pureté semble aujourd'hui beaucoup plus probable que celle d'un catholicisme modérant ses impuretés. Pas besoin d'être Freud ou Onfray pour comprendre qu'en cela, la France se voile la face. Paradoxalement, elle le fait au nom des Lumières, dont l'enseigne clignote dans la nuit, même si, à l'évidence, il serait temps d'en changer quelques ampoules. »

Arnaud Viviant est un cuistre, mais on le savait. Je vous engage à lire l'ensemble de son article tellement il abonde en contresens, en contre vérités et en mauvaise conscience pathologique.

Par cet édit qui mit fin aux guerres de religion, le roi de France, Henri IV protestant converti au catholicisme pour accéder au trône, reconnaissait la liberté de culte aux protestants en leur concédant un nombre important de places de sûreté (environ 150) et une indemnité annuelle à verser par les finances royales. La France d'alors était catholique, comme son roi, et çà ce titre attachée à l'homogénéité religieuse et culturelle du royaume.

Quel rapport avec la situation actuelle ? Vivons nous en guerre ? Non, pas encore. Les musulmans vivant en France sont-ils dépourvus de liberté de culte ? Non. Quel rapport avec la situation des protestants de France à la fin du XV1ème siècle et la France d'aujourd'hui ?

La France d'aujourd'hui est laïque et tolérante et de culture chrétienne, contrairement à la très grande majorité des pays d'origine des musulmans de France. La France se voile, certes, et ça n'est pas une bonne nouvelle : l'arbre spectaculaire de la burka cachant la forêt de l'islamisation rapide de ce continent.

Viviant sait tout cela mais fait l'amalgame entre deux populations n'ayant rien en commun. Le même genre de procédé qu'utilise Colombe Schneck pour assimiler juifs d'hier sous l'occupation et musulmans d'aujourd'hui en France*. C'est évidemment une imposture relativement insignifiante mais révélatrice de ce regard pathologique que portent désormais les occidentaux (les européens) sur eux-mêmes et sur l'Autre. J'en ai parlé il y a quelques jours : en deux mots, les Européens ne se sentent plus le droit de désigner des ennemis, pensent que l'ennemi n'existe pas dés lors que l'on ne l'a pas désigné comme tel alors que c'est l'ennemi qui vous désigne comme tel (Julien Freund), quelles que soient vos bonnes intentions...La figure de l'Autre, en l'occurrence les musulmans européens, incarnant la figure de l'opprime, du dominé dans la rhétorique de la domination habituelle de nos modernes qui fait de chacun de nous des oppresseurs, coupables par essence, juste bons à expier nos crimes ; à cet égard la différence de traitement entre islam et catholicisme dans la prose inepte de Viviant est hautement significative : l'islam modère sa pureté et le catholicisme modère ses impuretés ! Très significatif de cet ethno-masochisme de basse intensité qui tient lieu de colonne vertébrale à ces hordes de lemmings festifs et multiculturels.

S'il n'y aura pas d'Edit de Nantes parce que les musulmans d'aujourd'hui ne sont pas les protestants d'hier, la probabilité d'une Saint-Barthélemy n'est en revanche pas à exclure...

Ces « fruits de la croissance » dont nos progressistes nous rebattent les oreilles depuis des lustres se sont transformés sous leur férule experte en fruit pourris de la récession. Et pour longtemps. La fête est finie et beaucoup ne le savent pas encore. Ce que les occidentaux vont se partager ce sont des montagnes de dettes, une remise à niveau sévère en forme de paupérisation massive dont le gosplan néolibéral Hellène est une belle illustration. « Finies les vacances au Cretois, fini le tiercé ! » dit Bernard Blier.

Dans Tout passe, de Vassili Grossman, il y a un dialogue entre deux détenus du goulag. Le premier, bolchevique sincère, veut toujours croire à la révolution malgré son effroyable destin : « Quand on abat la forêt, les copeaux volent mais la vérité du Parti reste la vérité, elle est au dessus de mes malheurs » et, se désignant lui-même, il ajoute : « Je suis un de ces copeaux ».

Viviant est à l'image de ce bolchevique sincère, il reste fidèle, malgré tout, au codex progressiste de l'utopie multiculturelle, mais sans voir qu'il est lui aussi un copeau. Et qu'il va voler.

Ce coup de rabot économique monstrueux dans un contexte de réveil d'identités communautaires -notamment musulmane- partisanes allogènes versus cet ethno-masochisme indigène occidental va déboucher sur un séparatisme à grande échelle basé -entre autres- sur des considérations ethniques et religieuses, dés lors que la dimension nationale -ou continentale- n'est plus/pas opérante. Rien n'exclut le surgissement de conflits intérieurs, de guerres civiles dans un avenir proche. Sortes de saint barthélémy modernes. Nous y sommes.

* « l'affaire Liès Hebbadj , polygame présumé, a rappelé à la journaliste Colombe Schneck l'histoire de ses arrières grands-parents, menacés de dénaturalisation parce qu'ils étaient juifs ».