"Les aventures extraordinaires d'Adèle Blanc-Sec".

Par Loulouti

Quelle claque…de déception.


Les teasers étaient plutôt sympathiques et la bande annonce intéressante mais en assistant à la projection du film de Luc Besson "Les aventures extraordinaires d’Adèle Blanc-Sec" je me suis senti trahi moi le passionné de l’œuvre de Jacques Tardi depuis bientôt 20 ans.


Le dernier né de Luc Besson est un produit creux sans âme qui tombera rapidement dans l'oubli. L’ambition de créer un personnage d’aventurière à la française ne dépasse pas le stade des bonnes intentions.


Quel ennui.


Ma première pensée a été de me demander si Luc Besson avait bien lu au moins un album des aventures de l’intrépide journaliste.


Le long métrage, à la croisée de "Adèle et la Bête" et "Momies en folie", respectivement 1er et 4ème ouvrages de la série, ressemble à un patchwork informe et indigeste.


J’étais enthousiaste à la base quand le projet a commencé à prendre forme et je me suis même dit que Louise Bourgoin pourrait faire une Adèle Blanc-Sec plus qu’honorable (même si mon choix initial est et restera Sylvie Testud qui à le charisme et la gouaille nécessaires).


Je sais qu’il n’est pas toujours judicieux de comparer une œuvre de papier et sa transposition sur grand écran car beaucoup de données sont à prendre en compte (la densité du matériau, le nombre de personnages, les unités de temps, lieu et action) mais dans le cas d’une bande dessinée, une mise en perspective est plus que nécessaire. De même prétendre qu’une bonne adaptation consisterait à adapter planche par planche un opus serait parfaitement stupide.


Malheureusement la sauce n’a pas pris. Depuis toujours l’univers d’Adèle Blanc-Sec représente le summum de l’étrange, du mystère, de l’horreur parfois. Les épreuves traversées par la demoiselle de la belle époque sont non conventionnelles. Luc Besson a transformé ce monde si particulier où des thèmes où l’onirisme ou l’ésotérisme sont légions en une vaste farce bouffonne ponctuée à des intervalles réguliers (et même chronométrés pour dire au spectateur où ce dernier doit rire) de gags lourdingues.


Je considère que Luc Besson a manqué de respect à l’œuvre de Tardi en envoyant ad patres l’esprit si particulier, le ton si impertinent des exploits d’Adèle Blanc-Sec. Le cinéaste français n’a retenu qu’une infime partie (et encore) de la sève originelle, de ce qui faisait le charme désuet (dans une acceptation non péjorative) du Paris et de la France de l’entre deux guerres pour nous servir, et c’est devenu une habitude chez le bonhomme, un divertissement grand public passe-partout.

Rassurez vous : pas de choses horribles dans le film de Mossieur Besson. Point de scènes choquantes.


Il y a forcément des spectateurs que le film va à coup sûr intéresser car Luc Besson connaît son cœur de cible à la perfection mais Adèle Blanc-Sec ce n’est pas ce truc !!!


Traiter moi de naïf si vous le souhaitez mais je m’attendais à être plongé au cœur d’un mystère prenant et passionné, une ambiance étouffante qui serait fidèle à une bande dessinée étonnante, variée et décousue (Tardi a construit un puzzle sur près de trente dans lequel les différents albums se complètent et se répondent en permanence). Au lieu de ça, nous avons le droit à du tout venant, du pré mâché.


Dés le commencement le film prend une mauvaise direction. Besson nous sert la pâle copie d’un long métrage de Jean-Pierre Jeunet. Le sempiternel narrateur, par ailleurs si important et tant attendu, tombe ici à plat.


L’histoire du ptérodactyle se trouve bien vite reléguée au second plan et Luc Besson laisse Adèle fait son show sans filet. Nous assistons incrédules à une succession de pauvres situations soi-disant comiques. L’artifice des déguisements à la prison de la Santé en devient presque gênant tant la répétition épuise le mince crédit accordé au long métrage.


J’ai trouvé le scénario poussif et les transitions assez mal ficelées. Les rebondissements sont quasiment inexistants. Le tout semble très convenu et gratuit. Mais c’est la dernière partie au Louvre qui m’a particulièrement choqué. La conclusion est on ne peut plus risible.


L’intrigue de la sœur handicapée suite à un horrible accident vient parasiter ce qui aurait du être le pivot du film, à savoir un mélange de mystère, d’investigations policières et des situations étranges qui constituent le sel des bandes dessinées (où nous cotoyons des savants fous, des sectes, des assassins de tous bords etc...)


Nous avons toutes et tous notre propre lecture d’un matériau originel mais je crois que les passionné(e)s d’Adèle Blanc-Sec seront d’accord avec moi : on ne retrouve pas chez le personnage vu par Besson l’effronterie, la liberté de ton, l’espièglerie de la jeune aventurière (et surtout l'art de se fourrer dans la m.... toute seule).

L'Adèle à la sauce Europacorp est une petite rigolote qui a fini par m'éxaspérer.


Les dialogues sont insipides. Certaines phrases sont énoncées sans enthousiasme apparent.
L’un des éléments qui sauvent le film du naufrage intégral est la reconstitution historique qui donne quand même au long métrage un cachet d’authenticité.


Les effets visuels ne sont pas vraiment fameux. Seul le ptérodactyle a du style et sort du lot mais c’est bien pauvre.


La musique d’Eric Serra, fidèle parmi les fidèles de Luc Besson, est sans saveur. Par le passé les bandes originales du sieur étaient comme des signatures, des marques de fabrique. La partition du film "Les aventures extraordinaires d‘AdèleBlanc-Sec" se gomme de nos mémoires aussi vite qu’elle y était apparue.


Louise Bourgoin tire quand même son épingle du jeu dans le registre qui lui est proposé mais elle est à mille lieues d’une Adèle Blanc-Sec digne de ce nom. A part quelques fulgurances, elle subit un scénario essoufflé et une ligne de conduite pas vraiment opportune. Mais la comédienne a du potentiel.


Gilles Lellouche est parfaitement ridicule en inspecteur Caponi et Gilles Giraud joue trop sur la réserve en Andrej Zborowski.


Matthieu Amalric est météoriquement présent en dans le rôle de Dieuleveult.


Jean-Paul Rouve est carrément grotesque en Justin de Saint-Hubert.


Seul Philippe Nahon (une fois de plus) en Professeur Ménard et Jacky Nercessian en Espérandieu sont crédibles dans leurs interprétations respectives. Un bon point pour eux.
Luc Besson est un réalisateur qui s’est embourgeoisé. Il n’a plus le mors aux dents comme il y a 25 ans.


A l’époque il voulait mettre un grand coup de pied aux fesses d’une industrie cinématographique française détenue par des oligarques du 7ème art. Aujourd’hui il appartient à leur cercle et la donne a changé. Evolution "naturelle".


Le Luc Besson des années 2000 ne ressemble en rien au brillant cinéaste des années 80 et 90. Les "Léon" et "Nikita" sont bien loin. "Adèle Blanc-Sec" sera à coup sûr un succès au box office et lui fera gagner plein de pognon mais je crains que le metteur en scène se coupe d’une partie de son public.


Des personnes comme moi qui rêvent d’exubérance, de projets gonflés et pas d’une succession d’étrons sans nom produits par son usine à conneries.