Fantômes japonais #4 : 10 ans, ça se fête !

Publié le 12 mai 2010 par Luxyukiiste

En 2010, Ju-On fête ses 10 ans : 10 ans de Kayako, 10 ans de heeehehrhreccceekckekrkr, 10 ans de miaulements, de descentes d’escaliers, de malédictions… Et aussi 10 ans durant lesquels la formule aura été répétée ad nauseam dans 7 films, en comptant les premiers V-Cinema. Pour fêter cet anniversaire, en plus de la sortie d’un jeu tout pourri, nous découvrons deux moyens-métrages d’une heure, Kuroi Shoujo et Shiroi Roujo, qui s’éloignent de la mythologie Grudgienne tout en en conservant certains aspects. Voyons ce qu’ils ont à offrir.

Ju-On : Kuroi Shoujo (la fille en noir) reprend en effet les caractéristiques de ses prédécesseurs : découpage en sketches, temporalité déconstruite, personnages dérangés et situations marquantes. Je l’expliquais dans mon premier article sur les yurei flicks, au chapitre Ju-On : la saga ne propose pas réellement d’histoire mais un enchaînement de situations, rencontres, croisements… Qui amènent toujours à fricoter de près ou de loin avec l’origine du mal : l’ancienne maison de Kayako, ou elle et son fils (et son chat) ont été assassinés par son mari. D’abord confinée dans la maison, la malédiction se déplace ensuite des habitants de celle-ci à leurs connaissances, les poursuivant jusque chez elles… Comme tout le monde meurt la nuit à la même heure, le montage suit alternativement chacun(es) des condamné(es), proposant au spectateur de se sortir de ce labyrinthe. Et ces morts, souvent très visuelles et travaillées, laissent de grands souvenirs, ainsi que le comportement irrationnel des futures victimes, rendues folles par l’omniprésence du petit enfant bleu et de la femme qui croasse…

Là où le Ju-On 2010 change la donne, c’est en n’entretenant qu’un lointain rapport avec ce célèbre duo, le petit Toshio n’apparaissant qu’en cameo pour faire plaisir aux plus vieux fans. Un choix à double-tranchant, qui peut vaincre la lassitude comme se couper de la base de la série. A vrai dire, je suis partagé : le choix d’un nouveau fantôme permet de développer une nouvelle histoire, même si ce n’est que pendant une heure. Mais, en même temps, comme le fan est un être borné, il aime bien qu’on lui resserve ses plats préférés jusqu’à l’indigestion. Ici, pas de descente d’escalier, pas de miaulement téléphonique, seul le célèbre croassement a survécu au lifting. De plus, après avoir vu le trailer, j’étais sceptique : après les longs-métrages japonais et américains, retomber dans l’esthétique Vidéo-drama (certes soignée) ne me disait rien de bon, surtout s’il fallait hériter de la qualité de jeu de ces productions. Et en faisant le bilan, c’est un peu agaçant : le jeu est dans l’ensemble assez forcé, et le casting s’est plutôt fait dans une agence d’idols et de beaux garçons qu’à la sortie des théâtres. Bon, soyons honnêtes : pour les jeunes filles, on ne va pas se plaindre, et passé le début, le film se défend pas si mal.

La bonne idée des producteurs est d’avoir laissé Takashi Shimizu s’occuper au moins de l’histoire. Et c’est tant mieux, car on retrouve des situations typiques de la saga. De plus, mettre une fillette possédée au centre du scénario n’est pas pour me déplaire, la petite se débrouillant d’ailleurs pas si mal. Pour en revenir à l’image, malgré un rendu Vidéo, elle est vraiment belle, et certains plans (fixes notamment) sont très soignés (non je ne parle pas que de l’infirmière). On a même droit a des effets spéciaux, la scène finale étant d’ailleurs sans hésiter une des plus marquantes de toute la série, sans que son rendu paraisse ridicule. Certes, il manque bien une bonne demi-heure pour installer une tension plus diffuse, et s’attacher aux personnages. Le jeu réserve aussi le film aux amateurs de la première heure qui sauront faire avec cette particularité japonaise. Malgré ça, rien que pour sa fin, Kuroi Shoujo vaut le coup. Maintenant, qu’en est-il de son jumeau, Shiroi Roujo, alias la vieille dame en blanc ?

Et bien, tout d’abord, impossible d’échapper à cette remarque : le fantôme est absurde. Je ne dis pas qu’un enfant qui pousse des miaulements au téléphone paraît plus sérieux, mais là, une vieille femme qui surgit un ballon de basket à la main, il faut le faire. On se retrouve donc avec quelques scènes où le spectateur est partagé entre peur et rigolade, ce qui annihile une partie de l’impact du métrage. Ceci dit, l’histoire revient à l’origine de la saga : un bon vieux meurtre de famille, avec une histoire de maison, même si celle-ci semble être différente de celle que l’on connaît. Ajoutez à cela un triste souvenir familial et beaucoup de culpabilité, et vous obtenez une histoire dans la droite lignée des classiques du genre, toujours écrite par Shimizu. Le reste est à l’image de mes commentaires du dessus sur Kuroi Shoujo, négatifs comme positifs. En bref : ces deux moyens-métrages sont à conseiller uniquement aux fans, qui seront ravis de retrouver les situations tordues qui faisaient leur joie auparavant. Cependant, on reste loin de la qualité d’écriture des deux longs-métrages, et le jeu peut parfois agacer. Reste que si c’est un final, il aurait pu être pire : autant en rester là et se repasser le meilleur, sauf si Shimizu revient à la réa avec de meilleurs acteurs…