De Villepin inspirateur de BD ?

Publié le 10 mai 2010 par Arnaud Lehmann

France Info

Les mots et la geste

JEAN-CHRISTOPHE OGIER

C’est la BD qui va faire parler en ce mois de mai. Elle a pour titre « Quai d’Orsay », elle est sous-titrée « chroniques diplomatiques » et elle est dominée par la figure d’un personnage qui ressemble furieusement à Dominique de Villepin.

Dans la BD, il a pour nom Alexandre Taillard de Worms. Mais dès la couverture, sous les ors d’un ministère, derrière un bureau Empire, ce costume noir aux larges épaules, penché sur un dossier que l’on devine important, nul doute, c’est lui. Puis, dès les premières pages, c’est un festival. Les mots et les gestes : Tout y est, finement observé par le scénariste Abel Lanzac -il paraît que le pseudo cache un conseiller qui a travaillé avecVillepin époque Quai d’Orsay ! -, et fidèlement retranscrit par le dessinateur Christophe Blain. Tout, c’est le rythme des phrases, tchac, tchac, les élans lyriques, les stances syncopées, le vocabulaire, ou plutôt ce qu’il est convenu désormais d’appeler les éléments de langage, et puis le mouvement du corps, vlon, à la fois souple et raide, et les mains qui s’agitent, accompagnent, tac, tac, ponctuent le propos. Il parle vite, il court, pour résoudre une crise, préparer un discours, recevoir un écrivain connu. Dans « Quai d’Orsay », nous suivons les péripéties du récit à travers les yeux d’un jeune homme formé aux grandes écoles et nouvellement embauché dans la garde rapprochée du ministre, nous croisons les hommes et femmes de cabinet, de salles de réunion en voyage officiel, mais on ne voit que lui. Alors on se demande ce qu’en pense le principal intéressé ainsi croqué au pas de charge ? Et bien, du bien, ma foi. Interrogé ce mois-ci par le magazine BD Casemate, Dominique de Villepins’est dit fasciné par le mouvement, l’espèce de tornade alors que communément lorsque l’on parle du quai d’Orsay, on s’attend à une vieille dame pluri centenaire, immobile, sclérosée, arthrosée. DuVillepin dans le texte. Pour notre part, tout en saluant le dessin virtuose, nous refermons le livre un peu déçu. C’est ébouriffant pendant 40 pages, mais ensuite les gestes se répètent, les dialogues aussi. Dommage ! A moins qu’il ne soit question de démontrer que toute cette agitation est bien vaine. Et pas si drôle que ça.


« Quai d’Orsay », « Chroniques diplomatiques n°1 », Abel LanzacChristophe Blain, aux éditions Dargaud.