Iran : des bruits de bottes, et un triste goût de déjà vu

Publié le 07 novembre 2007 par Fares
L'Iran est le 4ème producteur de pétrole du monde (2ème exportateur de l'OPEP). Il est également la 2ème réserve de pétrole brut du monde, avec 133 milliards de barils.
En terme de gaz naturel, les iraniens ne sont pas mal lotis non plus, puisqu'ils ont la deuxième plus grande réserve au monde, derrière la Russie. (source : wikipedia)
Voilà. J'ai dit l'essentiel. Je pourrais presque m'arrêter là. Mais on va continuer encore un peu.
Comme l'a dit Brzezinski (voir billet précédent), la politique américaine a ("involontairement" ?) eu pour effet d'attribuer à Ahmadinejad un degrés d'influence que sa position ne justifie pas.
Depuis plusieurs mois (depuis grossomodo 2 ans en fait), on a en effet pu remarquer une escalade des menaces contre l'Iran, qui sont autant de violations patentes de la Charte des Nations Unies, comme le rappelle Noam Chomsky :
http://www.youtube.com/watch?v=cQ1REGsexhc
Une escalade des menaces qui s'est également accompagnée d'une campagne de désinformation particulièrement "dégueulasse" (pour reprendre un terme à la mode en ce moment).
Comme disait mon prof de droit citant Beaumarchais :
Calomniez, calomniez, il en restera toujours quelque chose
Calomnies, intox, et fausses vérités. Je n'en citerai que deux :
  • L'obligation en Iran de porter des signes religieux discriminatoires pour les non-musulmans : "les juifs devront coudre un emblème jaune sur leurs vêtements, les chrétiens un rouge et les zoroastriens un bleu". (Voir article)
  • Le très fameux : "Israël doit être rayé de la carte". (Voir article)

Aujourd'hui la situation semble extrêmement tendue.
Comme l'indique un article publié sur Radio-Canada qui reprend les infos du Canard enchaîné, la menace de guerre semble se faire de plus en plus précise. Le raid militaire israélien contre la Syrie du 6 septembre dernier pourrait être une répétition générale de l'offensive qui se prépare contre l'Iran.
Pourtant l'Iran s'est mis en conformité avec l'AEIA, et les autorités iraniennes ne semblent pas montrer l'attitude belliqueuse que les néo-conservateurs voudraient bien leur prêter. L'Iran a également fait visiter ses installations nucléaires aux pays non-alignés.
Rappelons également l'interview d'Ahmadinejad par CBS (par l'intermédiaire de Scott Pelley) le 20 septembre dernier, dans laquelle il rappelle que son pays n'a aucune velléïté de guerre :
Lire l'interview en anglais.
Lire la traduction en français.

Pour en revenir à l'essentiel (et donc au pétrole), rappelons également les propos d'Alan Greenspan (Président de la Banque Centrale des Etats-Unis d'août 1987 à janvier 2006), qui reconnaît que la dernière guerre d'Irak était avant tout liée au pétrole (voir article). C'est également ce que laisse entendre Henry Kissinger à propos de la potentielle future guerre d'Iran (voir article) :
An Iran that practices subversion and seeks regional hegemony -- which appears to be the current trend -- must be faced with lines it will not be permitted to cross. The industrial nations cannot accept radical forces dominating a region on which their economies depend, and the acquisition of nuclear weapons by Iran is incompatible with international security.
Voilà qui fait écho à ce que le même Henry Kissinger avait déjà dit auparavant :
Oil is much too important a commodity to be left in the hands of the Arabs.

Les points de comparaison avec la situation fin-2002/début-2003 (qui a précédé l'invasion de l'Irak) sont nombreux. Je vois toutefois deux différences majeures.
La première, c'est qu'une partie de l'opinion américaine n'est plus dupe, et n'est pas prête à se laisser rouler dans la farine une nouvelle fois de la même manière qu'il y a 5 ans.
Voir par exemple l'intervention du Sénateur Byrd.
Le déclenchement d'une nouvelle guerre contre l'Iran pourrait également donner un coup de boost aux mouvements citoyens aux Etats-Unis qui réclament le lancement d'une procédure de destitution à l'encontre du tandem Bush/Cheney.
Mais la deuxième différence majeure, qui nous concerne plus directement, c'est l'élection de Nicolas Sarkozy en France, et sa politique extérieure de ralliement inconditionnel aux néoconservateurs américains (voir billet précédent).
Dans cet article on prend cher, et malheureusement c'est mérité.
Aujourd'hui on est loin, très loin... on est à des années lumières du discours de Dominique de Villepin devant le Conseil de Sécurité de l'ONU le 14 février 2003.
Aujourd'hui, c'est Nicolas Sarkozy qui joue le rôle du petit nerveux de service avec son "je ne transigerai pas" (voir article), tandis que Vladimir Poutine adopte le ton mesuré qui était celui de la France il y a 5 ans (voir article).
Comment est-on tombé si bas ?